Et une lecture imprévue qui s'est glissée dans mon programme.
Pour laquelle je retrouve mon fil rouge littéraire, l'autre Nikolaï ( décidément cette année, j'aurais été marquée par ce prénom, qu'en plus j'aime bien, y compris sa variante francophone Nicolas).
Et après Théophile et Edgar, c'est presque une thématique "moustaches internationales" en ce début de mois Halloween.
En fait, cet été, dans ma ville, a eu lieu un festival de son et lumière, comme depuis plusieurs années maintenant. Et l'une des animations était faite sur la musique de Moussorgski " une nuit sur le mont chauve".. Tout en précisant " d'après une nouvelle de Nikolaï Gogol"... Euh oui, mais laquelle?
Ni une ni deux, j'ai cherché, j'ai trouvé, j'ai téléchargé et j'ai lu cette histoire d'épouvante mettant en scène un couple de paysans cosaques, un personnage diabolique et " la reine des sorcières " dont le nom n'est pas mentionné dans la traduction que j'ai trouvée, mais qui est bien reconnaissable à son isba montée sur pattes de poules: Baba Yaga. Probablement parce que les traductions gratuites sont anciennes et trafiquaient un peu pour ne pas perdre un lecteur novice du XIX°siècle, qui n'aurait pas su qui était Baba Yaga.
Cette nouvelle est tirée des " veillées du hameau près de Dikanka", largement inspirées des contes et traditions ukrainiennes.
Donc il y a très très très etc....longtemps, près du hameau de Dikanka, dans un village depuis longtemps détruit, vivait un cosaque veuf avec sa fille, la jolie brune Pidorka, et son fils Ivas, 6 ans.
Pidorka avait un galant, Petro, trop pauvre pour prétendre à sa main. Le père avait donc résolu de la marier avec un riche Polonais. Apprenant cela, Petro fit donc ce que tout cosaque ferait dans ce cas: noyer son chagrin à la taverne.
Où se trouvait un très inquiétant personnage, Basavriouk, à la réputation de mécréant, voire de diable.
Or Basavriouk propose un marché à Petro: de l'argent, beaucoup d'argent, bien plus que nécessaire pour pouvoir épouser Pidorka. A la condition de l'accompagner la nuit de la saint Jean (en fait, lors de la fête d' Ivan Koupala*, une fête d'origine païenne déguisée comme beaucoup d'autres en fête chrétienne), cueillir la " fleur de fougère" qui ne se trouve que cette nuit là,pour la remettre à la reine-sorcière. Cette fleur magique permet de faire de la divination et de localiser un trésor.
Ce que Petro fait, voyant alors des montagnes d'or apparaître à ses pieds... mais qu'il ne pourra obtenir qu'au prix d'un sacrifice humain. Or Petro n'est pas d'un naturel violent, et assassiner quelqu'un gratuitement n'est pas son genre.
Pire, la victime qu'il doit décapiter n'est autre qu'Ivas, le petit frère de Pidorka et son futur beau-frère.
Que va-t-il faire? Je ne le dirai pas, ce serait gâcher la suite de la nouvelle.
Car ce n'est pas la seule manifestation étrange, les autres villageois assistent à des phénomènes et hallucinations causées par Basavriouk. De fait, le village entier subit sa présence maléfique.
Mais comme l'auteur fait un récit de conteur, tout ceci est entremêlé de détails pittoresques, de descriptions des innocentes festivités de village (où on mettait le feu aux jupes des filles, histoire qu'elles les enlèvent et qu'on puisse voir leurs jambes, haaaa on savait s'amuser en ce temps là!)
Et donc c'est vendredi, c'est spectacle et théâtre:N°2: on va au concert. Et voir un spectacle son et lumières dans la foulée.
Une nuit sur le mont Chauve- que beaucoup de gens connaissent via Fantasia avec un diable qui a traumatisé des générations de gamins.
