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samedi 11 juin 2016

Auprès de moi toujours - Kazuo Ishiguro

Aujourd'hui, c'est le jour de l'auteur anglais d'origine étrangère, et ça tombe bien j'ai retrouvé en déménageant ce livre qu'on m'avait donné il y a quelques temps, donc pourquoi pas.
Comme vous l'aurez deviné Kazuo Ishiguro est d'origine bulgare ( non je galèje.. il est bien sûr d'origine japonaise) et j'avais déjà lu de lui les Vestiges du jour  au lycée .

Ca remonte, et je n'arrive pas vraiment à me souvenir si je l'avais aimé ou pas, contrairement à son adaptation cinéma avec les excellents Anthony Hopkins et Emma Thompson, domestiques british jusqu'au bout des gants blancs, dont j'ai plutôt un bon souvenir. Oui, je me souviens en tout cas avoir préféré le film.

Celui-ci sorti en 2005, avait eu aussi il me semble un énorme succès.. que j'ai un peu de mal à comprendre en fait.

Je prends la couverture standard, la version que j'ai est ultra moche: l'affiche du film qui en a été adapté. Je n'en avais pas encore parlé je crois mais je hais ce procédé qui consiste à ressortir un livre avec l'affiche de l'adaptation ciné, et parfois un bandeau rouge " en ce moment au cinéma". Pire encore quand le bandeau est imprimé sur le livre!
Mais voilà, je n'ai pas accroché.  Comme il se déclare "ouvrage de science fiction" j'aurais tendance à dire que je l'ai trouvé vraiment médiocre sur ce point là, et pourtant je l'ai lu facilement, vite et sans déplaisir. Mais sans être passionnée en fait.
C'est ça! Une lecture " pour s'occuper".

L'histoire avait du potentiel mais j'ai hélas très vite deviné la raison d'être de ce pensionnat et la finalité de l'existence de ces enfants "privilégiés". Donc ça m'a vraiment gâché le suspense.

Qualité d'écriture, sans doute, efficacité narrative.. ben non. D'autant que je me suis souvent demandé pourquoi l'auteur prenait autant de détours pour raconter son histoire, se concentrant sur des micro-événements de la jeunesse et des études de ses héros.
Ce qui fait que pendant bien la moitié du récit, la science fiction promise se transforme en récit scolaire pas forcément passionnant: ha ouais, il y a du monde donc la narratrice nous explique qu'elle regarde par toutes les fenêtres du pensionnat pour essayer de voir dans l'encadrement les 2 secondes où il n'y aura personne et avoir l'illusion d'être seule  avec sa poignée de copines.
Oui il y avait là une idée à creuser, la sensation d'enfermement, ce pensionnat isolé dans un cadre à la fois idyllique et inquiétant, ces élèves sans le moindre contact direct avec l'extérieur. L'ambiance carcérale qui affleure sous l'image trop lisse de ces lieux. LE fait qu'ils adorent le film " la grande évasion" ou qu'ils aient été marqué par un récit de prisonniers pendant la guerre.  Hé bien non, l'auteur n'exploite pas et se contente d'une succession de tranches de vie, hop, on passe à autre chose, surtout ne pas laisser le temps aux personnages de développer un questionnement sur leur situation.

Du coup, les personnages sont ternes, mais ternes! Impossible pour moi de m'y intéresser, le regard de la narratrice devenue adulte s'attache plus à ses chamailleries d'école qu'à l"horreur qu'elle devrait ressentir en ayant constaté qu'on leur a menti sur toute la ligne. Non, pas de révolte , rien..

vous êtes prévenus...
Et comme je l'avais déjà fait, si vous connaissez le livre, vous pouvez surligner, si vous ne le connaissez pas, c'est à vos risques et périls, parce que pour bien faire comprendre ce que je n'ai pas aimé, je suis obligée de balancer le noeud de l'intrigue. Je laisse visible ce qui est sans danger...

