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Tout simplement parce qu'on y trouve un peu de tout, par ordre de pagaille. Cette idée de collection sans thème déterminé me plaît...

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jeudi 31 octobre 2013

Sho, calligraphes de Kyoto - BRengade & S. Tanaka

Hooo un sujet non halloween!

Pour parler d'un livre reçu dans le cadre de l'opération masse critique, justement au retour du Japon, je suis très contente d'avoir pu prolonger un peu mon voyage par ce biais.

Ce livre est , plus qu'une monographie sur un maître calligraphe, une introduction à l'art du Sho ( la calligraphie donc), en différentes étapes du début à la fin. Par début, il faut comprendre, ce qui précède l'art de la calligraphie au japon, avec quelques informations bienvenues sur la langue et la philosophie, les différents styles de calligraphie ( Tensho: sigillaire, le style le plus ancien; Reisho, le style de chancellerie; Kaisho;: le style standard; Gyosho, le style semi cursif; Sosho, le style cursif..) exemples ici,

Ensuite, la présentation des "quatre trésors du calligraphe": papier, encre, pierre à encre et pinceau. Ensuite l'acte de fabrication de la calligraphie, pour finir par quelques explications sur l'achèvement ( sceau et signature) de l'oeuvre et son montage en vue de la présentation.

Toutes choses fortement imprégnées de philosophie et de mysticisme zen ( la calligraphie à été inventée au départ dans un cadre religieux, comme un exercice de méditation - comme d'ailleurs l'ikebana et la cérémonie du thé - et de transmission des enseignements bouddhistes,).

Le tout expliqué par un français qui s'est initié à l'art de la calligraphie à Kyoto auprès de Maître Tanaka Shinzai. le tout agrémenté d'une trentaine de reproductions, chacune expliquée en fonction du caractère représenté, du style employé, avec parfois une petite reproduction du caractère d'imprimerie, afin que l'on voie bien à quel point il peut parfois être méconnaissable.
Instructif et tout à fait à la portée d'un occidental novice, une bonne porte d'entrée vers cet art qui peut paraître hermétique lorsqu'on en ignore tout ( bon j'ai malgré tout une préférence personnelle pour le style sigillaire, qui me parle plus que le style cursif, je ne sais pas pourquoi, le côté " antique", presque hiéroglyphique en fait). En tout cas, lors de mon prochain voyage, j'aurais encore plus de plaisir à collecter les calligraphies, de temple en temple ( oui, un jour il faudra que je mette quelques exemples en ligne)

Merci à Babelio et aux éditions Centon pour cette intéressante découverte.

mercredi 30 octobre 2013

Monsieur Mardi Gras - Descendres - Eric Liberge

Repost! a l'occasion du mercredi BD du challenge halloween, j'ai eu envie de ressortir de mes étagères cette Bd, déjà chroniquée en février 2011. Mais à l'époque je ne devais pas avoir plus de 2 lecteurs et demi sur ce blog, et comme mon avis n'a pas changé à la relecture, une réanimation de ce sujet m'a paru une bonne solution, car oui, cette BD atypique mérite de toucher un public plus large!


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sujet original de février 2011

Le grand retour du défi Bd, avec les 4 volumes de la mini série "Monsieur Mardi Gras - Descendres" d'Eric Liberge, à coup sur une des BD les plus originales qu'il m'ait été donné de lire.



18/30
Elle sera plutôt à conseiller cependant aux amateurs d'humour noir et de non-sens, car le sujet principal en est la très philosophique question"qu'y a-t-il après la mort?". A laquelle le scénariste et dessinateur Eric Liberge apporte une réponse à la fois désespérante et cruellement drôle: pour lui l'autre monde, situé entre Pluton et son satellite Charon (logique, rappelons aux distraits de Pluton est le dieu romain du monde des morts, et Charon le passeur entre les mondes des vivants et des morts, conduisant son bateau sur fleuve Lethé, le fleuve de l'oubli, dont il est aussi question dans la BD).

 Tout commence donc avec un squelette, en plein désarroi sur une pleine désolée: Victor Tourterelle, cartographe de son vivant, vient de mourir d'une manière bien ridicule, et semble avoir du mal à se faire à cette idée, et on le comprend: l'autre monde qui s'offre à lui apparaît comme un endroit désert, glacial ou il est totalement isolé. L'idée de passer son éternité sur un caillou pelé le démoralise, d'autant plus qu'il garde une conscience plus claire que jamais. Et les choses ne vont pas s'arranger: un étrange facteur squelette chargé de le guider un moment va lui faire découvrir une réalité (?) encore plus angoissante: l'autre monde est en fait un univers carcéral, ou les défunts s'entassent dans des "villes" cloaques, gangrenées par la bureaucratie et la corruption, où les petits trafics sont quotidiens (les os étant le seul bien que l'on possède il n'est pas rare de se les faire voler!), où l'on se saoule de produits toxiques venus des égoûts de la terre. Un enfer, que Tourterelle, rebaptisé Mardi-Gras -Descendres selon la législation locale en fonction des fêtes qui précèdent et suivent sa mort, va involontairement révolutionner. En commettant l'erreur absolue: demander un café à la taverne.  Dans ces lieux en effet, le café est une boisson taboue assimilée à une drogue, on saura au cours des volumes suivant pourquoi.

Suite à ses récriminations, Mardi gras Descendres est condamné au centre de redressement pour esprit retors par les dirigeants du monde des morts, qui craignent une insurrection généralisée. Evadé pendant son transfert avec l'aide d'un groupuscule rebelle nommé "la corniche" , il se voit proposer un marché: la restitution de son âme qui lui a été subtilisée dans le premier volume, contre un projet titanesque, à savoir reprendre ses activités de cartographe et dresser une carte détaillée de ce qu'il sait maintenant être le purgatoire. Voila pour les deux premiers volumes qui plantent le décor.


 Le 3 ° et le quatrième quand à eux seront l'occasion d'une visite dans les profondeur de la planète Pluton où descendre va découvrir les cercles du purgatoire, peuplé de ses démons personnels. puis suite à plusieurs péripéties que je renonce à résumer, car la tâche est trop ardue, les rebelles de l'autre monde vont enfin trouver le secret, jalousement gardé de la résurrection, et mettre un peu d'ordre dans le chaos qui règne au purgatoire en renvoyant sur terre ceux qui peuvent prétendre à une réincarnation. Ouf!




