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vendredi 30 août 2013

Le jeu de Robin et Marion - Adam de la Halle

Après La farce de Maître Pathelin, une autre vision du théâtre médiéval..

Petit retour en arrière, au XI° siècle environ. A cette époque, il y avait deux grands types d'oeuvres théâtrales: les oeuvres religieuses et les oeuvres profanes.
Les oeuvres religieuses pouvant être classées jeux liturgiques ( Lié à un temps liturgique précis, et donc joué dans les églises: les rois mages, les nativités, etc.. on en a encore un exemple dans ma région, via les pastorales, toujours jouées en fin d'années, mettant en scène l'annonce aux bergers, la nativité, etc.. Sur un mode plus légers et comique qu'au moyen-âge, certes, mais l'idée est là, et la tradition se maintient), les miracles ( vie de saint Machinchose, joué à la fête de saint Machinchose, fête religieuse certes, mais d'importance moindre:  jeu de saint Nicolas de Jean Bodel,  Miracle de Théophile de Rutebeuf, etc.. là on est plutôt sur le parvis de l'église qu'à l'intérieur), et les mystères - on peut le trouvé orthographié mistère, mais comme je n'ai pas envie de me battre avec le correcteur orthographique qui est ignare et ne le sais pas, je vais continuer avec l'orthographe récente- ( alors là, on est dans le grand spectacle à la médiévale: plusieurs milliers de vers, des représentations sur plusieurs dimanche d'affilée,  un grand nombre de personnages autour d'un thême important: la Passion - mystère sacré- ou les vies édifiantes de saints- mystère religieux-  le martyre de sainte Apolline, etc..Et vu les moyens requis, là, on est plutôt sur un champ, une place..)
Le but étant de faire passer un message religieux à une population qui, en grande partie, ne sait pas lire. Pareil pour les tableaux de la même époque d'ailleurs: on représente des archétypes, avec leurs attributs immédiatement reconnaissables pour que tout le monde s'y retrouve.
le mystère de !saine Apolline par Jean Fouquet

Et à côté de tout ça, il y a le théâtre profane: pastourelles ( mettant en scène des bergers et leur quotidien champêtre), farces ( humoristiques, aux sujets variés.. j'en avais déjà parlé là ) ou pourquoi pas mystère profane ( mistère de Troie)

Et là, je repense à la prof de littérature médiévale qui nous expliquait que bien sûr, tout ça n'était pas franchement passionnant, même s'il devait être assez mal vu de ne pas venir les voir, mais que bon.. pour s'assurer que les gens restent jusqu'à la fin, il avait fallu faire des concessions et couper le miracle ou le mystère par une pièce humoristique, littéralement les "farcir". Je n'ai jamais sur si elle s'était payé notre tête avec cette étymologie mais il est tout à fait réel que la farce ou la pièce légère servait à détendre l'atmosphère entre deux sessions de pièces "sérieuses".. Ce n'est que plus tard qu'elles ont pris leur autonomie pour être jouées sur les places, pendant les fêtes et les marchés. Le public a choisi ce qu'il voulait voir.

Et donc le jeu de Robin et Marion fait partie des ces pièces légères, destinées uniquement à distraire le public, une pastourelle en l'occurrence. Une oeuvre dramatique qui alterne dialogues, et passages chantés, probablement accompagnés de musiques, jongleries, etc... signée Adam le Bossu ( ou Adam de la Halle), mais le sujet n'est pas neuf. En effet le sujet de base c'est: une bergère, nommé Marion par convenance, est abordée par un chevalier (appelons le Aubert par convenance aussi) qui tente de la séduire, sans succès, car la bergère est fidèle à son fiancé qui toujours par convenance s'appelle Robin ( ou Robert, Robechon, Robinet.. oui les noms sont modifiés pour les besoins des rimes: Marion, Marotte, Marottain ).

La marge de manoeuvre est donc limitée pour l'auteur, et donc on va le dire, même si la pièce est agréable à lire, le sujet tient sur une carte postale: le chevalier ne parvient pas à ses fins, il tente d'enlever Marion qui réussit à s'enfuir, pendant que les paysans.. s'embusquent pour voir ce qu'il se passe. Ce passage m'a beaucoup fait rire d'ailleurs. Puis tout le monde est content, tout le monde fait la fête, tout le monde pique-nique, quand, malheur le loup tente d'enlever une brebis ( symbolisme, symbolisme!). mais Robin sauve la brebis, on est content, on fait la fête, on joue à des jeux..