Kathy, la narratrice,  est une "accompagnante", une sorte d'aide psychologique pour donneurs d'organes, et voit mourir plusieurs de ses amis d'enfance, élevés dans un cocon comme elle, élèves "privilégiés", on ne cessait de le leur répéter, d'un pensionnant à l'ancienne, mais haut de gamme, le top du top. Enfants sans avenir créés par clonage dans l'unique but de servir de banque d'organes ambulantes, destinés à être découpés, peu à peu au gré des "dons" qui sont la finalité de leur existence. il n'en font pas le choix, c'est ce qui a été décidé pour eux, bien avant leur création en laboratoire. Tout ça, on l'apprend peu à peu, c'est sensé distiller une horreur montante chez le lecteur, .. sauf si on l'a deviné dès le début.

Et tout le monde semble trouve ça normal,  non mais, raconte nous plutôt la fois où tu t'es fritée avec ta copine Ruth pour une énième broutille. Et hop digression "ça s'est passé en 4° année de junior, c'était avant tel événement mais après tel autre, moi je m'en souviens même si Ruth n'est pas d'accord sur l'époque..."

Ben là, non, OSEF.

Les personnages sont plutôt lisses, Kathy est extérieure aux événements qu'elle raconte même lorsqu'elle est y est partie prenante, certains sont franchement antipathiques ( Ruth est exaspérante: capricieuse, autoritaire, colérique, manipulatrice et gratuitement cruelle avec ses amis.. qui lui pardonnent tout parce que parfois , elle est vraiment sympa - ou plus prosaïquement parce qu'il y en a besoin comme ressort narratif, si tout le monde l'envoyait bouler dès qu'elle le mérite, la crédibilité l'emporterait sur le deus ex machina ).

Au début pourtant j'ai plutôt aimé l'histoire du petit Tommy, victime de harcèlement sous le nez de tout le monde sans que les profs ( pardon, les gardiens, c'est le mot utilisé) ne semblent s'en soucier.
Du coup, Tommy et Miss Lucy, la seule qui prenne maladroitement sa défense sont à peu près les seuls qui ne m'aient pas laissée totalement indifférente.
Tous les autres sont tellement ébauchés qu'il est difficile de s'y attacher.

Alors qu'un des enjeux cruciaux, via l'art qui est essentiel dans la formation des élèves,  est justement de faire comprendre au monde que les clones dont il s'agit ne sont pas des pantins vides d'esprit, mais des personnes dotées d'une sensibilité. Qui donc se laissent mener à l'abattoir comme des moutons, voilà pour la sensibilité. Dites, si le but est de nous prouver qu'ils sont sensibles, ça serait pas mal de les doter aussi d'un instinct de survie. Narrativement surtout, ça apporterait beaucoup.
Du coup, dans la foulée, un peu de caractérisation sociale ne serait pas de trop non plus, ça aussi ça manque. Quand je lis de la SF, j'aime bien en savoir un minimum sur l'ensemble de la société dans laquelle ça se passer ( là encore je vais citer 1984, mais au moins Orwell ne faisait pas l'économie de quelques détails , inséré dans le récit, pour nous expliquer comment marche son monde. Oui tant qu'à faire dans la comparaison, je prend le summum de la dystopie anglaise... J'aurais pu aussi parler d'Huxley)

Franchement, parce qu'il se lisait bien, et pour quelques moments intéressants, dont celui où les clones cherchent le "modèle" de l'un d'eux, la personne réelle qui est à l'origine de son existence comme un enfant adopté cherche ses parents biologiques,  j'étais prête à passer sur ces imperfections, mais ça, c'était avant le coup de théâtre final, d'une niaiserie sans nom.

Et puis qu'on est en alerte spoiler, spoilons donc:

Dans les derniers chapitres, les survivants de cette histoire retrouvent l'une des personnes qui peut enfin leur donner les clefs sur le programme dont ils ont fait partie.
Là j'attendais une explication moi aussi: qui en a eu cette idée stupide de créer des clones pour don d'organes, qui a eu l'idée encore plus stupide de les maintenir dans l'ignorance de leur état, pourquoi a -t-on fait ça, comment se fait-il que la population soit parfaitement au courant sans être scandalisée, pourquoi les profs qui étaient au courant ont accepté de participer à un tel programme, qui sont les bénéficiaires qu'onnne voit jamais, est-ce que le bénéficiaire des dons est la personne modèle à l'origine, est-ce qu'il y a un moyen d'éviter de crever lamentablement ? des choses comme ça...