Vous l'aurez compris le scénario est quand même très tortueux et nécessite plusieurs lectures pour s'y retrouver, surtout si comme moi, on a mis beaucoup de temps à se procurer le 4° volume. D'autre part, au sujet de ce 4° volume, il y a un décrochage assez sensible entre les 2 derniers tomes, les délais de parution ont été assez longs et ça se sent, on perd un peu le fil déjà complexe de l'histoire, disons que la conclusion part un peu dans une autre direction que celle qui était suggérée au tome 3.C'est dommage. Et c'est ce qui m'empêche de donner la meilleure appréciation.

par contre au niveau graphisme, c'est époustouflant: on est vraiment dans un monde à la Jérôme Bosch, peuplé de squelettes rafistolés ( suite aux vols d'os mentionnés plus haut, le héros se trouve par exemple coiffé d'un moulin à café, d'autres munis de robinets, de crochets, de pièces de chauffe-eau...), ce qui permet au dessinateur -et au lecteur -de les différencier facilement. Ben oui, sinon, qu'est-ce qui ressemble plus à un squelette qu'un autre squelette! A noter que les 3 premiers tomes ont d'abord paru en version noir et blanc, avant d'être réédités en version colorisée ( dans des tons crème, gris, bistrés, donc rien de violent, ça reste discret), lors de la sortie du tome 4 , disponible uniquement en version colorisée. Les puristes semblent préférer la version N & B, je n'en dirais rien, pour ma part, je n'ai eu en main que celle en couleurs.

Mais, je le répète attention: scénario compliqué qui demande une attention soutenue, et une bonne tolérance au non sens, vous êtes prévenus!

lundi 28 octobre 2013

contes fantastiques tome 1 - ETA Hoffmann

et pour continuer sur les nouvelles fantastiques allemandes ( et finir le challenge littérature allemande par la même occasion), voilà le tome 1 des "contes fantastiques " ( attention l'édition ebook québécoise que j'ai sur ma tablette n'est pas tout à fait la même que celle papier française du même titre, et ne correspond pas non plus tout à fait aux éditions allemandes)
Autoportrait d'ETA Hoffmann

On y trouve donc: le violon de crémone (initialement pièce isolée), le Majorat (extrait des contes nocturnes tome 2), la vie d'artiste (extrait du "point d'orgue"), le bonheur au jeu (les frères de saint Sérapion tome 3)  , le sanctus (contes nocturnes tomes 1), plus un autre texte " la nuit de sabbat", que je ne mentionnerai pas ici, car il n'est pas d'Hoffmann, il s'agit d'une attribution erronée, d'un auteur dont l'identité est contesté ( j'ai vu que certains avançaient Polidori ou d'un nommé Zschokke inconnu de moi. Donc dans le doute, je ne le critiquerait pas ici, mais probablement à part). C'est un peu dommage d'avoir d'une part ajouté un texte qui n'a rien à voir, et d'autre part d'avoir mélangé des textes issus de recueils d'époques différentes.

Le violon de Crémone: on y découvre l'extravagant conseiller Crespel, homme riche au loisir étrange: il achète sans cesse des violons de prix, pour les démonter tous pièce par pièce, dans l'espoir de trouver le secret du meilleur son possible. Tous, sauf un, au son exceptionnel. Le narrateur, curieux, réussit à entrer dans ses bonnes grâces et à faire la connaissance d'Antonia, l'étrange femme qui vit chez lui, et dont la ville entière prétend qu'elle chante magnifiquement.. bien qu'on ne l'ait entendu  qu'une fois devenue quasi légendaire. Et de fait Antonia est la fille du conseiller, et d'une chanteuse lyrique, qui souffre d'une maladie respiratoire. Chanter encore mettrait sa santé et sa vie en danger, c'est pourquoi elle a renoncé à chanter à tout jamais, en échange de la " grâce" du violon de crémone, dont le son lui rappelle le son de sa propre voix, à l'époque où elle pouvait encore chanter. Mais évidemment tout va finir par tourner mal, c'est du fantastique allemand...
Pour les connaisseurs en musique, cette histoire est celle qui constitue le III° acte des contes d'Hoffmann de Jacques Offenbach .

Le Majorat: dans un château plus ou moins délabré au fin fond du duché de Courlande ( Lettonie), un vieux justicier ( notaire) et son petit neveu vont découvrir comment de vieux secrets de famille continuent à perturber la vie des actuels occupants. Sans compter les bruits inquiétants et les manifestations étranges qui se produisent la nuit, et indiquent la présence d'un revenant dans la vieille bâtisse.
Sans être inintéressant, je l'ai quand même trouvé long: toute une première partie sympathique plante le décor: un châtelain grognon, sa trop jolie femme sujette aux attaques nerveuses, les bruits et les manifestations mystérieuses. La suite est plus confuse, lorsque le récit bifurque sur les complexes histoires d'héritage du baron Roderick, des ses fils, de son petit fils, car malheureusement, il y a dans la généalogie Deux Roderick, deux Hubert, un Wolfgang.. on s'y perd - en en fait, c'est même tellement bizarre parfois que j'ai l'impression que le traducteur s'est emmêlé les pinceaux dans les noms. On saura au final qui est le fantôme et pourquoi il hante les lieux, mais au bout du comte, l'histoire d'héritage prend le pas sur le fantastique, et c'est dommage. Ha oui, et comme on est chez Hoffmann, il y est quand même question de musique: car la baronne qui s'ennuie à mourir ( comme toujours ou presque, chez les femmes d' Hoffmann, elle est de de santé fragile et surprotégée par son mari) se trouve une passion commune pour la musique avec le neveu du notaire et improvise des duos avec lui.

La vie d'artiste: Et je vous le donne en mille: de la musique! On y suit les déboires d'un musicien amateur d'une petite ville, qui découvre un jour ce qu'est vraiment la musique, incarnée par deux musiciennes italiennes itinérantes, deux soeurs qui représentent chacune une approche différente, quasiment une philosophie musicale. il y a Lorette, la soprano colérique, qui ne jure que par les chansons légères et les fioritures, jusqu'à en mettre trop, partout, tout le temps ( j'ai envie de dire qu'elle représente un peu la conception de la musique au service du musicien, pour faire valoir sa virtuosité son talent, etc..) et à l'opposé, Térésina, l'alto et guitariste, qui préfère la musique sérieuse, et la pureté d'une note à l'afféterie ( l'interprète au service de la musique cette fois). Mais les deux sont aussi fausses l'une que l'autre et méprisent le musicien qui les accompagne, et les plante là, lassé de leurs tocades.. n'optant ni pour l'une ni pour l'autre au final. Je pense qu'il faut voir cette nouvelle presque comme une leçon de philosophie musicale, plus que par les femmes, le narrateur explique qu'il est d'abord attiré par le brillant , j'ai presque envie de dire le côté tape-à-l'oeil du chant de Lorette, et qu'il n'arrive pas à apprécier la musique sobre de Térésina,  chose qui se produira peu à peu, quand il aura plus de maturité musicale.  Donc, j'ai apprécié cette nouvelle surtout parce qu'elle me parle en tant que musicienne amatrice, mais je ne sais pas du tout ce que peut en penser quelqu'un qui n'est pas concerné. Peu de fantastique, sauf si on considère la musique, l'inspiration comme un principe surnaturel?

Le bonheur au jeu: ça alors. pas de musique! Pas une note n'est mentionnée cette fois. Il y est juste question d'un homme particulièrement chanceux, qui sombre peu à peu dans la passion des jeux de cartes, auxquels il gagne invariablement de grosses sommes.Avant qu'il ne soit trop tard pour lui, il est abordé par un vieux monsieur qui vient le mettre en garde et lui raconter l'histoire d'un autre joueur du passé, à qui la chance souriait, qui ruinait littéralement ses adversaires jusqu'au jour fatidique où la chance à tourné... Là le surnaturel est plutôt dans cette chance insolente et capricieuse qui s'attache successivement à plusieurs génération de joueurs, qui semblent se la passer comme un mauvais rhume, et qui fait leur malheur plutôt que leur bonheur.