Quand au jeu du Pélerin, d'une autre main, qui accompagne Marion et Robin, il n'a pas spécialement d'intérêt, c'est un ajout postérieur destiner à rallonger une oeuvre un peu courte, en lui ajoutant une introduction et quelques péripéties
Après pour le lecteur du XXI° siècle, l'intérêt réside dans la représentation des jeux médiévaux ( le roi qui ne ment, le jeu de Saint Coisne.. le dernier pourrait se rapprocher de "je te tiens par la barbichette"), de ce que l'ont pouvait manger  sur l'herbe à cette époque, le vocabulaire etc.. en tout cas pour moi , qui adore l'étymologie, je recherche toujours les éditions Champion, en français d'époque, mais agrémenté de nombreuses notes sur la prononciation, les possibles jeux de scènes, qui éclairent les références tombées dans l'oubli.

En tout cas, c'est une bonne lecture, pas trop longue, pour qui veut se remettre gentiment au français médiéval sans trop s'arracher les cheveux. tiens , au passage, comme il s'agit d'un texte artésien du XIII° siècle, on y trouve des choses très proches de l'anglo-normand, dont je parlais là: Bienvenue, en artésien du XIII° siècle se dit " Wallecomme", celui là crève les yeux.

J'ai d'autres textes plus ambitieux à l'occasion: la geste de Raoul de Cambrai par exemple, ou des épopées, et là, c'est une autre longueur, on verra si j'ai le courage/le temps de m'y replonger). Mais rassurez vous, il n'y aura vraisemblablement pas ici de mystère, je n'ai pas le courage de lire 30 000 vers d'histoires religieuses édifiantes, j'avoue...
Pour les curieux qui voudraient le lire, le conseil général du Finistère l'à mis en ligne, et c'est ici
même s'il apparaît peu, Aubert est un chevalier
Je ne sais pas si le challenge est toujours d'actualité, mais pas grave, je continue, vaillamment.

mardi 27 août 2013

La ballade de Lila K - Blandine Le Callet

Il y a un certain temps, en discutant avec une collègue, alors que je lui parlais de science-fiction en général, et de Fahrenheit 451 en particulier, elle me dit qu'elle en a un à me prêter, sur un sujet similaire..
Et voilà comment Lila K est arrivée entre mes mains, alors que je n'ai pas vraiment l'habitude de lire des livres récents, vraiment récents, de l'an dernier, en fait.

Dès le début, nous voilà propulsés sans ménagement dans le quotidien de Lila, petite fille de 6 ans séparée du jour au lendemain de sa mère, et qui ne comprends pas pourquoi on la force à faire des choses insensées: parler, marcher, manger, tout en la gavant de médicaments, le tout dans un univers ultra sécurisé,où elle est surveillée constamment. C'est très violent, car vu par ses yeux. Pendant une bonne moitié du livre, on ne voit jamais Lila, on a seulement accès à son point de vue Sauf que le lecteur comprend assez vite de quoi il retourne exactement: Lila a été retirée à sa mère qui la maltraitait, et est simplement placée en centre de réadaptation: Elle ne sait plus marcher, ne veut rien manger, ne supporte ni la lumière ni le contact physique, est incapable d'avoir des relations normales avec les autres... mais les choses vont changer progressivement grâce au directeur du centre, le sympathique monsieur Kaufmann qui détecte chez elle des capacités intellectuelles inattendues au vu de son passé.

Ca aurait pu être très bien: la réinsertion d'un enfant parti du mauvais pied.. sauf que Blandine Le Callet a décidé de placer son récit dans un futur lointain, dans une société elle aussi ultra surveillée ( pas seulement le centre de réadaptation), où tout le monde est prié de filer droit sinon.. sinon? Et bien c'est là le problème: Dans la deuxième moitié du livre, Lila, qui a maintenant 18 ans, et aspire seulement à retrouver sa mère pour lui demander des comptes, sort du centre et découvre le monde. Un monde futuriste, où les livres sont non pas interdits, mais considérés comme dangereux. Pas dangereux car subversifs, mais dangereux car risqués.. en termes d'hygiène, rapport aux microbes que le papier peut transporter. Une société hygiéniste, où les cuvettes de toilettes sont paramétrées pour analyser l'urine tous les matins pour trouver des traces d'alcool ou de drogue. Une société qui considère qu'un godemiché est non seulement un cadeau adapté pour une gamine de 13 ans, mais encore conseillé, avec les préconisations d'usage ( 2 fois par semaine, ça n'est pas obligatoire, mais c'est l'usage si tu veux être considérée comme normale sinon.. sinon?).
Une société où on trouve des chimères - sans nous en dire plus- qui occupent des postes subalternes, et risquent l'euthanasie en cas de grabuge.
Sauf que tous ces "sinon" ne sont jamais cernés. Les gens sont surveillés, mais on ne sait au final ni pourquoi, ni ce qu'ils risquent s'ils se révoltent. On ne sait pas d'où viennent les chimères, si elles sont un accident ou créées exprès pour les postes subalternes. Ni les robots, on apprend fortuitement que détruire un robot est considéré comme un assassinat et peut mener en prison. On ne ressent pas vraiment de menace ou de climat angoissant à la 1984 vers lequel le roman lorgne pourtant : Lila trouve du travail dans une bibliothèque où elle scanne des articles pour les censurer. Tiens donc..

