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mercredi 31 octobre 2018

Histoires de Cimetières - Boris Akounine

Hooo la jolie découverte, faite totalement par hasard en hantant les rayons de ma nouvelle bibliothèque!

Akounine faisait partie des auteurs " à découvrir", pour ses romans policiers, mais ce sera au final par un recueil de nouvelles que je fais connaissance avec lui ( cochant au passage un nouvel auteur de LA liste).



Et il s'avère que le monsieur partage avec mes camarades du challenge Halloween et mo-m^me, un certain goût pour la promenade taphophile. C'est ce qu'il met en avant ici, en collaboration avec "Grigori Tchkhartichvili" ( un nom plus simple à écrire en cyrillique!). Mais qui est Grigori T?

Lui-même! Boris Akounine étant son nom de romancier, il a donc coécrit cet ouvrage .. avec lui-même, se partageant équitablement le travail.
A Grigori, le collecteur d'informations, la tâche de présenter les cimetières avec quelques photos, la manière dont il les as découverts, ce qu'on peut y trouver, bref la partie " tourisme", à Boris, le romancier, celle d'écrire suite à chaque visite une nouvelle mettant en scène un ou des pensionnaires du lieu.

C'est peu dire que j'adore ce principe de dédoublement qui en dit pas mal sur la personnalité farfelue du gars ( mais doit aussi être pour lui une manière de se distancier de son alias littéraire)
Et donc Boris-Grigori nous emmène visiter le cimetière Donskoï à Moscou, Highgate à Londres le père Lachaise, le cimetière étranger de Yokohama, le cimetière Green-wood de New-York et celui du mont des Oliviers de Jérusalem. Chacun étant lié à un aspect de la mort: la mort soudaine, la mortsans effroi, la mort optimiste...

A Moscou, il s'intéresse de près à la tombe devenue illisible de Daria Nikolaïvna Saltykova ( à ne pas confondre avec sa quasi homonyme Daria Petrovna Saltykova, cette fois, l'emploi du patronyme est très justifié, Daria Petrovna n'ayant pas commis de crimes )  dite "Saltytchikha" ( avec le suffixe péjoratif " tchikha", qui fait de suite comprendre que c'est une femme, et surtout quelqu'un d'infréquentable, détestable et détesté.
Noble et surtout riche, elle a existé, est s'est tristement illustrée à l'époque de Catherine II en faisant arbitrairement exécuter une bonne centaine de paysans, et surtout de paysannes qui avaient le tort d'être plus jolies que Daria .Et même si à l'époque, le servage n'était pas aboli, et tuer un paysan était simplement passible d'une amende, l'ampleur des exactions de Daria lui a valu un procès retentissant, la déchéance de ses titres de noblesse, et la prison à vie, où elle mourir après 33 ans de réclusion. Catherine ne rigolait pas, mais bon en même temps, la prison à vie n'est pas une punition démesurée pour plus de 130 crimes, et Daria  a eu la " chance" si on peut dire d'échapper à la peine de mort qui avait été abolie quelques années avant que ses crimes ne soient révélés.

Daria va être l'involontaire anti-héroïne fantomatique de la nouvelle dédiée au cimetière Donskoï:
Années 2000, Nikolaï Tchoukhtchev est policier et étudiant à l'académie judiciaire pour devenir gradé. Pas par ambition sociale d'un poste à prestige mais parce qu'il lui donne accès à des lieux sécurisés et des documents confidentiels, afin de satisfaire sa vraie passion: Nikolaï est chercheur de trésors. Donc lorsqu'il voit par hasard , des ouvriers sur un chantier en train de creuser un trou, au pied d'une église, il repère vite ce qui semble être une vieille porte ensevelie. Ni une ni deux, il revient nuitamment explorer le souterrain, car qui dit porte cachée, dit mystère et peut-être trésor.
Il n'y trouve qu'une pièce où avaient lieu des exécutions par la tchéka, historiquement intéressant, mais sans objet pour un chercheur de trésors.Nikolaï a un tic, lorsqu'il réfléchit, il se passe le doigt sur les dents, et ce tic est justement un geste magique qui permet d'invoquer le fantôme de Daria Nikolaïevna. Passée la première surprise et la première frousse, de voir une vieille dame devant lui au fond d'un souterrain muré, Nikolaï mène son enquête avec les élément qu'il a pu apprendre: le fantôme l'a confondu avec son quasi homonyme Nikolaï Tioutchev, son ancien amant , qui l'a trahie. Et surtout, les minutes du procès révèlent que Daria n'a jamais avoué où elle avait caché ses richesses, qui dorment donc quelque part à Moscou depuis deux siècles.
Nikolaï décide donc d'endosser le rôle de son illustre prédécesseur,  de "se" faire pardonner la trahison et de pousser Daria à lui dire où est le magot.
Tiens ça me rappelle quelque chose...la nouvelle la plus célèbre de Pouchkine, où un militaire essaye de soutirer aux fantôme d'une vieille comtesse des informations pouvant faire sa richesse ;)

