Parce qu'il y a les sorcières.. mais aussi les gouvernements qui jouent aux apprentis sorciers. Et c'est beaucoup plus flippant.
Et malheureusement ce genre de choses ne finit jamais bien.
Il fut un temps ( les années 60- 70) où le nucléaire c'était bien, c'était l'avenir, fallait être un sacré rétrograde pour ne pas l'accepter. Genre " tu veux en revenir à la bougie?", comme s'il n'y avait pas d'autre option.
Alors la France en particulier s'est couverte de centrales (et encore il y en a moitié moins que ce que le projet originel prévoyait) pour faire face aux chocs pétrolier, indépendance énergétique tout ça. Mais entre toutes les solutions envisageables, c'est celle qui produisait le plus de déchets qui a été retenue. Pourquoi. Parce qu'avec les déchets du nucléaire civile, on pouvait, cette aubaine, fabriquer la matière première du nucléaire militaire. En pleine guerre froide, la course à "qui qu'à la plus grosse bombe", et pour faire partie du club très sélect des pays détenant l'arme absolue, la France a misé sur la solution la plus simple: construire plein de centrales ( j'ai visité celle du Tricastin. 4 réacteurs dont 3 qui fonctionnent juste pour faire alimenter le dernier dédié à l'enrichissement de l'Uranium et ils sont contents de vous le raconter en plus, y'a que moi qui trouve ça super con?)
En France, on n'a pas de pétrole mais on a des idées ( un peu nases).
Déjà en 1979, l'accident nucléaire de Three Mile Island aurait du mettre un frein à la chose mais non.
Il a fallu attendre le 26 avril 1986 pour que change la donne. Au moins en partie. Dans l'opinion publique.
Un petit coup de flippette? C'est impressionnant. Et une fois de plus c'est une boulette, une bête erreur de manipulation qui a causé une réaction en chaîne- pour une fois l'image est totalement approprié - gigantesque. C'est ballot, hein, des milliers de victimes mortes ou malades parce qu'on a décidé de continuer une expérience qui était partie en banane.
Ah oui et puis, seconde boulette: pour empêcher l'incendie de s'étendre, les autorités ont eu une vache de bonne idée: le couvrir. Pas avec de l'eau qui serait partie en vapeur toxique dans le ciel. Donc, faisons ça avec du sable.
Question que se passe-t-il quand on chauffe du sable à une température de plusieurs centaines de degrés?
Bingo il se liquéfie, c'est même comme ça qu'on fait du verre.. sauf que là, le verre liquide ne refroidissait pas, s'est donc changé en lave chargée de tout un tas de cochonneries hautement radioactives. Qui menaçait et menace probablement toujours de défoncer le sol de la centrale sous laquelle il y a bien sûr une nappe phréatique.
Du corium , surnommé " patte d'éléphant". Il s'en forme à chaque accident nucléaire. Donc en voulant limiter les dégâts, dans la panique, on a empiré la chose en l'alourdissant de plusieurs tonnes.
Je me souviens bien de cette date, non que la chose ait été évoquée en classe, à cette époque, on ne discutait pas les actualités en classe, ça n'était pas de mise, mais surtout pour les infos aberrantes qui ont suivi: le nuage radioactif qui est passé sur toute l'Europe dans les jours qui ont suivi. Sauf dans une seule région qui résiste encore et toujours, cocorico. Le nuage radioactif s'est arrêté à la frontière Italienne, il n'est pas passé sur la France.
J'avais 9 ans, et même à 9 ans, je me souviens avoir dit à mes parents que je n'y croyait pas , qu'un nuage ça ne s'arrête pas aux frontières quand on lui demande et que donc on nous prenait pour des billes ( enfin, dans mon idée, c'était un nuage "nuage" , un truc flottant et visible, après tout on voyait bien un nuage sur les photos de bombes atomique à Mururoa)
Et puis l'été suivant, les infos nous rappelaient régulièrement que la contamination n'était pas passée sur la France, mais qu'il ne valait mieux pas ramasser et manger les fruits sauvages ( parce qu'il faut croire que ceux de plein champ risquaient moins) et les champignons, " juste au cas où".
Enfin, non ça n'a pas été contaminé, mais évitez quand même? On nous prendrait pas un petit peu pour des cons?
Enfin, maintenant il est bien établi que ce putain de nuage invisible est passé sur nous, à deux reprises au moins et que ma région fait non seulement partie de celles qui ont été bien touchées, mais qu'elle est une des plus nucléarisée d'Europe ( j'ai 3 centrales à moins de 80 kilomètres et le gouffre à pognon ITER en cours de construction pas loin non plus)
Mais bon, ça n'a pas empêché Areva de nous faire croire que le nucléaire c'était bien, c'était cool, c'était l'énergie dont le monde à besoin.. Carrément. L'Atome c'est funky! Et cette publicité hallucinante date d'il y a une dizaine d'années en gros.
