Plus qu'un essai, ce court opuscule est la transcription d'une conférence donnée par Vernant en 2005 à la BNF.
Le mythe en lui même est important, puisqu'il raconte d'une part la séparation des dieux et des hommes après le" coup d'état" de Zeus, avec l'institution des sacrifices rituels, la création de l'agriculture, et d'autre part la séparation des sexes, avec la création des femmes.
Dans un premier temps de l'histoire, les dieux et les humains vivaient un âge d'or sous le règne de Kronos, sans distinction de statut, jusqu'à ce que Zeus prenne le pouvoir et établisse une hiérarchie, et décide de chasser les hommes du royaume des dieux. Il demande à Prométhée de sceller cette division par un partage équitable d'un boeuf sacrificiel, mais Prométhée n'apprécie pas l'injustice et tente de ruser en séparant les os de la viande, et camoufle les os sous de la graisse leur donnant une apparence appétissante, tandis qu'il camoufle la viande dans la panse de la bête, de manière peu ragoutante. Il laisse donc à Zeus le choix de la part qu'il va accorder aux dieux, en espérant compenser l'injustice faite aux hommes. Mauvais choix: Zeus choisit les os camouflés, soit justement la part de l'animal imputrescible et qui contient la moelle, substance vitale en Grèce. Laissant donc aux hommes la nécessité de se nourrir de la part mortelle de l'animal, et donc... entraînant la condition mortelle de l'Homme.
Ce premier sacrifice institue donc le rituel du sacrifice aux Dieux: on dépose sur l'autel les os et la graisse, considérés comme la meilleure part, que l'on fait brûler pour que la fumée nourrisse les dieux, avant de rôtir la viande et de la manger lors du banquet qui suit ( m'est avis que c'est une justification facile pour se garder le rôti et donner les déchets aux dieux :D)
Les hommes se voient donc condamnés à devoir manger pour survivre, et à inventer l'agriculture: en effet Zeus a également décidé que les céréales ( qui du temps de Kronos poussaient sans délai ni aide), devront être cultivées. Mais les aliments ne pourront pas être cuits, car Zeus, décidément très remonté, refuse le feu aux hommes.
La suite est plus connue, Prométhée vole le feu de Zeus pour les hommes afin qu'ils puissent cuire la nourriture et est puni.
Toisième étape de la vengeance de Zeus: créer aux homme un problème éternel, incarnée par Pandora, la première femme, fabriquée à l'image d'une déesse avec le concours d'une partie des divinités Olympiennes, et l'envoyer chez le frère de Prométhée, comme cadeau.
Attention, c'est le moment ou la mysogynie des grecs anciens se révèle dans toute sa splendeur, car Pandora n'est que fausseté dotée d'une "âme de voleur et de menteur" (et pas tellement de cervelle au final) dans une enveloppe flatteuse, mais artificielle.
Si on en croit Vernant, d'ailleurs, elle n'est pas entièrement responsable d'ailleurs, car c'est sur ordre de Zeus, qu'elle emporte la jarre contenant les maux et l'ouvre pour laisser s'échapper les joyeusetés qui sont le lot des humains: maladie, fatigue, vieillesse, etc... Ce qui y reste est abusivement qualifié d'espoir, car la notion grecques est plus vaste: attente de quelque chose d'incertain, donc espoir s'il s'agit d'une bonne chose, mais crainte, s'il s'agit d'une mauvaise chose.
Autant le dire de suite, ce tout petit ouvrage est passionnant. Le mythe, ou plutôt les mythes sont passionnants, et la manière de l'aborder par Vernant est d'une clarté limpide, et pleine d'humour ( franchement qui à part lui pouvait décrire Prométhée, le dieu contestataire et égalitariste comme "le soixante-huitard de l'Olympe"?).
Etonnamment, Zeus, bien que dieu majeur du panthéon grec, y apparait sous un jour très négatif: querelleur, mesquin, roublard, revanchard... tandis que Prométhée, défenseur de l'humanité et victime à son tour, en est le personnage positif. On comprend mieux les qualificatif parfois peu flatteurs que reçoit Zeus dans l'Odyssée, sachant qu'il prend le pouvoir par la force , règne en despote, et donc est à la fois révéré et craint ( ou parce que craint).
Un petit ouvrage que je conseille vivement à ceux qui veulent s'initier à la mythologie grecque sans prise de tête: le mythe est un des plus importants, et on ne s'ennuie pas un instant, avec l'écriture très libre, parfois presque relachée (puisqu'il s'agit à la base d'une communication orale). J'imagine d'ici Vernant en conférence mimant ses dires - il faut que je précise que j'ai eu la chance de suivre les cours d'un de ses élèves, Bernard Mezzadri, le professeur le plus passionnant de toutes mes années de fac, j'imagine assez bien ce que devait donner les cours du maître). Je vois d'ailleurs que certaines conférences sont disponible en audio, il va falloir que je me procure ça!
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Bonsoir, merci pour ton lien ! Je vais ajouter cette lecture à ma liste pour le challenge Mythologies !
RépondreSupprimerOuh là là, tu vas faire exploser ma LAL !!
RépondreSupprimerBon, il avait vraiment une dent contre nous Zeus tout-puissant, là... et rancunier avec ça...
Je connaissais le mythe de Prométhée volant le feu pour les hommes et celui de Pandora mais pas du tout ce qui précède... Bref, encore une lecture qui m'a l'air intéressante...
tu peux t'y lancer sans problème que ce soit celui là ou La mort dans les yeux, ça se lit très très bien
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