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mardi 30 mai 2023

La parure - Maupassant

Petit rendez-vous du challenge classique en cette fin mai. Je n'avais pas participé au précédent dédié à Flaubert et Madame Bovary, car je l'avais déjà lu. Il était dans mes lectures imposées du bac français 1994. Et j'avais prêté le livre à une copine depuis des années, elle me l'a rendu... ce mois de mai avec quelques autres. Donc, pas de relecture.

La parure étant une nouvelle, très courte, j'ai pu la lire ce week-end, même après avoir passé un mois de mai très compliqué avec l'université.
hop : le texte ( 4 pages)
Je connaissais l'histoire pour l'avoir vue adaptée en court métrage, il y a quelques années. Mais, si bien qu'ait été le film, comme souvent, je préfère le texte.
D'abord parce que c'est un texte de Maupassant, auteur que j'adore, précisément pour son style sarcastique et cynique. Ici il s'agit de réalisme qui éreinte la société bourgeoise du XIX° siècle et ses travers, mais même dans les récits fantastiques, il n'est jamais loin de la satyre sociale.

Et c'est exactement ce qu'est l'histoire de Mathilde Loisel (le nom me semble choisi à dessein: l'oiselle, la "cervelle de moineau"), anti-héroïne de la parure. Bretonne mariée à un employé de bureau parisien, d'origine modeste, devant faire attention aux dépenses bien qu'elle et son mari ne soient pas pauvres, c'est une bourgeoise qui a soif de promotion sociale. Elle ne rêve que de grandeur, de richesse, de vêtements luxueux, de bals, de bijoux. En soi, finalement, une cousine bretonne de la normande Madame Bovary, qui pensait aussi que l'herbe était plus verte ailleurs. A Paris en l'occurence. Or Mathilde y est, et Paris, c'est bien, si on a les moyens d'y vivre (comprendre, y vivre à la hauteur de ses ambitions, mais chez les arrivistes, tout le monde n'est pas aussi calculateur que Rastignac non plus)
Mathilde en est au point de ne plus aller voir une de ses amies d'enfance parce que mieux mariée qu'elle, elle a mieux réussi (du moins le pense-t-elle).
Lorsqu'arrive l'invitation espérée à un bal bourgeois, il va falloir faire des frais: Mathilde achète une robe neuve, mais... et les bijoux? Pas possible d'aller à une soirée sans bijoux, comme une gueuse, etc, etc, etc... Elle emprunte donc un magnifique collier de diamant à sa copine, se fait remarquer à la soirée, a le sentiment d'avoir enfin réussi socialement. puis se rend compte au retour qu'elle a perdu le collier. Impossible de le retrouver, il va falloir le remplacer par un autre, exactement le même, sans rien dire à la copine.
L'orgueil de briller à une soirée va coûter à monsieur et Madame Loisel dix ans de dettes à rembourser. C'est l'histoire de Cendrillon, mais à l'envers: suite à une perte de quelque chose à un bal, la petite bourgeoise, qui avait une domestique, va se métamorphoser à son tour en femme de ménage. En bonne bretonne, comme il y en avait des centaines à Paris à la fin du XIX° siècle.

Mais, évidemment, ce ne serait rien sans la conclusion qui fait tout le sel de l'histoire et de la critique sociale, déjà peu tendre envers le goût de luxe quand on n'en a pas les moyens, les désirs de grandeur qu'il faut payer cher. Là aussi on peut trouver une ressemblance avec Gervaise de l'Assomoir, qui se ruine, littéralement, pour son repas de mariage, disproportionné avec son état de blanchisseuse, fait des dettes colossales au point d'hypothéquer son magasin, simplement pour en mettre plein la vue à une de ses anciennes collègues de travail au lavoir, lui faire croire qu'elle a mieux réussi qu'elle.

Attention spoiler (mais vu que la nouvelle est courte je ne vais pas le cacher): les bijoux étaient faux, du toc. Tout au plus lui auraient-ils coûté un an à se serrer un peu la ceinture si elle avait eu le courage de le dire à sa copine, qui n'a même pas regardé vérifié l'état des bijoux lorsqu'elle les lui a rendus, faisant bien peu de cas de ce qu'elle savait être du toc.
Mais, pour moi, les bijoux en toc sont un symbole de toute cette société " qui voudrait bien avoir l'air mais qu'a pas l'air du tout". La copine semble avoir réussi, elle est simplement maline au point d'acheter du toc. Sachant que, parmi les bourgeois, tous sont éblouis par les apparences, mais personne n'est capable de différencier le vrai du faux. C'est littéralement toute la société où elles vivent qui est en toc, une pâle imitation des sphères encore plus hautes.
En celà, le message est finalement très actuel, lorsque des gens étalent leur vie "de rêve" dans les médias, vie de rêve bâtie à crédit, financée à coups de likes sur le net, en faisant des publicités payées en sacs à mains, maquillage et autres objets. La réussite, jaugée à l'aune de la possession. La vanité des uns fait la richesse des autres. Mais que la société fournisseuse interrompe le contrat, il faudra aller travailler dans un job " banal" qui ne fait plus rêver personne.
La société " qui se la pète", critiquée par Maupassant existe encore sous le vernis de la modernité.


Le prochain rendez-vous est Rebecca, fin juin dans le cadre du mois anglais, mais, je ne l'ai pas donc je ne le lirai pas.

8 commentaires:

  1. Tout à fait d'accord avec toi ! Mais que la punition est lourde tout de même... 10 ans de dur labeur pour de la vanité, il n'y allait pas de main morte le sieur Maupassant ! ;)

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    1. C'est sûr il n'y va pas de main morte. Mais ça a le mérite de rappeler que contrairement à ce que beaucoup de gens pensent ce n'est pas, du moins pas seulement, un auteur léger ou facile, sous prétexte qu'il privilégie la forme courte.

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  2. Oui, c'est très actuel, le paraître n'a jamais été aussi important qu'aujourd'hui. Est-ce que les photos (trafiquées) des réseaux sociaux ne sont pas les fausses parures de Mme Forestier ?

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    1. Dans un sens oui, je trouve aussi, Mme Forestier serait une influenceuse, de nos jours.

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  3. Les apparences demeurent, elles ont seulement changé de formes...

    Merci de nous avoir accompagnées dans cette LC !

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    1. Sans problème, on verra dans les mois qui viennent si une lecture commune m'est possible ou me tente.

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  4. J'ai toujours trouvé cette histoire poignante, simplement.
    Mais me suis aussi demandé, face à cette fin ouverte: la parure en diamants, qu'est-elle devenue? La copine l'a-t-elle gardée? Si oui, ne peut-on rêver d'un "happy end"?
    (s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola

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    1. On peut... mais je pense que ce serait perdre le sens du sarcasme de Maupassant.
      Vu la couche sociale et l'époque qui sont dépeintes, je ne pense pas que la copine bourgeoise veuille être vue en compagnie de celle qui est ruinée, la réputation étant plus précieuse que l'amitié dans cette société-là.

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