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mercredi 25 novembre 2015

Les monades urbaines - Robert Silverberg

Hé bien, j'aurais mis du temps à le lire, Silverberg était l'auteur mis en avant en février dernier pour le challenge geek, et qui plus es proposé au groupe par ... moi-même.

Mais j'ai eu du mal à arriver au bout en fait. L'idée de départ était sympa, mais je n'ai pas accroché au traitement, que j'ai trouvé assez répétitif.
le visuel correspond à peu près au contenu, pour une fois ( sauf que les gens sont habillés!)

Au XXIV° siècle, l'humanité a depuis longtemps trouvé une parade à la surpopulation qui menaçait la Terre dès le XX° siècle. Cette parade s'appelle les Monades urbaines: de grands immeubles de 3 kilomètres de haut comptant 1000 étages, groupés par dizaines nommées d'après les villes de "l'ancien monde": Reykjavik Prague, Washington, Colombo, San Francisco.. jusqu'à Louisville au sommet de la monade 116, qui occupe le récit. Les monades étant elles mêmes des éléments d'une constellation , ici " Chippitts", sur les anciens territoires de Chicago et Pittsburgh. Mais l'existence de la constellation Berpar en Europe et Shangkong en Asie laisse supposer que cette organisation est mondiale.

L'humanité est devenue en majorité verticale, libérant ainsi de l'espace pour d'immenses surfaces agricoles, les communes agricoles, gérées par une poignée de paysans considérés comme arriérés par les " urbmonadiaux" qui ne les ont jamais vus.
En effet, on nait, on vit, on meurt dans la monade, sans jamais en sortir: la promiscuité est le lot de tous, d'autant que les urbains, ayant découvert que les surfaces agricoles pourraient nourrir bien plus de monde que 7 milliards d'humains, a érigé en espèce de dogme religieux la procréation à outrance: les monades comptent plus de 800 000 habitants, une famille normale compte facilement 8 ou 10 enfants. Dans cette promiscuité force, l'individu n'a plus droit de cité, l'intimité n'existe pas, on se promène quasiment à poil et on couche les uns avec les autres, dans une liberté sexuelle débridée.
Liberté?
Les femmes n'y sont considérée qu'en fonction de leur beauté plastique, de leur capacités reproductrices ou comme objet de plaisir pour les hommes qui vont, la nuit, toquer aux portes des voisins à la recherche d'un coup vite fait ( je suis désolée, mais il n'y a pas d'autre moyen de le dire, et je suis encore loin du compte). Pour une feme, refuser ses faveurs sexuelles est mal vu, pour un mari, refuser que sa femme se fasse sauter par le voisin est mal vu. Et bien sûr, seuls les hommes vont en "promenade nocturne", les femmes sont passives et doivent attendre leurs visiteurs nocturnes bien sagement.
Et gare à quiconque dévierait de cette "liberté", il ou elle serait considéré comme "anomo", l'anormal, le mouton noir qui met en péril l'harmonie et la stabilité d'un monde qui se clame égalitaire, mais où les femmes sont soumises aux désirs des hommes et où les étages inférieurs sont dévolus aux ouvriers tandis que les étages supérieurs, moins peuplés et éclairés sont réservés aux élites qui les dirigent sans jamais descendre de leur sommet. Dans ce monde où on se marie à 12 ou 13 ans, où on a en moyenne 5 enfants à 22 ans, on devient anomo lorsque les drogues en libre service ne parviennent plus à masquer la vacuité de l'existence,  lorsqu'on commence à réfléchir, à avoir des états d'âmes ( tel Micael qui se pose des questions sur sa soeur, se disant que s'il voulait coucher avec elle, elle serait obligée d'accepter en bonne citoyenne, mais dans le fond, qu'en penserait-elle réellement?), lorsqu'on pense à vouloir sortir, rien qu'un fois pour voir comment c'est dehors, comment est l'air frais, la mer, lorsque la pression sociale et le manque de liberté individuelle vous rend dépressif à 15 ans. La moindre idée de rébellion est automatiquement réprimée à coup de drogues, de "rééducation" ( lavage de cerveau), et si ça ne marche pas, c'est la chute: l'envoi direct au vide ordure, au broyeur- compacteur-incinérateur qui sert à chauffer l'immense batiment.

L'ennui, c'est que ce livre est un ensemble de nouvelles, mettant en scène plus la monade 116 que ses habitants, même si une poignée d'entre eux sont mis en avant. Ce qui fait que sur les 3 ou 4 premières nouvelles, on se demande quand même où l'auteur veut en venir, à sembler développer un personnage pour passer ensuite à un autre.
 Ca semble décousu et répétitif ( toujours les mêmes scènes d'orgies). Dans la première nouvelle, la monade reçoit la visite d'un ponte venu d'une colonie humaine sur je ne sais plus quelle planète ( je l'ai lue en février dernier), qui se trouve déboussolé par ces gens vivant entassés, faisant leurs besoins au vu et au su de toute leur famille, car sur sa colonie, on vit comme les humains du XX° siècle: avec une porte à fermer dans ces cas là. autant dire que j'étais à peu près dans l'état d'esprit du visiteur extra-monadial.