A Londres, après avoir pointé l'ironie du fait que les visiteurs payent l'entrée du cimetière de Highgate pour voir en particulier la tombe de Karl Marx, pourfendeur illustre du capitalisme, et évoqué la rousse Elizabeth Siddal, que son mari Dante Rossetti, peintre et apprenti poète avait fait enterrer avec un recueil de poèmes inédits à sa mémoire, avant de se raviser et de faire exhumer Elizabeth pour récupérer et faire publier l'ouvrage, c'est bien entendu  l'histoire du vampire de Highgate qui retient l'attention de l'auteur à double casquette.
Je ne vous dirais pas qui est le vampire surnommé " le maure", mais en tout cas, il sélectionne ses victimes sur des critères intellectuels: morte quelqu'un de mal sélectionné et c'est le risque de se retrouver contaminé par ses idées.

3° étape, le père Lachaise. Je ne vous présenterai  pas le cimetière qu'on connaît bien en France, passons donc à l'histoire qui lui est adjointe: Pavel " Pacha" est un intellectuel moscovite, féru de littérature. Mais comme ça ne payait pas bien, voire pas du tout,il a décidé d'utiliser ses connaissances en histoire littéraire et son goût pour les archives de manière plus lucrative: le pillage de tombes de gens célèbres, lorsqu'il découvre que telle ou telle célébrité a été enterrée avec un trésor, un  bijou ou que ce soit qui puisse être revendu comme relique à des fans.
Jamais des choses de notoriété trop publique, plutôt du genre confidentielles, que personne ne connaît et dont il sera difficile de trouver un témoignage écrit après le passage de Pacha . Et avec son complice "La Taupe"ancien fossoyeur, le business roule bien, Pacha déniche les informations, a Taupe s'occupe de la logistique, et le client repart avec sa commande.
Or cette fois,c'est un très gros coup qu'il veulent monter, dérobant une bague précieuse à l'une des célébrités du père Lachaise.
Mais voler un bijou à un mort n'est pas une très bonne idée, le cadavre ne pourra pas protester, mais le fantôme peut vouloir récupérer son talisman...Et la chute de cette histoire est particulièrement cruelle ET savoureuse.

Plus exotique, la 4° visite est celle du cimetière pour étrangers de Yokohama. Cimetière curieux qui a pour particularité d'être la dernière demeure d'étrangers qui sont morts par accident au Japon.Par accident, ou,au début du XX° siècle, par meurtre.simplement parce que les gaikukojin ( étrangers) étaient mal vus par les nationalistes japonais.
Et c'est pour moi l'occasion de faire connaissance avec Eraste Petrovitch Fandorine, personnage récurrent d'Akounine, que je découvre pour la première fois, mais dont je vais suivre sérieusement les enquêtes.Et donc l'action se passe àYokohama, à la fin du XIX° siècle, ou au début du XX°, et Le diplomate Fandorine, en mission au Japon, assiste aux funérailles dun de ses compatriotes naturalisé japonais qui avait décidé de devenir moine bouddhiste.
Histoire de rajouter des bizarreries, celui qui se faisait appeler Meitan est mort dans des circonstances étranges, qui semblent impliquer un yôkai " shigumo", capable de prendre une forme humaine et une autre d'araignée pour vous sucer le sang.
C'est en tout cas ce que prétend l'effrayante Emi Terada qui vit au temple.
Effrayante car sa tête et son corps ne vont pas ensemble. Sa tête est celle d'une femme adulte, sa taille celle d'une petite fille de 4 ans. Un nanisme qu'elle met  sur le compte d'une attaque de Shigumo quand elle était enfant et qui a stoppé sa croissance.
Mais Fandorine est un émule d'Hercule Poirot, et bien peu enclins à croire aux fantômes, pour lui,un coupable bien vivant est à l'oeuvre , utilisant le folklore pour brouiller les pistes, et il se fait fort de le retrouver.