C'est un problème car, à quoi bon placer son récit au XXII° siècle  à Paris ( oui, car on apprend par hasard que Lila fait du footing porte Dauphine.. sur l'ancien périph' transformé en coulée verte.. au bout de plus de 200 pages...), un Paris élargi autour duquel s'étend " la Zone", violente, dangereuse, pauvre, sale, etc... (jusqu'où.. les environs immédiats? le bassin parisien? le pays entier?), donner un cadre Sci-fi à son récit, si c'est pour ne pas l'utiliser.. absolument pas un moment. De même Lila est une surdouée, ce qui sert juste à nous expliquer qu'elle (ré)apprend vite, mais ne revient jamais sur le tapis. D'ailleurs Lila est le seul personnage développé.. Les autres: M. Kaufmann son tuteur, puis Fernand, à la suite de Mr Kaufmann, Lucienne la femme de Fernand - qui disparaît de l'histoire aussi vite qu'elle y est apparue, Justinien le magasinier de la bibliothèque,  M Templeton le directeur de la bibliothèque.. tous ceux là ne sont qu'ébauchés, du coup, impossible de s'intéresser à leur histoire.
Dommage, surtout pour Lucienne, dont on sent qu'un peu mieux développée, elle aurait pu être une sorte de grande soeur virtuelle pour Lila.
donc: personnages survolés, cadre science-fiction qui ne sert à rien ( j'aurais vraiment plus apprécié cette histoire, bien écrite par ailleurs, si elle s'était contentée d'un cadre actuel et de suivre la quête familiale de Lila et sa reconstruction)

Mais voilà, il y a l'OHASI (© moi : l'Obligatoire Histoire d'Amour Sans Intérêt), entre Lila et son patron, peu crédible (rappelons qu'elle évite tout contact physique avec tout le monde encore 10 pages plus tôt), qui nous vaut des pépites harlequinesques du style:
"vous avez étendu les mains pour recouvrir les miennes Je vous ai laissé faire avec l'impression troublante que la chaleur de vos paumes aurait le pouvoir d'effacer mes cicatrices"
Insérer ici yeux au plafond, gros soupir et mouahahaha.. dommage jusqu'à présent, c'était agréable à lire.

Impossible à prendre au sérieux: non seulement l'heureux élu s'appelle Milo (et pour cette raison, j'imagine un type en armure avec un casque improbable.. A cause de Kurumada ce nom est lié à vie pour moi au chevalier du scorpion), mais vu qu'on ne sait rien de lui, sinon que hooooo horreur, à 35 ans il a des rides, ce qui dénote un laisser-allez certain ( véridique), tous ces passages sont assez pénibles, car ils piétinent dans la semoule.
Dommage car j'aime bien Lila, son caractère, sa détermination.. mais là aussi une chose me gêne.. L'auteur ne la décrit jamais en 200 et quelques pages.. et là paf! entre la poire et le fromage on apprend
1- qu'elle est très blanche
2- que c'est une beauté.. mais alors, une beauté du genre à faire sursauter les gens. Oui je sais, j'ai fait la même tête que vous: o_Ô
Déjà, on vient de passer la moitié du livre à nous dire qu'elle a vécu des choses très dures, qu'elle a des cicatrices sur les mains ( qui la complexent), qu'elle est maigre au point d'être surnommée "gringalette", qu'elle ne mange pas ou presque.. toutes choses qui ne vont pas vraiment dans ma tête avec "tu est une beauté".
Non, décidément, cette info arrive trop tard, alors que je m'était fait déjà mon idée de l'héroïne: une femme au physique marqué, cernée ( bon sang, elle carbure aux anxiolytiques depuis l'âge de 6 ans!), déterminée.. et allez savoir pourquoi, noire ( ou au moins métisse). Tant qu'à faire, à garder le mystère sur l'héroïne autant le garder jusqu'au bout. Et en faire soudain une beauté qui fait sursauter ( et pourquoi d'abord sursauter? on sursaute de surprise, de peur.. pas parce que quelqu'un est beau!), tout le monde, hommes comme femmes.. nan, pas crédible.
parce qu'il essaye d'être SF/anticipation/dystopie.. sans y réussir vraiment.

