Mais surprise, d'une part le livre est tout petit, et d'autre part, LE silence de la mer lui même n'est qu'une des nouvelles qu'il contient. Je ne sais pas pourquoi , je pensais qu'il s'agissait d'un roman et.. non, c'est une nouvelle. ce qui ne me dérange pas, j'aime bien les nouvelles.
Je sais qu'il a été adapté par deux fois sur grand ou petit écran, d'abord par JP Melville en 1949, une version que je n'ai pas vue, et ensuite pour la TV, en 2004 ( je viens d'aller vérifier).C'est cette version que j'ai vu, et c'est surement ça qui m'a fait penser qu'il s'agissait d'un roman , au moins de longueur moyenne.
Et donc la version que j'avais vue m'avait bien plu de mémoire, mais elle prend des libertés avec le récit.
qui finalement n'est pas plus que: un officier allemand pendant l'occupation se voit attribuer une chambre chez un professeur à la retraite qui vit avec sa nièce. Les français font acte de résistance passive en gardant obstinément le silence face à l'allemand qui se révèle être non un sauvage, mai un type normal. Terriblement normal. Et même sympathique, cultivé, amateur de littérature et de culture française. Mais rien n'y fait.
Et c'est TOUT,ou presque, puisque l'image du silence de la mer représente l'impénétrabilité des pensées des deux français, impassibles, mais dont les idées s'agitent sous les crânes comme des poissons dans la mer. de l'extérieur on ne voit rien.
Difficile en effet de faire un film là où le récit se passe surtout dans la tête des protagonistes, à moins de le résumer à de longs monologues de Werner l'officier, face à deux murs. Et encore la fille ne daigne même pas lui accorder un seul regard.
Donc le film prenait la liberté de faire d'elle une professeur de piano, et une résistante qui avertit les autres en posant un géranium sur on balcon. C'est un choix, mais un choix judicieux, puis qu'il apparait dans la seconde nouvelle (Ce jour-là, qui évoque les arrestations soudaines de résistants). Ce qui permettait d'arriver à une longueur de téléfilm correcte, en ajoutant des personnages mais sans que ça ne soit complètement tiré de nulle part.
Je suis moins convaincue par l'histoire d'amour muette entre la nièce et Werner. Certes le Werner du livre est un naïf sentimental, musicien composteur qui se trouve pris dans une situation pour laquelle il n'est pas fait. Et c'est une des bonnes idées de la nouvelle: l'ennemi n'est pas un monstre, mais un quelqu'un avec qui on pourrait même être ami, si la guerre ne les avait pas arbitrairement mis dans des camps opposés. Apparemment on a reproché à Vercors cette approche trop humaine de l'allemand ( peut être que ça mettait des gens mal à l'aise, c'est tellement plus simple d'imaginer que les choses sont parfaitement tranchées où il n'y a pas de question à se poser, juste à canarder indistinctement le salaud d'en face), je l'approuve totalement.
Pour en revenir à l'histoire d'amour du film.. disons que ce n'est pas une interprétation absurde, mais que ça en est une parmi d'autre possible. La plus facile peut-être. et donc la moins crédible de mon point de vue. Je vois plutôt la réaction finale volontairement ambiguë de la nièce comme étant de la déception, ou de la colère face au renoncement de Werner, qui baisse un peu trop facilement les bras.. quelque chose comme ça. Même s'il leur a rabâché à longueur de temps son amour de la France, avec de possibles sous-entendus, elle ne me semble pas y avoir été franchement réceptive.
Enfin; ça c'est la mienne d'interprétation. Plutôt une déception après s'être dit que " tiens, tous les allemands ne sont pas des salauds".
Mais du coup, cette multitude d'interprétations fait la richesse du récit, et ça c'est une bonne chose.
J'ai été moins convaincue par Ce jour-Là, à cause de sa narration qui se veut enfantine, mais est un peu maladroite. Trop enfantine, ou pas assez en fait.
Le Songe aborde la torture, et évoque l'impossibilité de se mettre à la place de la victime, même si le récit des exactions est horrible, il est impossible de le ressentir physiquement ( à part en rêve et encore.)
L'impuissance part du même constat: Renaud a toujours été un type très empathique, trop empathique, le genre qui à l'école primaire se faisait volontairement punir par solidarité avec un camarade injustement puni. Oui, il est un peu zinzin. La guerre aura forcément des répercussions sur ses nerfs fragiles.
L'imprimerie de Verdun, c'est cette fois, les désillusions d'anciens combattants qui ont cru à Pétain, leur héros de la première guerre mondiale. Mais non, Pétain n'abandonnera pas ses poilus, qu'ils soient juifs ou pas.. Là encore leur monde s'écroule avec leurs illusions.
La Marche à l'étoile, est l'histoire d'un vieux Monsieur, un tchèque, parti de Bohème à l'adolescence pour rejoindre l France, pays qu'il a rêvé et idéalisé. Il est intégré, obtient la nationalité française, refuse là aussi de croire à la trahison de Pétain... mais est arrêté lorsqu'on trouve dans sa généalogie une lointaine ascendance juive qu'il n'a jamais considérée comme importante. Là encore je n'ai pas vraiment apprécié l'écriture, un peu trop redondante à mon goût, mais j'ai aimé l'idée.
Comme toujours dans les recueil de nouvelles, il y en a avec lesquelles j'ai lus d'affinité, d'autres moins. La nouvelle titre et L'imprimerie de Verdun m'ont le plus convaincues, je les ai vraiment trouvées au dessus des autres, suivies par La marche à l'Etoile pour son ironie tragique.
Et c'est en faisant quelques recherches sur l'auteur que j'ai fait la relation: Vercors a d'abord été caaricaturiste sous le nom de Jean Bruller. Je connaissais les caricatures, sans savoir qu'il s'agissait du même autre. JE trouve intéressant de voir qu'on y trouve dès les années 20, les même préoccupations: la communication ( ou l'absence de communication), l'envers du décor, les faux semblants, et l'ironie et l'humour noir, servis par des cadrages audacieux. Cynique comme j'aime!
Six du même sang. Ca n'a pas tellement changé! |
Projet d'avenir ou la joie de vivre |
un horrible accident ( il n'y manque que les téléphones portables et appareils photos pour être d'actualité..) |
L'envers du décor (entrée des employés du palace) |
La grande vedette |
Le roi |
Au faîte des richesses |
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