Le Sanctus: un mauvais rhume, c'est justement la catastrophe qui s'abat sur le choeur d'une petite ville. La soliste vedette, Bettina est aphone depuis plusieurs mois, et le médecin perplexe en vient à se demander si elle pourra un jour chanter à nouveau. En effet, elle est tout à fait capable de parler normalement, mais sa voix disparaît mystérieusement dès qu'il s'agit de chanter. Et l'angoisse de devoir abandonner le chant ne fait qu'empirer son état. Un des choristes finira par comprendre ce qui se passe: choc psychologique. La veille de son aphonie, alors qu'elle quittait la messe pendant le sanctus, dès la fin de son solo, afin d'aller honorer d'autres contrats, un plaisantin lui a suggéré que partir avant la fin de la messe lui attirerait surement la colère divine. Plaisanterie que Bettina a pris pour argent comptant. Et pour la guérir, une fable racontant une histoire similaire à la sienne, mais où la chanteuse retrouve sa voix, suffira à lui rendre confiance en quelques jours ( J'ai envie de dire, personne ne se rend compte qu'outre le choc psychologique, elle souffrait de surmenage, avec 4 ou 5 engagements à honorer par jour, et qu'elle avait besoin de repos vocal.. que son organisme l'a forcée à prendre.. mais bon). Une histoire plutôt drôle, même si le conte andalou destiné à rendre confiance à Bettina me gêne aux entournures - puisqu'on y parle d'une maure convertie au catholicisme et qui a enfin embrassé la vraie foi, etc...

En conclusion, un lecture plutôt sympathique, même si je soupçonne quelques bizarreries de traduction ( celle que j'ai trouvé en ligne est la toute première qui date du XIX° siècle), une seule vraie histoire fantastique ( avec fantôme), qui est celle que j'ai le moins appréciée, même si les autres ne sont pas dénuées d'"inquiétante étrangeté" selon la formule consacrée. En fait je pense que le souci c'est d'avoir compilé des nouvelles extraites de différents recueils, qui n'ont pas du tout le même objectif: La vie d'artiste et le sanctus sont plutôt légères et volontiers humoristique, tandis que le violon, le majorat et le bonheur on une ambiance plus mystérieuse. L'objectif de l'auteur n'y est pas du tout le même, et c'est maladroit de les avoir mélangées ainsi. Ceci dit, je le disais déjà ici à propose de l'homme au sable, j'apprécie bien l'humour discret volontiers cynique de l'auteur ( un peu moins sa manie de faire de ses personnages féminins des êtres faibles, à la santé délicate, sur lesquels un père, un mari.. voire même un fabricant exerce une emprise totale. Une fois de temps en temps, pourquoi pas, mais là, c'est un peu trop récurrent)
5° lecture: challenge réussi!
lecture commune: un auteur classique
et de 16!
première lecture pour ce défi.. pour la place que tient la musique dans 4 des 5 nouvelles d'un écrivain qui était aussi musicien et compositeur :)


dimanche 27 octobre 2013

La dimension fantastique tome 2 - collectif

et hop tome 2 de la Dimension fantastique, avec cette fois 6 nouvelles ( oui 6 seulement car il y en a une beaucoup plus longue que les autres.  et donc, sans plus tarder:

l'Elixir de longue vie - H de Balzac:  Ferrare, pendant la renaissance, le jeune Don Juan ( oui, je sais, moi aussi je trouve que ça devrait plutôt être Don Giovanni, pour le coup), se lamente de la longévité de son père, nonagénaire et qui n'a toujours pas daigné mourir. Or voilà que don Bartholomeo est mourant. Sa dernière volonté est, une fois mort que son fils l'asperge d'un liquide qui le ranimera et lui rendra sa jeunesse. Evidemment, il arrive ce qu'on pouvait prévoir: au lieu de d'optempérer, le fils indigne teste la validité du produit et , ni vu ni connu, achève le mourant ressuscité. Le voilà à la tête d'une colossale fortune, d'une vie pour la dépenser en fêtes et en festins, avec l'assurance de profiter d'une deuxième vie plus calme pour s'amender.. Une variante, donc sur le mythe de Don Juan, sans statue du commandeur.. Je ne suis pas convaincue par cette énième exploitation d'une histoire archi-connue, qui finalement n'apporte pas grand chose, hormis de faire du fils indigne le meurtrier direct de son père. Mais, non, je ne suis malgré tout pas pas convaincue.

Gottfried Wolfgang - Petrus Borel: Pendant la révolution française, un étudiant allemand exalté - et persuadé qu'une puissance maléfique cherche sa perte-  rencontre au pied de la guillotine une femme désespérée,qui ressemble trait pour trait à une inconnue vue en rêve et qu'il n'a cessé d'idéaliser. On l'a dit c'est un exalté, donc , aussi sec il la ramène chez lui, lui déclare un amour immortel et la demande en mariage ( là on est en plein dans les clichés faciles qui me hérissent le poil: "elle est jolie, donc je l'aime, à la vie à la mort"). Bien sûr, tout va vite tourner mal. Vite, et c'est ça le problème: cette nouvelles est courte, et aurait gagné à ne pas avoir de mise en place qui raconte que l'histoire a été trouvée dans les papiers d'un disparu. Ca n'apporte pas grand chose, et  la réelle histoire de revenant est réduite à la portion congrue, du coup, j'ai eu franchement du mal à prendre Wolfgang en sympathie et à le plaindre de sa mésaventure. Apparemment cette nouvelle à inspiré "la femme au collier de velours" de Dumas, que je n'ai pas encore lue, mais dont j'attends plus, ne serait-ce que parce que sur un sujet prometteur, Petrus Borel n'a pas le talent narratif que je trouve habituellement chez Dumas. Il faudra que je la lise pour vérifier ça.

Sredni vashtar - Saki: Un garçon de  dix ans, de santé fragile, en pension chez une vieille cousine acariâtre qui le déteste, s'invente au fond du jardin une nouvelle religion: le culte de Sredni Vashtar le grand furet, et révère un furet domestique en cage qu'il cache dans la remise à outil. Lorsque la cousine tombe malade, il en attribue le résultat à son culte secret et à son dieu personnel de la destruction, auquel il va dès lors demander de le débarrasser de son abusive gardienne. Humour noir et irrévérence religieuse, j'ai beaucoup cette nouvelle farfelue.