Donc au final un livre.. pas raté, mais inabouti: le contexte est peu ou mal utilisé, les personnages hormis l'héroïne sont peu développés. Sans le cadre SF qui ne sert à rien,  finalement il aurait pu être très bien, en se concentrant sur la résurrection d'un enfant martyr, en creusant plus la dimension sociale, mais là, tel quel, il y a plein de pistes peu ou mal utilisées et c'est vraiment dommage, parce que c'est plutôt bien écrit et que ça se lit bien. Du coup, je me demande qui est le public visé: les fans de SF n'y trouvernt pas leur compte, les fans de romans sociaux non plus, les fans de romans sentimentaux.. pas plus.

samedi 24 août 2013

Le congrès - Ari Folman

Voilà, j'ai enfin eu l'occasion d'aller voir le Congrès, qui me tentait depuis que j'avais vu la bande annonce. Sci-fi, plus mélange film et animation, voilà qui promettait..


Et au final, je suis sortie perplexe de la salle. La copine qui m'accompagnait aussi d'ailleurs.
Je ne sais même pas dire si je l'ai aimé ou pas.

Le sujet de départ est pourtant bien intriguant: une actrice nommée Robin Wright, qui a commencé sa carrière sur les chapeau de roues avant de d'enchaîner les navets, se voit proposer un contrat un peu spécial: être scannée des pieds à la tête, toutes ses expressions digitalisées et conservées par le studio auquel elle est affiliée. En acceptant le contrat, elle renonce également à toute apparition publique: plus de films, plus d'interview, plus de publicité. son image sera entièrement la propriété du studio, qui pourra en faire ce qu'il veut: films d'auteur ou navets, publicités ou même dessins animés pourquoi pas.. Elle perdra tout contrôle sur son image contre un énorme paquet de fric qui la mettra à l'abri pour le restant de sa vie, elle, sa fille,  et son fils malade. Et si je vous dis que Robin Wright, le personnage, est joué par Robin Wright, l'actrice, qui a justement eu une carrière en dents de scie, là, ça devient vraiment alléchant. Alléchant comme l'était  le synopsis de Being John Malkovich, film que j'avais beaucoup aimé soit dit en passant.

Et de fait la première demi-heure est vraiment brillante, la pauvre Robin se prend dans les dents des remarques très très vachardes sur son âge ( 47 ans à Hollywood, l'âge de la retraite ou presque quand même les personnages de vieille dames doivent être lisses et botoxés), il y a une piste fichtrement intéressante qui s'amorce sur : qu'est-ce qu'être actrice? quelle est la liberté de choix d'un acteur? quelle est sa marge de manoeuvre? Qu'est-ce que c'est qu'être acteur ou actrice? quel est le statut des femmes au cinéma?
Parce qu'à côté d'elle, dans le rôle de son manager il y a Harvey Keitel. vieillissant, ridé, mais toujours charismatique.. viendrait-il à quiconque l'idée même de lui reprocher ne n'être plus esthétiquement correct?
Leur duo fonctionne terriblement bien, la scène où Robin n'arrive pas à jouer correctement pendant qu'on la scanne et où Keitel lui raconte une histoire pour la faire rire, puis insensiblement la déprimer pour passer d'une expression à l'autre est un superbe moment de réflexion sur l'envers du décor, le jeu,  l'actors studio, tout ça..

Et là, paf, changement de ton brusque.

20 ans plus tard, l'actrice retraitée est invitée par son studio à faire sa réapparition.. sous forme de dessin animé: le studio a bien géré sa carrière, elle est redevenue une star, sans même savoir dans quels navets sont double numérique à joué. Mais l'industrie du cinéma à changé: tout un chacun peut maintenant s'immerger dans un monde onirique, via des capsules de drogue à respirer, qui vous font voir le monde tel que vous le voulez, et vous font voir aux autres tels que vous voulez qu'ils vous voient. En l'occurrence, dans la zone "dessin animé", tout le monde verra tout le monde sous forme de personnage de cartoon.

Et c'est là que j'ai envie de dire: il y a un problème. Le passage du monde réel au monde animé est brusque, très brusque, sans explication ( le coup de la capsule de drogue se comprend peu à peu, mais pendant pas mal de temps le spectateur est laissé à lui même). et par la même occasion, les pistes lancées dans la partie "prise de vue réelle" sont complètement éludées, pour laisse place à quelque chose qui est intéressant en soi: comment passer d'un univers à l'autre, comment retrouver un proche qui s'y est engouffré sous une apparence peut être méconnaissable? ( Robin qui a laissé ses enfants du côté du monde réel, se retrouve suite à une révolte, coincée dans le monde animé pendant une vingtaine d'année, et donc, n'a de cesse que de vouloir retrouver sa famille). On passe brutalement d'une réflexion sur le monde du cinéma à une quête personnelle sur le thème de la disparition, qu'on n'avait pas vraiment vu venir.