Hahahaa.  Non.

Au lieu de ça, l'ancienne gardienne qu'ils retrouvent clouée dans un fauteuil roulant leur explique que non, ils nont aucun moyen de s'en sortir leur unique raison d'être est d'être découpés en tranches au profits d'inconnus qui les considèrent comme des sous-êtres humains,mais que c'était encore pire avant, et probablement après, qu'ils doivent s'estimer chanceux d'avoir eu une éducation top niveau parce qu'ils sont arrivés au moment où on espérait faire considérer les clones comme des humains à part entière, que l'expérience a fait long feu car la société n'était pas prête, c'est donc un fail monumental, maintenant j'ai autre chose à faire, les enfants, il est temps de retourner remplir la mission qui vous a été assignée et retourner sagement donner vos précieux organes à des gens qui se foutent totalement de savoir qui vous êtes, et que moralement, ça arrange de vous considérer comme du bétail. ah, vous pensiez que venir plaider votre cause en parlant d'amûûûur vous sauverait? Ben non , ça aussi on vous l'a plus ou moins laissé croire, parce que ça vous donnait de l'espoir et que grâce à ça vous avez évité la dépression.

En gros, soyez content d'avoir été choyés comme des boeufs de Kobe au lieu d'avoir été élevés en laboratoire, vous devriez même en être reconnaissants, même si au final, ça ne change rien, vous restez du bétail. du bétail qui a conscience de son statut et de sa destinée, car grâce à nous, qui vous avons bernés en vous laissant croire que vous auriez le choix, votre enfance a été heureuse. Et la preuve que c'est une réussite, que j'avais raison, que vous êtes aussi intelligents que des humains normaux c'est que vous êtes arrivés jusque dans mon bureau pour philosopher sur le sens de vos misérables existences, et l'injustice de votre destin, pauvres vous! Allez, tchaô, je suis en plein déménagement, et j'ai pas trop le temps.

Oui, c'est en substance ce que leur dit leur ancienne directrice.

Là, j'ai presque espéré un gros pétage de plomb, un meurtre sur la vieille peau clouée incapable de marcher et de se défendre, une révolte, une fuite pour vivre dans les bois en mangeant des racines et, quitte à vivre comme des fuyards, au moins mourir libres.
Un truc comme ça.
Même dans les films THX 1138 et L'âge de Cristal, le héros le faisait.

Et non: au revoir Madame, nos amitiés à Miss Emily. Une grosse colère au milieu d'un champ plus tard, nos 2 moutons acceptent leur destins et au lieu de tenter le tout pour le tout, la fuite et peut-être la mort s'ils sont rattrapés, n'envisagent pas un instant d'aller à l'encontre de ce pour quoi on les a programmés et qui est leur seule utilité.
Choisir une mort certaine au lieu d'une mort probable.. finalement miss Emily avait tort, ils sont de bons moutons, bien crétins. Dommage, Tommy, dans le fond je t'aimais bien, il y avait de l'espoir pour toi tu aurais pu t'en sortir quitte à vivre en marginal, sans tes boulets de copines.
 
FIN de l'ALERTE SPOILER.

De bonnes idées, mais noyées sous un flot d'événements anodins, de personnages secondaires parfois à peine mentionnés, de personnages principaux qui manquent de caractère, et d'une intrigue qui manque de percutant pour moi. Et un final navrant de bêtise pour couronner le tout. Je voulais faire preuve de mansuétude, mais cette conclusion est vraiment trop portenawak pour moi.
Je passe sur le fait qu'il soit à côté de la plaque sur l'évolution de la médecine, car si on y réfléchit deux minutes, la solution qu'il propose contre les maladies est socialement scandaleuse, et économiquement coûteuse. Alors que la solution " cellules souches" bien plus simple coûte déjà un bras. Un état aurait du être plein aux as ou suicidaire pour la proposer. Et totalitaire aussi. Mais ça, ça n'est jamais évoqué, des trucs énormes sont postulé sans qu'on évoque l'évolution progressive qui y a amené ( 1984) ou la révolte qui couve ( Le meilleur des mondes; Fahrenheit 451)