Et donc la version de Moussorgski (écrite pour piano, remaniée pour orchestre par Rimski-Korsakov, rien que ça) se base librement sur cette histoire pour composer un poème symphonique narratif décrivant un sabbat de sorcières lors de la fête de Tchernobog - dieu slave des ténèbres, un peu hâtivement assimilé au diable par les autorités chrétiennes - jusqu'à ce que résonne la cloche annonçant l'aube et le retour des esprits dans leur monde ( donc un peu Halloween, un peu Walpurgis).
Comme c'est une musique narrative, elle décrit; dans l'ordre: les voix souterraines, l'apparition des esprits, l'apparition de Tchernobog, l'adoration de Tchernobog, le sabbat des sorcières, la cloche du matin, la disparition des esprits
Tchernobog "dieu noir", l'un des deux principes primitifs de la religion des anciens slaves. Le dieu de la mort, de la nuit, du mal, de la destruction. Comme comme le noir ne peut exister que par contraste avec le blanc, la nuit avec le jour,la destruction avec la création, Tchernobog a bien évidement un frère, Belbog " dieu blanc" ( oui, les noms ne sont pas très originaux!), qui représente, lui, les principes opposés. Le yin et le yang donc..
Et voilà, pour l'exhaustivité, le son et lumière sur une façade d'Avignon (la silhouette de chien n'en fait pas partie!). Evidemment ça rend moins bien qu'en réalité, mais ça reste très sympa. J'ai essayé de le filmer aussi, mais mon appareil photo n'a pas un son génial...)
* parlons donc de cette fête: Il est quand même rare qu'un dieu ait un prénom aussi banal qu'Ivan. Donc un dieu avec un prénom, ça intrigue.
De fait il s'agit d'une fête païenne dédiée à Koupalo, dieu de la fertilité et des récoltes, qui se déroulait au solstice d'été. Le nom "Koupalo" est vraisemblablement lié au verbe qui signifie " se baigner", et la fête implique justement de se baigner à la rivière, de sauter par dessus le feu, bref tout ce genre de rites purificateurs: on brûlait des vêtements appartenant aux malades en espérant se débarrasser magiquement de la maladie, les guérisseurs cueillaient des plantes médicinales et préparaient des médicaments et surtout, on festoyait, on dansait, on chantait, on picolait.. hommes et femmes allaient deux par deux cueillir les fleurs de fougères car on pensait que les fougères fleurissaient cette nuit là, indiquant l'emplacement de fabuleux trésors. Bon, les gens ne revenaient pas forcément avec une fleur ou un trésor, plutôt en ayant conclu une promesse de mariage.
Bon en un sens, si tu pars avec un charmant monsieur et que tu reviens en l'appelant " mon trésor" ou équivalent ukrainien, techniquement, c'est que la magie a opéré.
Mais gare aux sorcières qui sortaient aussi jouer de mauvais tours aux humains cette même nuit.
Donc une fête joyeuse, désordonnée, et tout à fait de mon goût, qui n'a pas plu aux autorités chrétiennes, lesquelles se sont empressées, comme partout ailleurs, de la rhabiller de manière plus chrétienne en fête de Jean le Baptiste.
Hop,on colle un prénom au dieu païen et on en fait un saint, on garde l'idée de l'eau et de la purification, le fait de sauter au dessus du feu, et exit les sorcières et la magie ( même si techniquement, un miracle, c'est simplement un autre nom pour un "TGCM"). De fait, cette célébration n'a pas totalement disparu, bien qu'elle déplaise toujours beaucoup aux religieux de tous bords. Il y a des mouvements " païens", qui revendiquent leur slavité,et les fêtes préchrétiennes, mais malheureusement, ils sont souvent noyautés par des groupes extrémistes politiques, et au final la sympathique fête où il s'agit de se baigner en chantant et en tressant des couronnes de fleurs se transforme en meeting politique nationaliste.
Oh oui magnifique musique...la version Fantasia est superbe aussi....punaise, il faudrait que je le lise....vive les classiques halloween...;)
RépondreSupprimerheu... je crois que mon commentaire n'est pas passé T_T overblog ne veut pas de moi :(
RépondreSupprimerbref je disais, merci pour le découvertes et redécouvertes, cette musique m'a rappelé de bon souvenir
Ha, ça arrive, les caprices du net.
SupprimerContente que ça vous ai plu :)