La chambre perdue - James Fitz o' Brien: un homme quitte un soir pour une promenade la chambre qu'il loue dans une immense pension lugubre où vivent d'autres personnes étranges, bien qu'il ne s'en soit jamais rendu compte. Une discussion avec un inconnu lui met la puce à l'oreille et ce sujet, les autres locataires sont surement des vampires, des démons ou pire, et lorsqu'il revient, sa chambre est occupée par d'étranges fêtards qui la revendiquent comme la leur, et lui proposent de la jouer aux dés. Jouer au dès avec des démons n'est jamais une bonne idée...
Encore une nouvelle très intrigante. Juste après ma lecture, je suis allée vérifier la date de publication: 1858. C'est presque ce qui m'a le plus étonnée, tant elle m'a parue moderne à la lecture, j'aurais facilement dit un siècle plus tard, dans mon idée, elle aurait pu avoir été écrite sans problèmes par quelqu'un comme  Bradbury, par exemple. Oui, c'est ça, elle m'a beaucoup fait penser à du Bradbury en fait. Et détail non négligeable, l'ambiance étrange de cette maison faite de couloirs, avec des gens suspects qui festoient au fond d'une pièce m'a mis en tête Hôtel California, c'est peut être pour ça qu'elle m'a parue plus récente
( la séquence de fête morbide m'a fait penser à la strophe:
Mirrors on the ceiling,
The pink champagne on ice
And she said, 'we are all just prisoners here, of our own device'
And in the master's chambers,
They gathered for the feast
They stab it with their steely knives,
But they just can't kill the beast)

Les filles de la nuit - JL Bouquet: Un auteur de roman policiers à succès reçoit la visite surprise d'un admirateur, créateur et montreur de marionnettes qui lui fait cadeau de quelques poupées à l'effigie de ses personnages . Des marionnettes parfaitement réalisée, qui, mises en situation, semblent entrer en contact avec les vivants qui leur ont servi de modèle. Une nouvelle  thématique un peu vaudoue, en pleine région parisienne. Pas inintéressant, mais.. loooong. Voilà, la longue nouvelle, c'est celle là. A mon goût elle aurait gagné à moins s'étaler (l'auteur était scénariste de cinéma, et.. ça se sent, il y a tant de détails qu'on a l'impression d'avoir sous les yeux un scénario très détaillé). L'autre souci est le recours à des mots rares, mais là il y en a tellement qu'on dirait qu'il a joué au logo-rallye. J'ai relevé : melliflue, obreptice, virevousser dagydes, aîtres. Je n'ai rien contre les mots recherchés, mais là, il y en a trop à mon goût, la nouvelle tombe dans une préciosité qui n'a pas franchement lieu d'être, j'ai juste l'impression que l'auteur cherche à en mettre plein la vue au lecteur. C'est dommage, parce qu'il y a de bonnes idées.

Hier, c'était lundi - Theodore Sturgeon: attention, pépite d'humour décalé et de fantaisie à la limite de la SF!
Harry se réveille un mercredi matin.. avec la certitude que la veille, c'était lundi. Le mardi s'est perdu quelque part en route. Sur le chemin de son travail, il rencontre une horde de petits bonshommes affairés à construire le mercredi: les machinistes de Futura, le monde de l'avenir, sous la houlette de Mr Iridel, le contremaître, qui lui explique que l'avenir est une pièce de théâtre dont il faut sans cesse installer les décors ( une autre équipe s'occupe de démonter les décors de la veille, qui s'entend d'ailleurs très mal avec l'équipe du futur, les deux cherchant à s'attirer les faveurs du "metteur en scène". Harry est donc un figurant de la grande pièce quotidienne, qui a du être mal aiguillé en sortant de scène le lundi, ce qui explique qu'il se soit retrouvé en coulisse avec un jour d'avance! coup de coeur pour cette nouvelle absolument farfelue.

Donc au final, un tome globalement moins bon que le premier, la plupart des histoires m'ont indifférée, mais je retiens Sredni Vashtar, la chambre perdu et Hier C'était lundi, avec un bon 5/5 pour cette dernière)

15/24
1954 pour la plus récente  

mercredi 23 octobre 2013

ôke no monshô tome 1 - Chieko Hosokawa

C'est 'credi, c'est à nouveau le jour de la BD fantastique. Et alors là, je vous ai déniché, du totalement inconnu, du lourd, du bizarre ( j'hésitais presque à le garder pour le 1° avril, c'est dire)
Mais bon, voilà, une histoire de momie revenue à la vie, tout ça..

Donc, que je vous raconte, car c'est un titre que surement vous ne connaissez pas plus que moi il y a quelques semaines: Des mangas il y n a sur à peu près tout les sujets possibles et imaginables. Forte de cette conviction, j'ai fouillé le net pour savoir s'il en existait un sur l'Egypte antique, et Bingo!
Il y  en a donc un, toujours en cours depuis 1976, qui compte maintenant 58 tomes. Oui, 58, rien que ça. Et c'est colossal pour un shôjo, car oui, en plus c'est un shôjo, un manga estampillé fifille.
Autant le dire de suite, il n'a pas été traduit en français, la seule version lisible que j'ai trouvé est une traduction non officielle en anglais, d'après une édition chinoise ( qui comprend parfois des erreurs du genre inversion de bulles ou de cases, mais en s'accrochant un peu on s'en sort).Ôke no monshô est parfois traduit " crest of the royal family" ou " daughter of the Nile", vous trouverez les infos sous ces deux titres.

Qué, un manga pour fille dans une thématique horrifique? tu peux répéter?

Toutafait! un shôjo avec même des passages assez flippants, et le tout datant de 1976, j'ai été très agréablement surprise en fait. J'ai presque envie de dire que les publications se sont sacrément assagies depuis, c'est dommage.
Carol..notre enthousiaste héroïne

Donc, dans ce tome 1, nous rencontrons notre héroïne, Carol Reed,  pétulante blondinette américaine ( elle me fait penser à Véra de scoubidou, avec ses cheveux courts  et ses lunettes - dans le tome 1 en tout cas, elle change de graphisme par la suite on dirait- et ça c'est un bon point). Fille d'un entrepreneur qui finance les fouilles d'un site archéologique, passionnée d'égyptologie, elle est donc scolarisée au Caire dans un cursus spécial pour s'orienter en archéologie ( et hop, deuxième raison de l'apprécier). Sa vie va soudain  basculer lorsque les fouilles de son père révèlent la tombe en parfait état d'un pharaon totalement inconnu nommé Memphis ( oui bon, je sais, c'est une ville, mais apparemment tout le monde s'en fiche), mort à 18 ans, trois millénaires plus tôt, probablement assassiné. Lequel est ramené en ville pour être examiné
Mais hélas, Carol est aussi maladroite qu'enthousiaste et a tôt fait de casser une tablette en argile qui n'est autre qu'un sceau magique qui retient prisonnière une autre momie, bien cachée dans la tombe, que personne n'a vue, la soeur du pharaon, qui revenue à la vie n'a de cesse que de retrouver ceux qui ont dérangé leur repos éternel et enlevé le petit frère.
le réveil de la momie
Et Isis ( Aishizu en kanas, mais visiblement personne de l'équipe de traduction n'a fait le rapport avec la légende d'Isis et Osiris), de momie desséchée revient vraiment à la vie, reprend son apparence de femme vivante, accompagnée d'un chien noir nommé Anubis, et part chercher son frère dans le Caire de 1976. Perdue, elle tombe sur Carol, qui propose de l'héberger (ouah! la gaffe XXL), le temps de mener ses recherches. Isis qui est plus fine que Carol comprend très vite que son père est le commanditaire des fouilles, et décide alors aussi simplement que ça d'éliminer toute la famille. alors que Carol commence à faire des rêves très angoissants, où les peintures murales prennent vie pour l'entraîner dans le passé, où on l'accuse de terrorisme et de tentative d'assassinat sur la personne du pharaon, où Isis lui apparaît en reine cruelle adepte des sacrifices humains ( alerte scénario: euh, ça c'est plutôt en Amérique centrale, les amis!),