La SF promise est secondaire par rapport aux passages sentimentaux, un peu comme ce que j'avais ressenti avec La ballade de Lila K: un roman sentimental déguisé en roman de Sf.
En beaucoup moins kitsch et tarte au niveau de l'expression que Lila K quand même, qui m'avait fait plusieurs fois lever les yeux au plafond,  je le répète, ça se laisse lire, mais ça ne me laissera pas un souvenir impérissable. On est loin du " appelé à devenir le classique de nos vies fragiles" tel que le clame pompeusement le quatrième de couverture. Ouaip, c'est ce qui est imprimé derrière, en toute modestie.

Et en fait, comme Lila K, j'ai  l'impression que c'est de la SF pour les non-amateurs de SF. Quand on en a lu beaucoup, évidemment, les attentes sont déçues. Mais considéré comme un roman "d'éducation" sur une jeunesse aux perspectives d'avenir bouchées, il n'est pas si mauvais. Simplement, pourquoi en passer par ce cadre SF mal mené, quand n'importe quelle autre institution pour enfants en difficulté et sans avenir aurait fait l'affaire. Ca aurait pu être un orphelinat, un hôpital pour enfants malades, un hôpital psychiatrique, un camp de réfugiés, que ça marchait tout pareil sur 85% de ce qui est raconté.
Et si le but c'était d'écrire une allégorie sociale sur le plafond de verre des classes défavorisées ( c'est peut être ça en fait?) , ben ç'aurait été un peu plus parlant de le faire directement. Une allégorie doit être clairement compréhensible pour fonctionner. Vous voyez, j'essaye même de lui trouver une finalité pour le trouver moins raté.

Ha oui, un mot du titre qui, lui, est affreusement sentimentalo kitsch. Le titre original n'est pas " always by my side" comme on pourrait s'y attendre, mais Never Let me go, et le fait de le traduire est d'autant moins compréhensible qu'il s'agit du titre d'une chanson ( fictive) d'une chanteuse de Jazz (fictive) nommée Judy Bridgewater ( clin d'oeil à Dee-Dee?).. qui est cité tel-quel dans le texte.

Dans la catégorie " scénario prometteur qui part en sucette", je crois que j'ai trouvé ma sucette d'argent! (non, parce que la sucette d'or est indétrônable.. et c'était aussi un auteur anglais très en vue d'ailleurs). Je suis allée au bout très vite, mais surtout pour le finir le plus vite possible et passer à autre chose, tout en vérifiant s'il n'y aurait pas une amélioration, une révélation énorme sur la fin. Mais non.

Qu'on soit bien d'accord, je ne fais pas la rageuse gratuitement pour le plaisir d'aller à contre courant, j'ai attendu des années après sa parution pour le lire et pas quand tout le monde disait " lis ça, c'est génial", et la déception est à la hauteur du potentiel du scénario. c'est ça que j'appelle un scénario sucette. Quelque chose qui pouvait être bien mais a été mal exploité, mal amené, ou comporte trop d'invraisemblances ou de passages redondants, et donne un résultat frustrant.  Car lorsqu'on s'attend à quelque chose de nul et qu'on tombe effectivement sur quelque chose de nul, bah, ce n'est pas un scénario sucette. Juste un mauvais livre. C'est pour ça qu'ils sont finalement peu dans cette catégorie, 2 seulement depuis 2010. Ca reste très modeste. il y a d'autres livres que je n'ai pas aimés, je l'ai dit, mais souvent je n'en attendait rien de spécial.

La personne qui me l'avait donné n'a pas du trop l'aimer non plus, je le relâcherai donc sans regret au stand "livres en libre service" du cinéma où je vais, tant mieux s'il trouve un public.. je ne le suis clairement pas.

1 commentaire:

  1. Dommage... J'ai beaucoup aimé cette histoire. Donc, ton billet est très intéressant à lire.

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