Et c'est dommage: parce qu'on se retrouve avec ce qui aurait pu être un bon film d'un côté, ce qui aurait pu être un bon dessin animé de l'autre (mention particulière aux décors de la New York onirique, avec plein de références à l'univers de Jérôme Bosch, notamment au Jardin des délices.. et là, c'est presque dommage de ne pas plus s'y attarder pour profiter de tous les clins d'oeil. Ou au fait que l'avenir soit représenté par un style proche des cartoons des années 30, ).. et une transition pas très bien amenée entre les deux, narrativement parlant. Après, la narration du monde onirique est complètement farfelue, ce qui s'explique si on prend en compte le côté "trip sous LSD", mais pose un problème de cohérence avec la première partie. Le film aurait probablement gagné à ne pas changer totalement de sujet ( au point que je me suis même demandé s'il s'agissait du même metteur en scène du début à la fin), et à broder sur les pistes qu'il lançait au début, ou à amorcer au départ ce qu'il développe par la suite. Par exemple en s'épargnant la mini histoire d'amour sans intérêt qu'on voit venir avec ses gros sabots à la seconde même où on aperçoit "le type qui fait la gueule au milieu du public enthousiaste". Ou alors lui trouver une conclusion intéressante ( a partir du moment où le gars dit " ne cherche pas à me voir tel que je suis dans la vie réelle", évidemment, on attend un développement.. qui ne vient pas, grrrrr. Tu lances une piste et tu ne la suis pas, mais grrrr, scénariste sadique!) Mais telle quelle, non, elle ne sert pas vraiment à grand chose. Juste à avoir une scène de d'amour animée ultra guimauve sur fond de " forever young", qui donne plutôt envie de rire qu'autre chose - franchement cette séquence casse tout ce qu'on pouvait avoir d'empathie pour les héros tellement elle est cliché.
parce que c'était un film de science fiction, à la base, même s'il perd un peu son objectif de vue

Du coup, oui et non. Oui parce qu'il y a de très bonne idées , et ce dans les deux parties. Et non, parce que le montage ne m'a franchement pas convaincue. Je n'ai pas vu Valse avec Bachir du même réalisateur, donc, je ne jugerais pas sur un demi échec ( qui est aussi un demi succès, car si Robin Wright se lance dans des rôles de ce type, assez culottés, elle y est vraiment bien, bien plus intéressante que lorsqu'elle jouait les jeunes premières en fait). Pareil pour le livre de Stanislas Lem que je n'ai pas lu, je lui donnerai aussi sa chance à l'occasion. En fait, je sens qu'il va devenir comme ces films qu'on a trouvé imparfaits, voire parfois carrément ratés, mais qu'on apprécie quand même avec indulgence parce qu'il y a par moments de très bonnes choses.

mercredi 7 août 2013

La vierge froide et autres racontars - Jørn Riel

Il fait chaud. Il fait très chaud chez moi ces jours -ci. Et dans une recherche de fraîcheur, je suis tombée sur ce titre très curieux chez un bouquiniste. Un titre intriguant, une série de nouvelles qui se passent au Groenland, il n'en fallait pas plus pour me tenter!
et ce fut une bonne pioche, ces histoires de chasseurs du grand nord sont assez irrésistibles, volontiers absurdes ou teintées d'humour noir. Et l'auteur sait de quoi il parle, puisqu'il a vécu 16 ans au Groenland dans les années 50/60 et que toutes ses histoires sont inspirées de son expérience.

Car de quoi s'agit-il? De quelques instantanés du quotidien d'une poignée de chasseurs danois, en mission sur la banquise, certains y sont tout au long de l'année, d'autres apparaissent le temps d'une saison et repartent ensuite, laissant parfois d'étranges souvenirs ( tel le tatoueur qui ne chasse jamais, décore tout le monde en échange de cuirs et de peaux, et repart en ayant fait sa saison sans même lever le petit doigt).
 Car on est là dans un univers où les données communes n'ont plus court, le temps comme l'espace sont comme élastique. Un endroit où il ne faut pas moins de 5 jours de traineau à chiens pour rendre visite à un copain qui habite à 150 kilomètres.On comprend que, dans ce cas, les visites ne se fassent qu'une fois l'an, et durent plusieurs semaines. Et que lorsque quelqu'un meurt en plein hiver, la solution est de le laisser congeler et de l'amener en traîneau ( pour éviter qu'il ne soit mangé par un ours par exemple) de poste en poste, afin de convier tout le monde aux funérailles.
Dans ce monde, la solitude est le lot de tous, pour la rendre plus supportable les chasseurs cohabitent par deux dans un poste, situation qui peut être un grand soulagement pour les tâches, mais peut facilement devenir un enfer en cas d'incompatibilité d'humeur. Car le moindre désaccord peut vite prendre des proportions insoupçonnables, et le moindre événement qui vient rompre la monotonie du quotidien est une bénédiction, ce qui donne des images parfois complètement loufoque, à l'image du chasseur Herbert qui adopte un jour un coq et se met à le promener en laisse sur la rive, ou du vieux-Niels, qui préfère emménager dans une porcherie, avec le cochon qui doit être mangé à Noël, et lui lit à haute voix l'un de ses seuls livres; "  Instructions, connaissances et navigation dans le Sud Groenland". Le reste du temps, on chasse, on se raconte des histoires, on philosophe.. et on noie tout ce qui peut se noyer dans l'alcool
Car la solitude, la quasi -absence de femmes dans la région, et l'abus de gnôle maison pèsent vite, ce qui donne un ton à la fois drôlatique, mais très mélancolique à toutes ces nouvelles.
J'aime énormément les sous-titres décalés d'ailleurs. Par exemple : Tournée de visites ...où Herbert en viendrait presque à préférer Lodvig quand il fait la gueule.

