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dimanche 30 avril 2023

Polychromie Musicale 1 - Journée internationale du jazz

Figurez vous que j'ai découvert un peu par hasard et avec du retard, le challenge afro-américain d'Enna.
Organisé en février, mais vu mon emploi du temps d'études, c'est assez compliqué pour moi de rajouter des défis. Dédié à la littérature, mais pas que, films, musique, spectacles, art... et j'avais déjà en projet de parler de musique cette année, parce que j'ai décidé de faire 2 sujets spéciaux dédiés à deux musiciens dont j'ai envie de parler cette année, l'un principal représentant de la soul, l'autre du funk (parce que hein, pourquoi pas, en tout cas les deux styles me donnent une patate d'enfer en période de fatigue ) et que tiens.. si je parlais aussi de jazz?

Ce qui devait être fait le 21 juin, mais, la découverte de la journée internationale du jazz le 30 avril fait que je bouleverse l'ordre de mes sujets. Et c'est pas plus mal, puisque la soul, le funk, le disco, tout ça .. ça dérive du blues et du jazz.

Donc préparez vous ce printemps et cet été, il y aura une salve de sujets musicaux afro-américains, sous la thématique " polychromie musicale"

Et pour moi le symbole du jazz, c'est Lui, c'est Louis!
Et si on me demande de citer un musicien américain, c'est aussi à lui que je penserais en tout premier.



Donc je rembobine, et je vais d'abord définir ce que j'appelle ma "polychromie musicale". Pour ceux qui ont suivi, je fais régulièrement des sujets musicaux mondiaux, donc ce ne sera pas très étonnant.
Ma culture musicale étant ainsi faite, que j'ai grandi en écoutant du blues et du jazz, de l'opéra, de la musique classique, baroque, du rock à la radio,  et qu'au fil des années ça s'est étendu en tous sens sans logique, devenant un joyeux bordel d'éclectisme musical, qui tient plus de la jungle que du jardin à la française.

Or cette année, en écoutant un podcast dont je reparlerai le 7 juin, j'ai découvert - oui je suis peut être naïve- une situation que je considère comme absurde et qui m'a fait réfléchir, autant que ça m'a consternée: Ll'existence aux USA de radios spécialisées non pas selon les genres, mais selon l'auditoire visé. Ce qui signifie: des radios pour les auditeurs noirs qui ne programment que des artistes noirs et de radio pour les auditeurs blancs, qui ne programment que des artistes blancs. Je ne sais pas si c'est encore le cas, mais en tout cas, d'après le podcast, ça l'était jusqu'à au moins le milieu des années 80.
Et que ce n'est que vers 1984 que MTV a timidement commencé à diffuser , au compte goutte, des artistes noirs. 2 pas plus. Faudrait pas non plus abuser. Mais bon, moins par souci de rendre les choses plus logiques ou moins sectaires, que parce qu'il y avait 2 mégas vedettes qui commençaient à bien faire parler d'elles à l'international et que... y'a moyen de se faire du pognon non?

Mes réactions:
- C'est absurde. J'ai beau tourner le truc en tout sens, c'est absurde. Programmation par genre, radio de jazz, de rock, de disco, de ceci ou cela, je comprends, mais en fonction de la tête des interprètes? Quand j'entends un morceau à la radio, j'apprécie ou pas, mais sérieusement la tête des musiciens ou chanteurs, j'en ai cordialement rien à secouer à la base. Ca ne se voit même pas!

- Et les métis, on en fait quoi? Garde alternée? Une semaine sur une radio, une semaine sur l'autre? Face A du disque sur l'une, face B sur l'autre? A situation ubuesque, réaction ubuesque.

Oui j'ironise mais cet apartheid musical... non je n'arrive toujours pas à intégrer la chose dans ma caboche. On m'aurait dit " en Afrique du Sud", j'aurais compris à défaut de valider (parce que c'est toujours aussi con, on est d'accord) mais là, je suis restée ... 😲 En 1984, j'avais 7 ans et ça me choque de voir qu'alors que le monde était en pleine guerre froide, certains n'avaient encore rien de mieux à foutre que de classer les gens en fonction de leur couleur de peau, dans un des deux pays qui justement organisaient le souk mondial.

Et c'est là, très récemment, puisque je l'ai écouté en début d'année ce podcast, que j'ai pris conscience que ce qui allait de soi pour moi n'était pas évident pour tout le monde.
Oui, j'ai écouté du jazz toute mon enfance, oui il y avait des noirs et des blancs sur les pochettes des disques de ma mère et ... ben, ça ne m'a jamais interpellée, c'était absolument normal. Parce que des gens il y en a de toutes sortes dans le monde ( faut de tout tu sais, faut de tout c'est vrai. Tiens.. pendant que MTV jaugeait si untel était visuellement acceptable, pendant ce temps là, la France diffusait Arnold et Willy dans les émissions jeunesse. Pour moi c'était juste une série sympa, mais en sachant le contexte, un riche américain blanc qui prend en charge l'éducation de deux orphelins noirs et pauvres, c'était provocateur)

Et que bon je savais que déjà dans les années 1930 / 1940/ 1950 beaucoup d'artistes de jazz étaient venus en Europe où ils trouvaient pour leur musique un public qu'ils ne trouvaient pas chez eux et une liberté qui manquait dans un pays où ta couleur de peau pouvait conditionner le côté de la rue ou tu devais marcher. Donc oui, Josephine Baker, Sidney Bechet, Miles Davis en France, tout ça... je connaissais. Mais que ça se soit poursuivi jusque dans les années 80, ça me troue... pardon, j'allais écrire un gros mot, synonyme de sidérer. Je comprends mieux les problèmes à être simplement écouté, si la diffusion ne se fait que par moitié de population.