5° visite, le cimetière de Green wodd, à New York, qui bien que contemporain et encore utilisé, compte quelques carrés anciens, et était au XIX° siècle un lieu de promenade et de pique-nique.
Et outre des industriels aux noms mondialement connu ( Colgate est le nom de quelqu'un avant d'être une marque), il y a quelques histoires cocasses à raconter à son sujet, et, en particulier, s'y trouve la tombe de la femme fatale la plus célèbre de son époque, Lola Montes, pas du tout espagnole,mais née Eliza Gilbert quelque part en Irlande.

C'est Lola-Eliza qui sera l'élément fantastique de cette nouvelle: un riche avocat d'origine russe, qui a tout prévu dans sa vie, planifié dans les moindres détails, décide qu'il est temps de son vivant, d 'acquérir une concession à Greenwood, histoire de planifier aussi son éternité ( l'homme le plus ennuyeux du monde de mon humble point de vue). Et tout se passe effectivement selon ses plans, jusqu'au moment où un grain de sable va tout faire dérailler: alors qu'il vient choisir sa concession au cimetière, il rencontre une élégante dame, en visite sur les tombes. Et elle semble avoir beaucoup de monde à voir à Greenwood, tous morts dans ces circonstances violentes.
Car évidemment, c'est ELLE, et personne d'autre. Mais ça, l'ennuyeux Micha ne s'en rend pas compte. ELLE a pris l'apparence de la tapageuse séductrice du XIX°siècle, mais Micha ne sait pas non plus qui est cette dame qui passe son temps au cimetière. Lorsqu'elle lui propose , en échange d'un service rendu, de lui faire une prédiction,il ne voit qu'une voyante, peut être un peu dérangée. Mais dans une vie aussi réglée,un peu de mystère ne fait pas de mal...croit-il.

Etdernière visite, le cimetière du Mont des Oliviers, le plus ancien, le plus historique, mais  pas le plus passionnant, avec son allure de salle d'attente du jugement dernier ( c'est comme ça qu' Akounine le voit). Un endroit où reposent des gens persuadés d'être aux premières place pour cet événement, une morttranquille, paisible et sans peur.
C'est donc l'idée qui sera développée dans la dernière nouvelle, bien titrée "Happy end". Lorsque l'humanité aura résolu les problèmes de la mort soudaine par maladie, accident etc..; de la vieillesse, grâce au transhumanisme, la mort et sa date ne sera alors plus qu'une question de choix personnel. C'est l'idée qui s'impose au "Très Vieil Ecrivain", pour qui, après plus de 130 ans de vie, donc une bonne centaine avec sa femme, l'existence se déroule longuement, morne, ennuyeuse. Il a déjà tout fait, tout vu, les événements n'en sont plus car tout lui est déjà arrivé plus de 10fois, et son existence semble vouée à se prolonger encore, sans que rien ne l'amuse, ni ne l'étonne plus...il est donc temps de penser à la terminer tranquillement.

Ho que j'ai adoré ce recueil, joliment orné de gravures " à l'ancienne", mais parfaitement adaptées à chaque nouvelle, ouvre d'une dame nommée Tatiana Nikitina.
Très jolie découverte, je regrette juste qu'elle soit si courte ( pourtant plus de 230 pages),  mais c'est une superbe mise en bouche pour découvrir l'auteur, je n'en ai pas fini avec lui, j'aime beaucoup son sens de l'humour absurde.
Je conseille donc haut et fort!




1 commentaire:

  1. et bin une chouette facon de decouvrire Akounine....vraiment des histoires qui semblent passionnantes....;)

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