Des 10 nouvelles, j'ai particulièrement aimé Alexandre ( celle où Herbert adopte Alexandre le coq, à la suite d'une beuverie mémorable, pour son côté surréaliste), Tournée de visites ( comment se débarrasser d'un copain qui vous raconte sa vie.. jour et nuit. Pendant des jours. en essayant de refiler la patate chaude à un autre bavard ); Le Tatoueur ( pour les suggestions complètement loufoques de tatouages, par exemple, une patate pour celui qui cultive son carré de potager), la vierge froide ( où le dénommé Mads Madsen s'invente une relation avec une certaine Emma pour frimer, sans prévoir que ses amis vont se mettre à fantasmer sur cette invention, au point de vouloir lui acheter le droit d'en rêver. C'est drôle, c'est un peu dingue, j'adore!), De joyeuses funérailles ( pour l'humour noir qu'il y a à trimballer un cadavre gelé à travers tout l'est du pays pour finir par l'inviter à ses propres funérailles, car après tout, c'est en son honneur, non?) et une condition absolue ( où l'arrivée de la civilisation, sous la forme de toilettes, de vraies toilettes, sème la zizanie dans la petite communauté)

La toute dernière : Le roi Oscar, se termine quand même de manière assez dramatique, et, j'espère en voir la conclusion dans un prochain tome. Car oui, il y a d'autres tomes, tous titrés XXX et autres racontars, et c'est avec plaisir que je retrouverais Herbert  et Bjorken les philosophes, Anton et Lasselille les "bleus", Mads Madsen et William le noir, Lodvig qui fait la gueule et leur comparses..
Une très bonne découverte!
8/24

mardi 6 août 2013

Le clan des Ostendais - Georges Simenon

Première lecture belge, qui attendait depuis longtemps que je m'y penche. Trouvé d'occasion, avec une couverture neutre et sans résumé, parmi les déclassés vendus d'occasion par la médiathèque de ma ville, je n'avais aucune information dessus, et il a rejoint tranquillement mes étagères en attendant son tour.

Et oh, surprise, je m'attendais à un policier de la série Maigret, et pas du tout. Puisqu'il est question d'un groupe de pêcheurs belges qui fuient l'invasion allemande.
Non folio, non! ce n'est pas un roman policier!

Mai 1940, une flottille de 5 chalutiers belges sont arraisonnés par les autorités françaises à hauteur de La Rochelle. Ils fuient vers le sud, car ils pressentent qu'après l'invasion de la Belgique, les troupes allemandes ne vont pas tarder à poursuivre leur route vers la France. Mais impossible d'aller plus loin: l'administration française refuse l'autorisation de naviguer dans les eaux territoriale, car les bateaux doivent être réquisitionnés, même s'il ne sont pas français. commence alors un bras de fer entre Omer, le colossal capitaine de la flottille, bien décidé à défendre ses droits et à garder ses navires, et l'administration. Mais comment arriver à ses fins quand on ne parle que le flamand.
On a droit alors à quelques scènes assez surréalistes dues à cette impossibilité de se comprendre: les français qui s'organisent pour accueillir les "réfugiés", persuadés de trouver une troupe de miséreux mourant de faim,   les forcent à débarquer pour les héberger dans un village, et tombent stupéfait sur plus de 80 personnes parfaitement organisées avec l'équivalent de 3 camions de meubles à décharger, et pas du tout motivés pour recevoir la charité qu'ils n'ont pas demandé . Cette partie est plutôt drôle, dans un genre un peu Kafka.
Par la suite on assiste à l'hébergement foré des belges dans le petit village de Charron à 19 kilomètres de la mer, à la cohabitation avec les français qui a du mal à prendre, certains n'hésitant pas à prendre un raccourci: le flamand ressemble à de l'allemand, les flamands arrivent à peu près à se comprendre avec les envahisseurs allemand ( qui , comme l'avaient deviné les Ostendais, n'ont pas tardé à descendre jusqu'à la Rochelle), donc les flamand sont des espions à la solde des allemands. Tandis qu'Omer décroche de haute lutte un papier l'autorisant à aller pêcher dans les eaux françaises, car l'approvisionnement de la région en poisson devenu très dangereux à cause des mines devient une nécessité qui passe avant la réquisition, et que s'ils veulent risquer leur vie pour pêcher, c'est à leurs risques et périls.
Cette seconde partie, qui montre l'organisation des flamands et leurs difficultés au milieu des français , des allemands, des dangers est beaucoup , beaucoup plus dramatique.