Merci mais ...non, le monde n'a pas franchement besoin de ça.
Et puis Mars 2011 est arrivé, Fukushima, une piqure de rappel pour ceux qui doutaient encore des dangers.
Ben oui, à l'époque de Tchernobyl c'était l'URSS, donc, dans l'idée de mes compatriotes, un endroit vaguement sous-développé et peu regardant sur la sécurité publique ( euh...la technologie soviétique, c'est un peu celle qui a lancé le premier satellite artificiel et le premier homme dans l'espace, on en reparle? Bon pour la sécurité publique, je ne contesterai pas)
Genre " ça se passe chez les cocos, c'est loin de chez nous, tout ça" ...
Mais là le Japon en 2011, tout le monde s'accordait plus où moins à penser que c'était le summum de la modernité, de la sécurité, du risque minimal en dépit de la zone fortement sismique. Un pays développé, un pays.. merde... Capitaliste! Comme nous. Donc même si le Japon est géographiquement plus loin, j'ai l'impression que pour les gens que je connais en tout cas, Fukushima a été un plus gros traumatisme que Tchernobyl. justement parce qu'ils ont pris conscience que "Ca pourrait arriver chez nous". Bon pas le tsunami géant en Méditerranée, certes.
Etonnament, plus aucune publicité d'Aréva ne vient nous vanter les vertus de l'uranium à grand coups de disco.
Je pense que pour le coup, plus personne ne goberait le côté cool de la chose, on se rend bien compte qu'on se trouve avec sur les bras des tonnes de déchets hautement radioactifs que personne ne sait où stocker... et qu'on continue à produire quotidiennement. Dans des centrales qui ont été construites à la va-vite et sont un cauchemar à démanteler parce qu'il n'a pas été prévu qu'on les arrête un jour.
Donc, oui, je ne le cache pas, j'ai les foies, la pétoche, le trouillomètre à zéro, et si j'avais la possibilité de me foutre le camp le plus vite possible et le plus loin possible d'une centrale, je l'aurais déjà fait. Sauf qu'il ne doit pas y avoir un endroit de France à moins de 200 kilomètres d'une centrale nucléaire, et que donc, à part me casser à l'étranger avant que l'inévitable ne se produise, il n'y a pas trop de solution.
Parce que pour moi la question n'est pas " si un accident se produisait, que ferait-on", mais "quand un accident se produira, que fera-t-on". Je vous le donne en mille, avec plusieurs centrales pas loin: personne ne le sait. en tant que personnel municipal, j'ai eu récemment une feuille très basique sur la conduite à tenir en cas d'attaque terroriste, mais jamais aucune info sur celle à tenir en cas d'accident nucléaire.
En 2017, un nouveau sarcophage doit être placé sur la centrale de Tchernobyl pour remplacer l'ancien devenu une passoire. Il doit tenir 100 ans. " Le temps de trouver une solution définitive". Je sais qu'on va me traiter de pessimiste, mais sur ce genre de sujet, je ne peux vraiment pas voir la moindre chance de s'en sortir. Parce qu'il y a tout simplement trop de pognon en jeu pour trop de gens.
Si le sarcophage doit ternir 100 ans, je vous fiche mon billet que les 3 générations à venir vont refiler la patate irradiée à la suivante, jusqu'à ce que dans 99 ans, quelqu'un se dise qu'il faudrait peut être se magner le cul de chercher une solution. Enfin, si on se souvient qu'il s'est passé un truc par là, il y a 130 ans, mais quoi déjà?
Quand la végétation qui reprend déjà ses droits à Pripiat, la ville désertée du jour au lendemain aura tout recouvert, que restera-t-il dans la mémoire collective?
Si je me suis plantée, bah, venez cracher sur mon urne dans 100 ans..
Et soyez contents, je vous épargne les photos de mutations bien dégueu ( d'autant que pour faire dans le sensationnel, il doit y avoir pas mal de fake glissés là dedans), sachant que certaines sautent des générations, et que dans 3 ou 4 générations, des petites mutations sans grande conséquences qui se seront accumulées peuvent donner un résultat inattendu. Si on en juge par ce qu'on peut voir à Hiroshima, c'est bien parti pour plusieurs générations de cancers et de leucémies, c'est déjà le cas chez ceux qui avaient mon âge, et qui ont à leur tour des enfants.
Allez, pour finir le petit chiffre qui va bien: La demie-vie du Césium 137, l'un des isotopes relâchés par l'explosion est d'environ 30 ans. Ce n'est pas le plus dangereux, mais c'est celui qui a la demie vie la plus longue .Ce qui signifie que 30 ans plus tard, sa proportion dans les zones touchées ( donc chez nous aussi, hein!) n'a baissé que de moitié...
Donc faisons quand même dans l'humour noir, parce qu'il n'y a que ça qui peut nous sauver.
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