Techniquement, il n'y avait pas d'interdiction, ou de risque si on se faisait prendre à écouter une autre radio que celle " normalement" dédiée à votre ethnie (à part peut être des commérages de voisins) et, oui, de chaque côté de la population il devait y avoir des " rebelles" qui écoutaient ce qu'ils voulaient parce que ça leur plaisait. Mais apparemment ce n'était quand même pas la majorité. Je me rappelle avoir lu un commentaire sur Youtube d'un monsieur qui disait que sa tante, au début des années 80, connaissait Michael Jackson mais n'avait jamais entendu parler de David Bowie parce qu'il n'était pas diffusé sur les radios qu'elle écoutait. Sans aller chercher ailleurs des choses dont elle pensait qu'elles n'étaient pas pour elle, parce qu' ON lui avait dit que de toute façon, ça ne l'intéresserait pas. Visiblement le neveu avait eu plus de curiosité.

Et donc absurdité de la situation, puisque moi, petite blanche du sud de la France née en 1977, j'ai plus entendu de jazz, de blues, de gospel, de disco, de soul et de funk dans ma vie que pas mal d'américains plus âgés que moi. Pour ça, au moins, j'ai envie de dire "merci maman", et merci aussi les radios françaises de ne pas avoir fait de sélections de ce genre en amont.

Et donc, après cette digression personnelle pour dégonfler le ballon et planter le décor, c'est parti pou le jazz qui est aujourd'hui à l'honneur.

J'ai essayé de trouver un " arbre généalogique du jazz" pour simplifier. Ha, ha, ha... simplifier... ça reste la forêt équatoriale en matière de styles.

Voilà pour le situer par rapport à d'autres styles. Je suis quand même bien vers le milieu. Je ne peux pas encadrer la country que bizarrement ils rattachent ici à la musique traditionnelle européenne. Ceci dit le fameux podcast musicologique faisait valoir que musicalement Chicago et Minneapolis ont une forte tradition de polka. Je suis morte de rire, ça se trouve dans la "polka belt", ou le style le plus populaire encore au début du XX° siècle, était la polka, à cause d'une bonne partie de la population d'origine polonaise.Voilà l'article qui étudie l'influence de la polka sur la musique des USA) quand on connait la spécialité musicale, jazz/blues pour Chicago et funk-rock pour Minneapolis, et les gens qui les ont diffusés, c'est cocasse. Mais imaginer les USA comme un haut lieu de survivance de la polka me fait marrer.

Et le jazz lui même? C'est encore plus compliqué, ce n'est plus un arbre généalogique, mais un cladogramme à ce niveau.

En tout cas, on ne peut pas nier que le jazz soit à l'origine de quasi toute la musique du XX° et du XXI° siècle, et méritait bien une journée dédiée. Avec concert mondial, diffusé sur le web, depuis l'ONU, le jazz ayant été choisi comme symbole de dialogue, de diplomatie, de paix, d'unité, d'égalité... des choses dont on a plus que jamais besoin.

Pour ce qui est du jazz que je connais le plus, il s'agit surtout de celui placé aux racines et sur le tronc de l'arbre. En effet ma mère avait surtout des disques de standards de jazz , le free, le cool jazz ce n'était pas son truc, j'ai donc découvert tout ça plus tard.

Allez, hop, je vous ai fait une playlist qui intègre un certain nombre des noms rassemblés sur ce schéma plus quelques autres qui manquaient. De Maple Leaf Rag en 1902 à Damn' U en 1992 classés à peu près par ordre chronologique. Il y a du saxo, de la trompette, du piano, de la contrebasse, de la clarinette, de la flûte, du chant, de l'instrumental. Et je rajoute un peu de jazz hors USA à la fin, cadeau de la maison. Et rien qu'avec ça il y a 35 morceaux, j'ai réussi à rester modeste ( mais ça doit bien faire 2h00 d'écoute)

Bref du jazz dans non pas toutes, mais dans un bon nombre de variations possibles...

Rhoo et puis tiens, exprès, je vous fais une sélection à part des chanteuses et musiciennes de jazz. Non pour séparer hommes et femmes, mais pour les mettre en avant, parce qu'on les oublie trop souvent et surtout les plus anciennes. Et énorme coup de coeur pour les big bands 100% féminins de Frances Carroll et sa super percussionniste Viola Smith, celui de Melba Liston ( tromboniste) et de Rhoda Scott (organiste)

Et je tiens à signaler que beaucoup des textes qu'elles chantent sont sacrément salés, ou du moins avec de très forts sous entendus. Comme quoi la gaudriole ne date pas de récemment: entre 1923 et 1934, Rosa Henderson se fiche que son ... euh, chien aille en voir une autre parce que c'est elle qui tient son collier...Maggie Jones propose à qui en veut de goûter son chou, Ada Brown encore plus claire dans son propos, est dingue de la sucette qui lui a fait passer une très bonne soirée, Lil Johnson veut se faire presser la sonnette et Barrelhouse Annie nous dit qu'il ne faut pas forcer sur ce qui ne rentre pas. Alberta Hunter elle insiste sur le fait qu'elle n'est pas une blonde au teint laiteux, mais que bon,  qu'on ne voit plus les différences la nuit. Certes elles sont plutôt classées dans le blues, mais, surtout à l'origine, les styles sont aussi brumeux que le bayou de Louisiane au petit matin.

Maintenant, j'ai trop envie de les apprendre et de faire un concert de grivoiseries vintage! 

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