auteur belge francophone, personnages belges flamands
Ceci dit, l'intrigue est bien menée, j'ai vraiment accroché, car à chaque instant, on se demande comment les choses vont évoluer, la moindre chose pouvant tout faire tourner à la catastrophe lorsque les populations sont à cran.
Donc ce n'étais pas ce que je pensais, mais une bonne surprise malgré tout, que je conseille vivement, pour voir une autre facette de Simenon.
idée 84: quelque chose à proximité de l'eau: des bateaux sur l'eau

samedi 3 août 2013

Bilbo le hobbit - JRR Tolkien

bon, il était temps, mais j'ai enfin pu lire un peu de Tolkien. Et comme je n'avais pas le temps de m'attaquer au Seigneur des anneaux ( et surtout en furetant de-ci de -là, j'ai cru comprendre que la traduction française laissait  désirer), C'est donc Bilbo qui est ma porte d'entrée vers son univers .
 Par choix, je n'ai pas vu le film de Peter Jackson, car je voulais d'abord lire le livre.. et je me demande bien au passage comment il va arriver à faire 3 films  avec un livre de 300 pages! Je crains un peu beaucoup le délayage j'avoue. J'avais pas mal apprécié  la trilogie du  "Seigneur des anneaux" à sa sortie, peut être qu'en la revoyant sur petit écran ou pire encore, en VF, ça ne passerait pas, mais voilà. Trois gros livres, je suppose qu'il y a matière à trois longs films, et encore en élaguant, mais pour Bilbo, j'ai peur rétrospectivement.

La jolie édition du livre de poche, il y en avait une autre standard, mais l'énorme " maintenant au cinéma" en plein sur la couverture, non, merci! en plus dans celle là, il y un petit dragon qui souffle de la fumée quand on tourne les pages rapidement (ça a un nom,mais impossible de m'en souvenir, donc au pif, je dirais " dessin animé")

Or donc le livre. J'ai été agréablement surprise, car c'est un conte, avec tous les ingrédients du conte: un antihéros au départ insignifiant qui se retrouve malgré lui embarqué dans une aventure grandiose, dont il pense ne pas pouvoir se sortir, et qui va devoir faire appel à toutes ses ressources pour se dépasser. Les valeurs de l'amitié, seule porte de sortie quand tout va mal, etc.. etc..
tout celà n'est pas super novateur, mais force est de constater que ça a marché sur moi. D'abord parce que il n'y a PAS de romance ( plus exactement , pas de personnage féminin du tout dans les aventures de Bilbo et les 13 nains, et bien que je sois une femme, ça ne me manque pas, parce qu'en général le traitement des personnages féminins dans la fantasy me donne plutôt des envies de meurtre). Donc on évite l'écueil de la romance factice et obligatoire, et ça c'est bien!
Ensuite parce que tout le roman est parcouru par un humour discret mais volontiers absurde ou un peu noirs: Les nains qui s'incrustent chez Bilbo pour piller ses réserves, les nains prisonniers de cocons d'araignées qui pendent des arbres comme des fruits bien mûrs, Bilbo qui se relève d'une bataille assez ardue en se disant  "tiens je suis vivant, ce n'est pas encore cette fois que je mourrais en héros" (ou quelque chose d'approchant, je n'ai pas le livre sous la main , je viens de le prêter dans la foulée). ou , un détail qui ma faite rire, je suppose que ça n'est pas totalement innocent de la part de l'auteur: tout le monde a un nom de fantaisie, bien étrange, sauf les trolls qui s'appellent de manière toute britannique William, Bert et Tom.
Donc c'est drôle.
oui, à partir de là, je parle de passages précis, donc...

Et puis en cours de lecture, je me suis dit que quelque chose me turlupinait dans la manière de présenter la progression des héros, quelque chose dans la manière très  vivante et réaliste de raconter la structure des combats. Pas possible, l'auteur transpose quelque chose qu'il a vu ou entendu!