oui alors ça c'est du shôjo,

 Isis version XX° siècle élimine peu à peu le reste de la famille: D'abord le père, qu'elle fait mordre par un cobra, puis c'est au tour de Carol, qui survit de justesse à la même tentative d'assassinat (attendez, un shôjo, où l'héroïne voit victime de sacrifice humain puis manque mourir empoisonnée dès le tome 1?!). Et enfin Ryan, frère ainé de Carol qui échappe de justesse à une tentative de meurtre ( grand frère qui ressemble de manière suspecte à Isis et Memphis, ça sent le rebondissement d'ici). Jusqu'à ce en désespoir de cause, le sceau ayant été réparé, Isis doive repartir dans le passé, en emportant avec elle un "souvenir", qui est autre que Carol.
Ta-dam! fin du tome 1 ( et j'ai simplifié): Notre héroïne se voit donc, après avoir failli être assassinée, offrir un allez (simple?) pour l'Egypte ancienne, en compagnie d'une femme  cruelle et sournoise qui veut sa peau.
Alors oui, dit comme ça ça menace de promettre, mais j'ai quand même comme des doutes sur la longueur, 58 tomes, je crains ( et apparemment, après recherche mes craintes sont justifiées) que ça ne tourne vite à l'eau de rose. Mais bon, je tenterai quand même encore quelques tomes, parce que , mine de rien, j'ai quand même envie de savoir  ce qui va se passer et comment les choses vont tourner.

Alors après, oui, c'est un tome 1, au niveau graphisme, ça pêche un peu, d'autant que c'est du manga vintage, donc avec un style très années 70 ( genre la Rose de Versailles si vous connaissez), mais moi, j'aime bien, les dessins entièrement à la main, qui ne dégoulinent pas de trames dans tous les sens, finalement ça passe pas mal avec moi. Et cerise sur le gâteau, les pages couleurs à l'aquarelle une fois imprimées en gris, ben ça donne toujours un résultat plus agréable à l'oeil que les colorisations numériques dans les mêmes circonstances. Puis l'héroïne, bien que parfois très imprudente  a un enthousisme sympathique, et Isis, n'est pas la méchante type juste pour être méchante: sa situation est assez triste dans le fond: perdue à une époque qui n'est pas la sienne, aveuglée par sa vengeance et réellement désespérée de la disparition de son frère, son seul parent au monde. Ajoutons à tout ça quelques moments de trouille plutôt surprenants dans un shôjo, ça fait plaisir à voir.

Pour le lire (en ligne et en anglais jusqu'au tome 11 en suivi), c'est ici
Isis qui cherche le cadavre de son frère, ça me rappelle un truc...
des momies et des pharaons!
un pharaon, j'vous dis.

mardi 22 octobre 2013

et si on écoutait du psychobilly?

Un peu de musique de circonstance pour Halloween?
J'ai comme une envie de vous faire connaître le psychobilly, un style encore assez confidentiel par chez nous. c'est une copine qui m'a fait découvrir ça via son émission radio ( Feue " Clair Osbcur" sur RAJE, coucou Nath' si tu me lis) et j'ai totalement craqué pour ce mélange déjanté et plein d'humour de punk, de surf music et de rock fifties (oui, c'est possible).

Qu'est-ce qu'on y trouve? Une formation proche du trio jazz en fait, avec contrebasse souvent. De la musique qui bouge. Des textes qui font volontiers référence au cinéma d'horreur ou de genre, aux zombies, etc... une imagerie très années 50, des filles habillées en pin up , des bananes, des tatouages.
C'est festif, c'est coloré, c'est plein de têtes de morts de squelettes.. donc j'aime!


par exemple prenons un groupe au hasard -enfin presque: the Necromantix (un groupe danois), au moins pour la contrebasse cercueil, raccord avec celle  de la pin up de l'illustration  :D Oui parce que c'est le genre de chose qu'il faut voir plutôt qu'entendre


ou encore les allemands de Mad sin
(oui je sais, le chanteur fait un peu penser à François Hadji Lazaro avec une crête, et cette idée ne me lâche pas)

Alors, oui, c'est un peu trop masculin tout ça n'est-ce pas, je vous ai promis des filles habillées en pin-up... ça arrive. Et là, on a Horropops, mes petits chouchous ( on reprends le contrebassiste de Nekromantix, à la guitare cette fois, sa femme au chant et la contrebasse)
J'aime la tenue des danseuses :)

allez encore un parce que ça me fait vraiment marrer ce mélange de genres, et que cette nana y va à fond!

et apparemment la parité est assez respectée, il y a pas mal de nanas dans ce domaine, Hellfreaks est un autre groupe emmené par une chanteuse ( hongroise cette fois, on reste quand même beaucoup en Europe du nord ou de l'est.. et parfois ça s'entend)

Mais j'ai quand même un groupe français en réserve: the astro zombies (marinières , marcels et bérets, faut ce qu'il faut!)

Enfin, sans que ça soit franchement du Psychobilly, je pense que ces groupes doivent tous beaucoup aux anglais délirants de Toy dolls



La Dimension fantastique - Collectif

et une petite relecture pour le challenge halloween, j'ai fouillé mes étagères et retrouvé les 4 tomes de cette collection de nouvelles fantastiques éditées chez Librio (4 tomes parus, si ma mémoire est bonne)

Ce premier tome rassemble donc 13 nouvelles d'auteurs classiques du XIX° et XX° siècle ( la plus récente date de 1953), on y trouve:

