Apparemment, outre ses compétences manifestes dans son art, il est doté d'un solide sens de l'humour.. et d'une très grande gueule qui lui a plus d'une fois attiré des ennuis. Ceci dit, à plus de 45 ans, il a pris sa retraite de danseur, pour devenir directeur artistique de la principale académie de danse de Saint-Petersbourg.
Il ne me réconcilie pas avec les trucs ultra classiques*, ça ce serait une prouesse, mais dès que c'est plus moderne., j'apprécie, et je reconnais que ce gars-là était probablement parmi les meilleurs au monde quelque soit le style.
(*et je me demande encore ce qu'avait pris Hoffman lorsqu'il a imaginé la lutte entre un ustensile de cuisine et le roi des souris, et ce qu'avaient pris Tchaïkovski et Petitpa pour adapter cette histoire sur scène)
Hop, exemples en images:
La "Sylphide" du Clair Ruisseau - CF précédent sujet (son approche est celle du type, contraint de se déguiser en fille, mais qui savoure la bonne blague, et s'en amuse beaucoup).
J'apprécie les 2 interprétations, très différentes.
Danse en sabots de "la fille mal gardée" ( oui oui, la vieille dame, c'est le même qui adore visiblement les rôles burlesques )
Bon, juste pour montrer quelque chose plus classique, sérieux ... et de gentil héros bien propret.
Il s'agit d'un spectacle intitulé la Fille du Pharaon. Je ne suis toujours pas fan de danse classique. Et la musique est tout sauf un minimum égyptienne. Par contre, pour le coup, l'ami Nikolaï avec ses cheveux très bruns et son teint hâlé est idéal pour incarner un égyptien ( bon, j'ai l'impression d'une adaptation en danse de la BD Papyrus).. et mazette, quel jeu de jambes!
Ou un extrait de Gisèle, ça passe parce que j'aime bien la musique d'A. Adam, assez sympa à jouer en orchestre, et que ça parle de fantômes. Je peux éventuellement envisager un jour de le regarder en entier.
A noter la danseuse, Svetlana Zarakhova, est celle précédemment présentée dans Spartacus, la courtisane sexy au bâton évocateur..
Mais danse moderne + musique moderne + sujet inattendu, c'est peu de dire que j'aime beaucoup!
Et pour conclure, apothéose, solo:
En 15 minutes, sur une chorégraphie"caliente" de Roland Petit, le danseur doit interpréter José, Carmen, le toréro et le taureau, et à nouveau José.
Et d'une part, je le disais précédemment, à ce niveau, la danse équivaut à du sport professionnel. Et là, l'absence de décor, la chorégraphie très graphique et le costume ultra simple mettent en avant la condition physique d'athlète... et nom de mille dieux, profitez - en les filles, visuellement, rien à redire (ou certains gars aussi, après tout, vos préférences ne regardent que vous... on a des yeux c'est pour s'en servir!)
En plus, l'interprétation demande réellement une aisance et un lâcher-prise qu'on pouvait déjà voir dans le Clair Ruisseau. Ce type EST un caméléon: un toréro frimeur, un taureau de combat, un prisonnier en fuite ou une Carmen séductrice et facétieuse.
Là, on est au delà de simplement admirer la plastique avantageuse d'un homme aux proportions parfaites... il a le truc qui fait la différence.
Probablement le fait de se foutre totalement que ce qu'il fait plaise ou non. A vous de juger.
D'autre part, j'aime beaucoup ce genre de chorégraphie, extrêmement
précise, et au delà des sauts, entrechats, battements et jetés, ce qu'il fait
vers 7'30 ( changer de pied tous les deux tours, avec fluidité et sans ralentir)
me parait d'une difficulté sans nom, si je me souviens de mes
lointaines années de danse moderne. Vraiment, des 15 minutes de chorégraphie, c'est ce qui m'impressionne le plus!
APARTE ( où je vais râler un peu sur les psychorigides)
Et à voir les commentaires Youtube, ça en perturbe certains et certaines: APARTE ( où je vais râler un peu sur les psychorigides)
1 et 2:" un homme n'a pas à danser Carmen, avec ces jambes musclées, ce n'est pas beau ", " ce genre de choses est affreux, ça trouble l'ordre des genres et des sexes" (oui oui, carrément, j'hésite entre la moquerie et la consternation),
3:"c'est une folle", " une chochotte".. et autres âneries de cet acabit.
1et 2: Heu, d'une part, vous avez vu les jambes des danseuses? question muscles, c'est kif-kif, d'autre part, les rôles travestis au théâtre et à l'opéra existent depuis toujours, c'est loin d'être nouveau pour XYZ raisons, c'était déjà le cas dans la Grèce antique. Et si vous êtes troublés, C'EST le but recherché ici. Je vous déconseille donc le chevalier à la rose, une femme déguisée en homme en drague une autre.