 Après ça reste ma théorie , elle vaut ce qu'elle vaut mais: considérant que le livre date de 1937, et qu'il s'est passé quelque chose d'important une vingtaine d'année auparavant, j'ai fortement l'impression que ce que nous raconte Tolkien en filigrane de son histoire de chasse au dragon, peut-être volontairement, peut-être inconsciemment pour évacuer son stress, c'est la Première Guerre Mondiale.

Tolkien pendant la I° guerre mondiale
Déjà la réquisition de Bilbo, j'ai du mal à ne pas le voir comme un conscrit un peu naïf de la campagne envoyé la fleur au fusil dans une situation qui le dépasse.
Puis à partir des monts brumeux, c'est fou le nombre de scènes qui se passent en souterrain. Les Monts brumeux sont sillonnées de vallées profondes et étroites où sont tapies des choses tellement horribles et dangereuses qu'elles sont innommables ( Je n'ai pas la version originale, mais ça m'étonnerait prresque qu'il n'y ai pas le mot "trench")
 Lorsque le groupe en émerge, c'est pour tomber sur la rencontre de deux orages au sommet de la montagne qui s'affrontent, je n'invente rien, c'est dit clairement, comme deux armées sur un champ de bataille. Nuages sous lesquels des géants jouent à s'envoyer des rochers.
oui, j'y peux rien, je vois.. ça.

Accélérons un peu, pour se retrouver en forêt: les héros sont encerclés sur un arbre en feu par des loups affamés et une armée de gobelins en rogne ( et bon dious, ce qu'il y a de références au feu dans cette histoire, entre Gandalf qui lance des sorts explosifs, les gobelins pyromanes et plus tard le dragon...). La situation est désespérées jusqu'à l'arrivée des aigles. Attaque aérienne, sauvetage, bref c'est l'intervention d'une grande nouvelle invention du début du XX° siècle qui donne un tour décisif à la bataille. On apprend même incidemment que, plus tard, les aigle recevront des décorations pour leur acte de bravoure. Oui, oui...Et par deux fois, on a la séquence: bataille au sol + renforts aériens

Un peu trop pour une coïncidence , et dans ma tête, ça devient:
Triplan britannique de la 1° GM

Dinstinguished Flying cross, également 1° GM

Après ça reste mon interprétation, hein, le ton du roman est léger et  humoristique,mais le fond est quand même assez mélancolique ( on ne sort jamais tout à fait indemne de ce genre d'aventure, ce qui me conforte dans mon interprétation "catharsis des souffrances et privations de la guerre" ) oui, car j'oubliais: plus d'une fois les héros sont près de crever de faim. de crever de faim dans un lieu étroit, sordide, étouffant et gluant. Mmmmoui, hein, je peux me tromper, mais... Et au final je trouve ça même beaucoup plus intéressant qu'une simple histoire pour se divertir. Parce que, d'une, je trouve la période de la Première guerre mondiale tout à fait passionnante, et de deux, je trouve passionnant aussi que, justement, l'histoire ait plusieurs niveaux de lecture. en tout cas j'y ai trouvé mon compte et même plus encore. Il faudra juste que je feuillette quand même la VO, pour voir les passages de chansons qui tombent un peu à plat en VF, nul doute qu'il doivent avoir une rythmique toute différente en anglais.
Auteur anglais
Parce que Tolkien quand même
monde imaginaire avant 1950: la terre du milieu
Je n'en ai pas parlé parce que j'ai préféré évoquer ce qui m'a le plus marquée, à chaud, lors de la lecture, mais bien sur on est dans de la réécriture mythologique: mythes nordiques et celtes, avec l'anneau magique des Nibelungen ( même  si l'anneau dérobé à Gollum n'est pas encore mentionné comme maudit dans Bilbo), Le dragon qui campe sur un tas d'or comme Fafnir dans les légendes, le personnage qui tue le dragon de la même façon que Siegfried,  etc..
idée 125: du jaune. Or en l'occurrence
oui je sais, mais il y a quand même un roi des elfes et un roi des nains par moments

jeudi 1 août 2013

bière, gaufres et carabistouilles

Le 16 août, je pars en vacances.

 Une semaine à peu près chez les voisins,



 à goûter aux spécialités locales,

 à admirer des tableaux de maîtres flamands.






et comme j'aime bien associer vacances et lectures, pendant tout le mois d'août, il y aura quelques billets belges par ici, j'ai peu d'auteurs belges dans ma liste , mais ça sera l'occasion ou jamais de les faire passer en haut de la pile. Enfin quand je dis peu d'auteurs belges, c'est hors BD, parce que rien qu'avec Franquin et Cauvin, j'aurais déjà de quoi faire! Ce qui ne veux pas dire que je ferais l'impasse sur la BD, bien au contraire!
une chouette image trouvée sur le forum Babelio, un soupçon de Magritte, elle ira parfaitement pour l'occasion