L'homme au sable - E.T.A Hoffman: enfant, Nathanael a été traumatisé par la légende du marchand de sable, qu'il voyait comme une sorte d'ogre, et l'épouvante  causée par l'avocat Coppélius, un homme effrayant qui se livrait à des expériences alchimiques en compagnie du père de Nathanael, mort accidentellement, justement au cours d'une expérience qui a mal tourné. De cette terreur de jeunesse, il a gardé en grandissant une nature inquiète et nerveuse, une propension au mysticisme et une tendance à s'enthousiasmer pour un rien. La rencontre d'un horloger qui lui rappelle fortement le Coppélius de son enfance va achever de le précipiter dans la démence.
Et pourtant, cette nouvelle est drôle, car Hoffman garde sans cesse ses distances avec son héros et ses lubies : lorsqu'il s'amourache d'une femme vue a travers une vitre, qui ne bouge jamais, ne parle jamais et qu'en bon héros romantique il "l'aime", parce qu'elle est belle sans jamais se rendre compte qu'il s'agit d'un automate. Mais Hoffman est assez malin pour en faire trop avec ce cliché, ce qui fait que son héros passe pour ce qu'il est : un dingue aveuglé que tout le monde au choix plaint ou moque. La toute fin est d'ailleurs d'un cynisme assez réjouissant à ce sujet. Il y a la dedans en plus un leitmotiv ( au sens musical, j'y reviendrais dans le prochain sujet sur Hoffman) au sujet de l'oeil: Coppélius menace Nathanael de lui arracher les yeux, Coppola l'horloger vend des yeux ( des lunettes), Clara la femme vivante est définie par son regard pétillant, tandis qu'Olimpia, l'automate, a un regard évidemment dénué de toute vie.
Et pour les connaisseurs cette histoire est celle qui figure à l'acte II des Contes d'Hoffman d'Offenbach ( avec l'air ultra célèbre pour soprano colorature d'Olimpia), mais je préfère de loin celui de Coppélius ( j'ai des yeux de vrais yeux...). Voix de baryton oblige

La cafetière - Théophile Gautier:  Un homme parti pour quelques jours dans un manoir au fin fond de la Normandie, après un trajet harassant est le témoins d'étranges visions dans sa chambre: fatigue du voyage, rêve, ou imagination en roue libre,  le voilà qui assiste à un concert et à un bal organisé par des personnages sortis des tableaux où les objets s'animent tout seuls, où  il se voit danser avec une femme qui se révèle n'être qu'une vieille cafetière fêlée. Alors, vision de fantômes du temps passé, ou simple rêve? Une nouvelle onirique et agréable, plutôt bien écrite - alors que j'ai parfois du mal à accrocher au style de Gautier par ailleurs.

Le portrait ovale - Edgar Poe: une histoire d'objet vampire. Chez Wilde, le portrait de Dorian Gray prolongeait sa vie, ici, le portrait absorbe littéralement la vie du modèle. Une histoire courte, un sujet plutôt original, mais j'ai eu du mal à y entrer, pour une raison toute bête: impossible d'empêcher des pensées aussi simple que " attends.. il me dit que la femme du portrait s'est mariée avec un peintre célèbre et qu'elle était jalouse du temps qu'il passait  à peindre? mais.. mais quelle godiche, ne te marie pas avec un peintre dans ce cas, si c'est pour le lui reprocher". oui je sais.. mais cette pensée m'a envahie, et impossible de prendre en pitié la femme. Peut être que si je l'avais lue en VO, je n'aurais pas eu cette idée envahissante.

Le monstre vert - Gérard de Nerval: c'est du Nerval, donc, c'est un peu étrange, dans la forme que dans le fond, mais j'ai bien aimé cette histoire sans queue ni tête de cave hantée, de bouteilles diaboliquse, et d'enfant né vert et cornu.

La montre du doyen - Erckmann-Chatrian: une série de meurtres ensanglante la ville d'Heidelberg. Evidemment les premiers soupçonnés, même s'ils viennent juste d'arriver et ne sont au courant de rien, ce sont les musiciens errants, pauvres donc suspects au yeux des bourgeois de la ville. Qui est donc le vrai coupable. On va dire qu'il s'agit d'une variation, par extrêmement bien exploitée hélas (conclusion trop abrupte à mon goût, là ou on aurait du avoir quelque chose de mieux amené), sur le thème du loup-garou, où plutôt cette fois, du chat-garou, si on peut dire. dommage, l'idée était prometteuse.

L'homme à la cervelle d'or - Alphonse Daudet: plutôt un conte que vraiment une histoire fantastique. Un homme, né avec une cervelle en or et surprotégé toute son enfance ( enfin, plutôt son inestimable trésor que lui), se voit contraint de vendre sa précieuse cervelle petit bouts par petits bouts par une famille puis une femme toujours plus exigeants ( car perdant à chaque fois un peu d'intelligence, il devient plus con.. et conséquence, il se marie, sans discernement de plus :D)... qui ne lui réclament pas directement,  non, mais lui font clairement sentir qu'il serait extrêmement égoïste de ne pas partager. Une allégorie très drôle et très cynique de tous les intellectuels fauchés, artistes et penseurs, obligés de brader leurs cerveaux pour se nourrir.

L'orgue du Titan - George Sand: un organiste et son apprentis perdus en montagne à la suite d'une cuite mémorable sont victime d'une hallucination: la montagne se transforme à leurs yeux en orgue géant.
Plus que la nouvelle ( bien que l'approche soit assez truculente), j'ai apprécié le lieu où elle se passe, en fait. Car les roches Tuilière et Sanadoire existent bel et bien, en Auvergne, et font partie des paysages de mes vacances d'enfance, et ça me fait un immense plaisir de les voir mises en avant, véritables personnages de l'histoire.
Tuilière à Gauche, Sanadoire à droite. a noter qu'elles sont en phonolithe, une pierre connue justement pour ses caractéristiques sonores. Dont il est justement question dans la nouvelle.

Vera - Villiers de l'Isle -Adam: un jeune veuf  inconsolable refuse l'idée de la mort de sa femme et décide de simuler sa présence, jusqu'à se convaincre qu'elle est toujours de ce monde. Une histoire assez similaire à la deux fois morte, donc . Je n'ai pas beaucoup apprécié, d'une part à cause de ce sujet assez semblable, d'autre part parce que non, je n'ai pas du tout adhéré à l'écriture symboliste que je trouve vraiment trop grandiloquente dans l'absolu, d'autant plus sur un sujet intimiste.

La chevelure - Maupassant: la nouvelle la plus malsaine et dérangeante du recueil ( et donc paradoxalement j'ai adoré parce qu'elle va jusqu'au bout de son parti pris): un homme qui éprouve une fascination morbide pour le passé et les vieux objets - plus exactement pour les gens qui ont possédé ces objets, des femmes qu'il imagine toujours plus belles plus douces, plus intelligentes, plus vivantes en somme que ses contemporaines - entre en possession d'un vieux meuble qui exerce sur lui une attraction quasi -érotique. Lorsqu'il découvre au fond d'un tiroir une tresse rousse de femme, il donne libre court, jusqu'à la folie à son fétichisme nécrophile ( oui, mais il faut bien le dire comme ça). Pour le coup fantastique et description quasi clinique d'un cas de folie assez extrême, c'est au final ce côté très réaliste qui crée le malaise.

Je suis d'ailleurs - Lovecraft: un narrateur qui ne se souvent plus de son identité et semble enfermé dans un château croulant, suintant et pourrissant, rêve de voir le monde extérieur. Ce qui lui apportera beaucoup plus de déconvenue que de satisfactions. Et j'en ai déjà trop dit. J'avais déjà lu cette nouvelle, et pourtant, elle est terriblement efficace dans sa manière d'installer un climat angoissant, et même en me souvenant parfaitement de la fin, j'ai encore été tenue en haleine jusqu'au bout.