Et c'est d'autant plus bizarre que personne ne semble, je dis bien semble,  trouver ce mode de vie oppressif, tout est pour le mieux de leur point de vue, et pour le lecteur du XX° ou du XXI° siècle, c'est passablement écoeurant. Ce n'est que plus tard et par petites touches que l'auteur laisse entrevoir les failles de ce système: des gens qui pètent les plombs, réellement, à force d'avoir trop d'enfants dans les pattes - et les pires crimes imaginables sont l'avortement ou la contraception- d'autres qui font tout pour cacher leur différence, leurs idées "déviantes"  ( l'historien du XX° siècle, qui cache sa découverte de la jalousie, sentiment qui n'a pas lieu de cité et l'enverrait directement à la chute).

C'est vraiment sur les 2 dernières nouvelles que la mayonnaise à pris pour moi, car elle montre des gens qui sont vraiment à bout de nerfs: Micael, qui plus que tout veut une fois dans sa vie sortir et aller jusqu'à la mer.
Son périple va évidemment s'arrêter à 1 journée de marche de la monade lorsqu'il est arrêté par les agricoles qui le prennent pour un espion. Là il va découvrir une chose inattendue: les agricoles, qui fournissent la nourriture aux monades, vivent horizontalement. Et révèrent le dieu de la stérilité pour lui demander d'avoir le moins d'enfants possibles: car l'expansion verticale ne peut se faire qu'au prix d'une surface agricole gigantesque, qui contraint la poignée de gens vivant encore dehors à adopter l'attitude inverse: un strict contrôle de la densité de population.
Mais son escapade en solitaire fait un bien fou , au moment où le livre devenait étouffant à force de promiscuité. Sur ce coup là, Silverberg a réussi son pari: rendre le livre physiquement étouffant.

Et Siegmund, celui qui réfléchit trop et par trop de sérieux et d'idéalisme compromet aussi la stabilité de la hiérarchie qu'il voulait absolument atteindre et qu'il découvre plus encore corrompue et malsaine que le reste de la monade. Déception qui entraîne une prise de conscience de ce que cette liberté a de carcéral. D'autant plus carcéral qu'elle est consentie et approuvée par la majorité qui croit obéir aux desseins d'un dieu que tout le monde loue à tout bout de phrase, mais dont les statistiques prouvent que moins de 30% des habitants fréquentent un lieu de culte.

Il n'y a pas de "personne âgée" dans cette histoire, hormis la grosse huile au sommet de la hiérarchie qui a 50 ou 60 ans: l'explication est limpide: vieillir, c'est prendre conscience, prendre conscience s'est déprimer , déprimer c'est devenir anomo, devenir anomo, c'est être éliminé du système.

En soit, j'ai trouvé cette histoire encore plus épouvantable que 1984, c'est dire.
Mais voilà, elle pèche par endroits, qui vont qu'elle reste malgré tout en dessous d'autre dystopies que j'ai pu lire. déjà, écrite en 1971, elle caricature le mode de vie hippie " moderne" à son époque.Seulement voilà, en 2015, la liberté sexuelle, les drogues en libre accès, les orges ou fumeries collectives, les tapis à motifs psychédélique, le rock psychédélique.. hé bien ça fait terriblement seventies. L'auteur a caricaturé sa société contemporaine, et malheureusement pour lui, de nos jours, c'est très très daté.
J'en parlais par ailleurs, lorsqu'on décrit quelque chose supposé se passer dans 3 ou 4 siècles, autant mettre le paquet dans l'imagination, avec un peu de chance, ça ne sera pas dépassé dans 20 ans. Manque de pot, Silverberg a été rattrapé, le mouvement hippie est devenu marginal et le puritanisme resurgit à toute force ( bon il faut quand même un juste milieu entre les orgies décadentes et la ceinture de chasteté, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit!)
L'autre problème, c'est la traduction: elle date de 74 ( première édition) et pose aussi un problème, par le choix de vocabulaire assez daté aussi (on va chez le voisin, texto: "pour défoncer sa femme." Je ne sais pas vous, mais j'ai l'impression d'entendre un loubard des années 70 ou 80)

Et le parti pris bizarre d'avoir des personnages qui se vouvoient alors qu'ils vivent entassés et s'envoient en l'air sans aucun état d'âme. Donc un personnage qui dit à la nana qu'il vient voir en pleine nuit " s'il vous plait, laissez moi vous défoncer".. il y a comme un gros problème de niveau de langue. Je suis quasiment sure que le texte original anglais n'emploie pas des " thou" ou des "thyne", mais de simples "you". Ca m'a limite plus dérangée que les scènes de Q au kilomètre.

Donc un livre intéressant, louable dans son intention, mais inégal, parfois ennuyeux, parfois daté, parfois très bien ( les 2 dernières nouvelles). Mais loin d'être un coup de coeur, ses défauts sont à peine compensés par ses qualités et c'est dommage.
Alors que je n'avais pas eu cette impression d'ennui sur Le meilleur des monde pourtant encore plus daté puisqu'encore plus ancien ( haha, les adorateurs de "notre T", la ford modèle T), mais qui a mieux vieilli. En fait peut être que j'en attendais trop en fonction de son sujet, d'ouù la demie déception, il ne me restera pas en mémoire longtemps je le crains. Mais je redonnerai sa chance à l'auteur avec un autre texte, je n'aime pas rester sur un demi échec.
N°128: un immeuble

1 commentaire:

  1. J'ai un très très bon souvenir de ce livre, mais je pense qu'à présent il est vraiment daté.

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