Mais autant les rôles travestis sont bien perçus quand ils sont ouvertement comiques, autant dès que ce n'est plus comique et qu'on joue sur l'ambiguïté ça pose souci à certains. On loue les talents d'acteur de quelqu'un pour lui reprocher... d'être trop bon acteur.
C'est peut-être eux qui devraient s'interroger sur leurs limites ... et ce qu'elles disent d'eux, bien plus que ce qu'elles disent de l'interprète.
Et de mon humble avis, son José n'est pas moins charmant et sensuel que sa Carmen.
Mais je ne suis pas quelqu'un qui a une vision claire de "ce que doit faire un homme/ une femme", et au contraire, voir une chorégraphie et un interprète qui jouent avec ces codes pour mieux les détourner et les faire voler en éclat, ça me fait plaisir.
D'autant que ces fameux codes, que certains semblent considérer absolus et gravé dans le marbre, sont toujours liés à un lieu et une époque, la mode masculine du XVI° siècle paraîtrait " chochotte " aux yeux de beaucoup.
Et la façon de danser qui synthétise le masculin et le féminin, on la trouve ailleurs et encore actuellement, sans que ça fasse débat. J'ai énormément pensé à Ragunath Manet, danseur indien qui pratique la danse classique et sacrée indienne, le Bharata Natyam. (écoutez l'interview, il explique qu'en Inde, danse, théâtre et musique sont trois facettes d'un seul et même art)
Et comme je suis plus souvent allée voir des spectacles de Bharata Natyam que de danse classique, ben, pour moi c'est absolument normal.
Je dévie un peu, mais c'est l'occasion de mettre le doigt sur quelque chose qui mérite d'être pointé.
3: C'est un ou plutôt ce sont des rôles, mettez n'importe quel danseur de niveau similaire sur cette chorégraphie, ce sera dans la même veine. C'est un truc qui s'appelle "le théâtre", les amis...
Ah oui et z'avez vu, il mime aussi la corrida et une scène de meurtre/suicide, mais là, personne ne moufte ( donc évoquer la violence est acceptable, mais la suggestion et l'ambiguité ne le sont pas. Thanatos ok, mais Eros est persona non grata.)
Donc, il y a des gens, en 2020, qui ne savent pas faire la part, des choses entre la chorégraphie qui leur déplaît - et là, c'est juste une question de goûts et de couleurs - et l'interprète, et font des attaques ad hominem. XXI°siècle, il y a encore du travail.
Je ne sais pas quelle est l'orientation de ce monsieur, mais il peut bien être un homme à femmes, un homme à hommes, un homme aux deux ou un ascète, je m'en contrebalance (Poésie).
Je vois un professionnel au top niveau, qui est d'une précision et d'une légèreté incroyables, reste dans son rôle même pendant les applaudissements, prend visiblement plaisir à être là et à faire ce qu'il fait... et se fout probablement complètement de l'avis des rageux. Et c'est splendide à voir.
Et pour la route, petite anecdote inspirante (pour moi) que j'ai apprise en cherchant des renseignements sur ce danseur:
En 2004, lors d'une tournée en France, catastrophe. Nikolaï, alors vedette du spectacle, a été victime d'une blessure très grave, suivie d'une opération. Ce qui est déjà très problématique pour un danseur trentenaire. Opération suivie d'une infection généralisée, il a failli y rester.
Un an de rééducation et de convalescence, sans savoir s'il pourrait un jour ne serait-ce que recommencer à danser, puis un an d'entrainement pour revenir à son niveau. Avec le risque d'être dès son retour, s'il y arrivait, un peu oublié du public et poussé vers la sortie par les nouveaux venus qui avaient pris le relai pendant 2 ans.
La vidéo "Carmen Solo" date de 2007, donc peu de temps après son retour en scène, et c'est une merveille de maîtrise musculaire. Pas un mouvement de trop. Déjà, ça force le respect.
Mais, d'autant plus balèze, on pourrait imaginer que quelqu'un à qui il arrive une chose pareille sombre dans la dépression et développe une aversion pour tout ce qui touche de près ou de loin la France. Non. Il a occupé son temps de convalescence à apprendre le français. Bravo Niko, tu gagnes encore plus mon admiration.👍
En tout cas, je pensais pas un jour m'intéresser à nouveau à la danse, mais bon, ça fait partie de la culture russe que je dois acquérir, et ce gars-là m'a attiré l'oeil.
Donc je vais passer une partie de l'été à écouter son russe très clair et posé dans des interviews et master-class pour me faire un bagage de vocabulaire spécifique aux arts de la scène, ça sera toujours utile à Avignon.
Merci pour cette découverte :-)
RépondreSupprimerVoilà donc tu as découvert mon modèle de grace et d'élégance, le grand Niko :)
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