La choucroute- Jean Ray: un auteur quasiment inconnu de moi. Attention cette nouvelle est un ovni. Un type se retrouve littéralement hanté par le souvenir d'une choucroute d'enfer (oui oui, d'enfer) qu'il n'a pas pu déguster. Farfelu, bizarre. Mais ça n'est pas nouveau que j'aime le farfelu et le bizarre!

Le meneur de loups - Claude Seignolle: l'hiver 1870 au fond de la Sologne. Le temps est glacial, la famine et la guerre font des ravages. Un paisible famille de paysan reçoit la visite du "meneur de loups" venu réclamer de la nourriture pour lui et ses dangereuses bêtes. Angoisse, patois, folklores et superstitions populaires.

Escamotage- R. Matheson: un homme voit soudain son entourage disparaître sans laisser de traces. Mais vraiment disparaître. D'abord sa maîtresse, qui du jour au lendemain semble n'avoir jamais existé: personne ne se souvient de son nom, l'endroit où elle travaille est inconnu. Puis c'est le tour de ses amis qui vont jusqu'à s'effacer des anciennes photos ( tiens? Est-ce que cette nouvelle aurait influencé Retour vers le futur?), puis sa famille.. Une ambiance qui me rappelle furieusement la série que j'adore " la Quatrième dimension".. Tout à fait le genre de scénarios efficaces qu'on y trouvait, donc j'aime et plutôt deux fois qu'une. Il me semble d'ailleurs que le regretté Matheson, mort l'été dernier, a d'ailleurs collaboré à plusieurs reprise  aux scénarios de cette série.

Donc au final, je retiens surtout  le cynisme de Hoffman et de Daudet, la folie malsaine de la nouvelle de Maupassant, l'angoissante histoire de Lovecraft, l'efficacité narrative de Matheson, la bizarrerie de Nerval et Ray, et la nouvelle de Sand surtout pour son cadre .
excepté celle de Matheson qui date de 1953, toutes sont antérieures à 1950
14/24, va falloir que je fasse un récap' moi
un librio de plus!
fantastique!

vendredi 18 octobre 2013

le char de la mort - Théophile Schuler ( tableau)

Bon alors pour Halloween, des lectures, des films, de la cuisine, des décors , certes , mais j'avais aussi envie d'aborder d'autres media. et comme je le disais le mois dernier, j'adore la peinture. C'est donc l'occasion de ressortir un tableau qui m'avait fait forte impression lorsque je l'ai vu.

Le char de la mort de Théophile Schuler ( 1851), visible au musée Unterlinden de Colmar ( un musée au passage que je recommande plus que chaudement, au moins pour les gravures de Martin Schönguauer , les tableaux de Holbein l'ancien et Cranach l'ancien, et l'énorme et extraordinaire retable d'Issenheim)
Et donc aussi pour ce tableau d'un peintre plutôt méconnu. Ce n'est aps un grand peintre, je le dis de suite, mais ce taleau -là m'a intriguée, et même faite rire.

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D'abord parce que c'est une résurgence en plein milieu du XIX° siècle du principe de la danse macabre médiévale, où des squelettes musiciens entrainaient toutes les couches sociales dans une sarabande funèbre. Ici, c'est un ange aux ailes noires qui emporte ses contemporains sur un char traîné par 13 chevaux, ou plutôt 13 cadavres ambulants de chevaux, qui rappellent un peu le cheval écorché de Fragonard

Où l'ont découvre ce détail cocasse: les chevaux noirs ont des os noirs!
Et d'autres détails drôles, car au milieu de la composition qui, ça n'engage que moi, me semble un pastiche du radeau de la méduse (1818): composition en triangle, cordes, personnages en désordre..
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Le personnage au bonnet phrygien au premier plan rappelle la représentation habituelle du dieu Mithra, la femme et l'enfant pastichent celle de la vierge et l'enfant, thème classique s'il en est, l'homme à moitié nu au manteau rouge a presque la position d'un des Saint Jérôme de Caravage, à côté de lui, une fausse pietà, et détail marrant mais peut être pas voulu, l'homme en noir entouré de femmes en blanc ressemble pas mal à Edgar Poe. Je n'ai plus le détail, mais il me semble que les références étaient listées au musée ( j'y suis allée en 2008, j'ai comme un trou de mémoire). Tout y passe: les arts, les sciences, les militaires représenté par Bonaparte (couronné, debout derrière l'amérindien, à côté des allégories de la musique et de la peinture)

Et  bien sur, l'humour noir comme j'aime, regardez donc où se trouve la signature du peintre?

Enfin, un tableau méconnu , mais que j'apprécie énormément, et que j'avais envie de vous faire connaitre en cette période de l'année.


jeudi 17 octobre 2013

Le prince de la nuit ( t.1 à 3) Y. Swolfs

Hier c'était le rendez-vous "BD fantastique" du challenge Halloween, -oui je suis en retard, une fois de plus, c'est la faute au décalage horaire on va dire. Et donc l'occasion de ressortir cette histoire de vampire qui prenait la poussière sur mes étagères depuis des années.

Le Prince de la nuit, donc, c'est celui qui se nomme "Kergan le trouvère", musicien errant de château en château en ce XIV° siècle, afin de charmer les maîtres des lieux de sa musique.. avant de les saigner à blanc. Car le charismatique et sinistre Kergan est un vampire, du genre particulièrement vorace, qui n'aime rien tant que créer le chaos et, selon son bon vouloir, sème les cadavres sur sa route, ou accorde la vie éternelle à des sujets méritants: les aigris, les envieux, les jaloux,  les sadiques, les libidineux.. bref ceux dont il estime qu'ils ont le potentiel pour faire de parfaits vampires.

Tome1
Mal reçu chez le sire Jehan de Rougemont, il se venge donc en faisant de sa femme Marianne une vampire qui ravage dès lors la région. Suite à quoi, Jehan fait le serment de retrouver Kergan pour le faire passer de vie à trépas, et s'il échoue à l'éradiquer, la tâche reviendra son fils aîné, et l'aîné de celui là, ainsi de suite jusqu'à ce que justice soit faite.
Paris, 1933: Le journaliste Vincent Rougemont, malade des nerfs et en proie à des cauchemars violents le mettant en scène à diverses époques découvre que son malaise vient de cette tâche, depuis longtemps devenue un secret de famille, enfoui par son grand père au fond d'un jardin. Histoire de vampire à laquelle il ne croit guère ( son psychologue lui a expliqué que le "vampire" qui réapparait dans les documents de famille à des époques troublées n'est qu'une matérialisation de la névrose sociale du moment, et des pulsions violentes de ses ancêtres). Mais lorsque sa route croise celle d'un violoniste virtuose à la figure d'enterrement nommé Vladimir Kergan, et qui est l'exact portrait du monstre qu'il se voit poursuivre en rêve, les choses vont prendre une tournure encore plus étranges et angoissantes pour lui.
tome 2

En fait, il s'agit d'une série en 6 tomes, mais je m'étais arrêtée au tome 3, qui forme un arc complet. Au final je ne connais pas la conclusion de l'histoire, mais  je  trouvais ( et trouve toujours) que les 3 forment un tout cohérent qui pourrait s'arrêter là, en suspension. Je lirais probablement le second arc à l'occasion, mais voilà tel quel, il y  a déjà de quoi faire.

Tome 3: ah, ça c'est du vampire comme j'aimerais pas en croiser la nuit dans une cimetière!
Le dessin n'est pas exceptionnel, disons dans la norme de la BD réaliste, dans le tome 1, et va en s'améliorant comme souvent en BD ( voir la composition des couvertures des 3 tomes) mais j'ai quand même bien accroché: parce que la narration qui fait des va et viens entre les différentes époques et celle de Vincent est assez dynamique pour m'accrocher ( en fait il y a une époque par tome: La fin du moyen âge dans le tome 1 qui met en scène Jehan, le seigneur caractériel, la renaissance dans le tome 2 avec Aymar, l'inquisiteur, la révolution dans le tome 3, avec Armand, le noble qui abandonne ses privilèges pour rejoindre les forces révolutionnaires), les différentes époques dont il est question sont toujours des périodes de crise, et Kergan est un vampire à la fois fascinant et violent, une sorte d'image du mal absolu, presque plus un démon qu'un vampire dans son attitude. J'aime beaucoup le fait que dès le départ on sache que les différents personnages vont échouer ( et donc mourir pitoyablement) puisque rien n'est encore réglé au XX° siècle, mais aussi que les ancêtres soient tous des gens infréquentables sous leur soi-disant foi: Jehan veut venger sa femme, mais il la brutalisait régulièrement de son vivant. Aymar brandit la foi comme un étendard, mais sert surtout pour justifier le tort qu'il fait aux autres, et les morts qu'ils sème lui aussi partout où il passe. Armand a choisi le camp révolutionnaire, mais a laissé décapiter sans état d'âmes une bonne partie de sa famille. Toutes failles que le vampire traqué connaît bien, et exploite, car être chassé l'amuse, mais plus encore pousser ses poursuivants dans leurs retranchements et les mettre face à leurs propres démons.

c'est mercredi , c'est BD fantastique
J'avais lu ces trois tomes il  y a longtemps, un peu en diagonale, et je les avais appréciés sans plus à l'époque. Et pour le coup, la relecture a été bénéfique. En fait je pense que ce qui m'a plu, c'est de retrouver pour le coup, un vampire vraiment néfaste, un qui propose des pactes diaboliques, un qui se change en chauve souris géante ou en monstre difforme, un qui laisse les pulsions violentes s'exprimer. Après quelques années de vampires insipides, meugnons, gentils, sensibles, ça fait du bien de revenir au mythe du monstre maléfique et malsain qu'on adore détester.

(et puis bonus non négligeable: il y a un commissaire de police qui ressemble comme deux gouttes d'eau à Jean Gabin en Maigret, j'aime ce genre de détails)
du féroce, du saignant, Sunako-chan approuve!

lundi 14 octobre 2013

L'étrange histoire de Peter Schlemihl - adalbert Von Chamisso

Première lecture de ce mois halloweenesque,  et lecture novellas  (un roman court de 80  pages), l'étrange histoire de P. S ( sous titrée l'homme qui a vendu son ombre) est une variation humoristique savoureuse sur le thème du pacte diabolique, un grand classique de la littérature allemande - chez Goethe, Faust vendait son âme, chez Hoffman, un homme vendait son reflet.. et chez Chamisso, le héros commet la gaffe de vendre son ombre.

Ecrite en allemand par un botaniste français émigré en Allemagne, ce qui est déjà atypique, le récit ne se prend vraiment pas au sérieux. je l'avais découvert en fac en VO, je l'avais lu par la suite en version bilingue mais je ne l'ai pas retrouvé, je l'ai donc téléchargé en E-book, pour lire dans l'avion. C'est ici que ça se trouve.
L'argument est classique: P. S. ( oui j'ai la flemme de réécrire son nom à coucher dehors à chaque fois!), un homme pauvre, rencontre par hasard lors d'une fête un étrange petit  bonhomme en gris qui est capable de tirer n'importe quoi ( un tapis persan, une tente avec tous ses accessoires, une carriole avec tous ses chevaux) de ses poches, sans que cela semble étonner quiconque. a l'issue de la fête, il se voit proposer un étrange marché: l'inconnu lui offre la bourse de fortunatus, une bourse d'argent inépuisable, en échange de son ombre. Il reviendra un an plus tard pour renégocier le marché. N'importe qui , sain d'esprit, se dirait qu'il y a  un problème, mais voilà, Peter est dans la dèche, et naturellement cupide, il se dit qu'il fait là un marché très avantageux: des sous à voloté contre quelque chose d'aussi immatériel et sans intérêt qu'une ombre.
erreur fatale, car ce marché complique singulièrement sa vie: tout le monde se rend compte que quelque chose cloche, et le voilà obligé de justifier auprès des badauds médusés la perte de son nombre ( avec des arguments aussi farfelus que : "l'hiver dernier il a fait très froid, elle a gelé et ne n'ai pas pu la décoller", "j'ai été malade, j'ai perdu mes cheveux, mes ongles et mon ombre, les cheveux et les ongles ont repoussé, mais l'ombre prend son temps", ou encore " un lourdaud a marché dessus et y a fait un trou, je l'ai amenée à repriser mais elle n'est pas encore réparée"), enfin, sa vie devient très compliquée, la vie sentimentale encore plus ( quelle femme sensée accepterait de sortir avec un homme dépourvu d'ombre, il doit être sacrément négligent pour l'avoir ainsi égarée!).

Lorsque l'homme en gris revient un an plus tard, Peter se voit proposer un marché encore plus désavantageux: l'inconnu ne veut pas reprendre la bourse, mais accepte de lui céder à nouveau son ombre contre un petit contrat .. à prendre où à laisser. Le genre de contrat où il faut signer de son sang la vente de son âme... Peter refuse, et commence donc une vie d'errance, sans ombre, mais finit par se trouver un but dans la vie: la science et l'exploration, loin de tous.

Evidemment, c'est un conte moral: l'argent, les femmes, le pouvoir, tout ça ne vaut rien si c'est au prix de son intégrité. Mais j'ai beaucoup aimé ce conte fantastique pour son humour, d'autant qu'il fait intervenir plein de références folkloriques ou littéraires: Faust en premier lieu, la légende du juif errant, tout un tas d'objets magique: la bourses de fortunatus, mais aussi, les bottes de sept lieues, le nid d'invisibilité ( on le porte sur la tête et on devient invisible.. hormis l'ombre justement), ancêtre direct de la cape d'invisibilité d'Harry Potter.

A voir aussi: quelques illustrations que j'aime beaucoup; apparemment pour une BD, j' adore, ça m'évoque énormément l'expressionnisme allemand au cinéma, c'est tout à fait  dans l'idée du Cabinet du Dr Caligari, j'adhère totalement

13/24: un roman de 80 pages
un conte plein d'objets magiques folkloriques.. et un contrat diabolique
auteur français mais qui écrit en allemand
Ecrit en 1814
un classique de la littérature fantastique allemande, un pacte avec le diable