Mais ça peut réserver de bonnes surprises, si, si.
Par exemple découvrir qu' à Digne et dans ses environs, il y a beaucoup d'oeuvres du plasticien Andy Goldsworthy, spécialiste du Land Art. Et, si je suis assez opaque à l'art contemporain en général, j'aime beaucoup le Land Art en particulier, parce que d'instinct, je comprends la démarche, et j'y adhère: ne pas venir dans un lieu avec une idée prédéfinie , mais faire avec les moyens du bord et ce que l'on trouve sur place. Ne pas s'imposer au lieu, mais au contraire l'intégrer à l'oeuvre. Ne pas intégrer dans la mesure du possible de matériaux étrangers au lieu et rester humble. L'impermanence des oeuvres. Tout ça, ça me parle, comme les jardins secs japonais, d'ailleurs, on est dans la même optique contemplative.
Le problème de l'art contemporain "autre" exposé en musées j'ai envie de dire, c'est qu'il n'y a aucun geste fait envers les gens comme moi, pas la moindre information, pas le moindre indice pour expliciter la démarche de l'artiste à la novice que je suis: j'apprécierai peu-être plus si on me donnait l'occasion de comprendre, mais.. voilà, on s'adresse à ceux qui comprennent déjà ( par exemple, il y a eu une grosse exposition dans ma ville il y a 2 ans, un artiste catalan: mise en scène des oeuvres présentées, zéro: tout était mis en tas sur des podiums, comme des voitures au salon automobile, avec une liste des titres des oeuvres non numérotées, en non traduis..tu ne parles pas catalan? débrouille toi!
Et surtout un énorme bronze mis devant le monument au milieu d'une place déjà étroite, une sculpture qui existait déjà en plusieurs exemplaires de par le monde, placée là au petit bonheur, dans un cadre trop étriqué pour elle, mais malgré tout écrasée par la présence du monument à côté. Plus que la sculpture, mise là dans une volonté de décalage ancien/ contemporain, c'est le fait qu'elle n'ai pas été pensée pour le lieu qui me posait problème et m'agaçait. Pas de dialogue entre l'oeuvre et le lieu, juste un bête affrontement
Du coup, avec le Land Art, pas de problème, puisque l'oeuvre est expressément conçue pour un lieu et un seul ( ça aussi, j'ai vu des erreurs : le même monument exposait en salle une oeuvre de richard Long, conçue pour être à l'extérieur, hé bien, sur la photo d'origine c'était très beau, mais une fois mis dans la grande salle, ça ne ressemblait plus à rien. Dommage je n'ai pas de photo, ça remonte à 10 ans).
Donc Andy Golsdworthy, sculpteur anglais ( comme Richard Long d'ailleurs) s'est pris d'affection depuis quelques années pour Les alpes-de-Haut-Provence et la région de Digne, et s'est attelé à la réhabilitation de refuges de montagne en ruine, avec la complicité du musée de Digne, de la Réserve géologique et du conseil général ( pour dire que ce n'est pas un projet farfelu, mais quelque chose de sérieux). L'idée étant d'intégrer une oeuvre, un décor dans chaque lieu restauré, des lieux d'accès libre pour la plupart ( pour d'autres il faut demander la clé à au musée ), avec la double optique d'amener les amateurs d'art à aller se promener dans la campagne, et les randonneurs à être surpris par un décor inattendu.
Première étape: le musée Gassendi en plein centre de digne: le 5 ° étage présente une exposition photo qui retrace le pourquoi du comment de ce projet, des photos ( car certains lieux sont assez difficiles d'accès, même en bonne condition physique, ce sont d'abord des refuges de montagne pour les randonneurs, les chasseurs, etc... Et éloignés les uns des autres: le parcours total fait à l'heure actuelle 150 kilomètres environ et ça n'est pas fini, 3 autres lieux sont en cours d'aménagement), des dessins préparatoires, etc... On peut aussi y voir un petit film où l'artiste décrit sa démarche, se promène dans la nature pour sélectionner les différentes teintes d'argiles pour le décor de l'un des sites, le travail d'équipe avec les gens du musée qui mettent réellement la main à la pâte ( en préparant des galettes d'argile rouge comme on abaisse une pâte à pizza). Très très intéressant, car le spectateur n'est pas laissé en dehors du processus de création. Le 4° étage contient lui un mur entier repeint à l'argile qui forme une silhouette de serpent ou de méandres nommé " rivière de terre" (on retrouve souvent cette forme sinueuse, car Goldsworthy s'avoue fasciné par les rivières)
Afin d'obtenir l'effet voulu, un cadre de bois a été posé contre le mur avec le "serpent" gravé en creux. La couche d'argile est donc plus épaisse à cet endroit, le temps de séchage est différent des zones voisines et le dessin sous-jacent ressort en se fendillant
Deuxième étape: la réserve géologique, où on trouve entre autre le "cairn d'eau", un tumulus en pierre sèche qui rappelle les bories, constructions typiques de Provence.
Les autres oeuvres sont plus éparses, et je ne pourrais malheureusement pas aller les voir, faute de temps ( et aussi à cause d'un temps jusqu'ici très pluvieux, qui m'oblige à piocher les images ici et là, mes photos sont décidément trop grises)
Les sentinelles: 3 gros oeufs de pierres sèches qui "gardent" les 3 vallées autour de Digne
Sentinelle de la vallée de Bès |
Sentinelle de la vallée du Vançon |
Sentinelle de la vallée d'Asse |
Refuge des Thermes (celui là n'est pas très loin, j'essayerai d'y aller quand la météo sera meilleure) |
« En un sens, les cairns situés à l’intérieur des maisons deviennent les jalons de la marche et des monuments à la mémoire de
ceux qui ont autrefois vécu ici. Marcher sur les anciens sentiers qui
étaient autrefois les routes principales reliant les villages entre eux
communique le sentiment très fort de l’énergie et de la vie qui existaient autrefois dans les villages aujourd’hui en ruine, situés là-haut, dans les montagnes, et par là même, évoque peut-être, en retour, la précarité et la fragilité de nos vies.»
Andy Goldsworthy
Chapelle Sainte Madeleine |
« La cavité sera un espace où des personnes
pourront se tenir, un lieu où d'autres se seront tenues avant elles, où
d'autres se tiendront après. Chaque visiteur renforcera cette présence
humaine.
L'expérience de la cavité offrira un contraste absolu avec les montagnes à ciel ouvert. Je ne pouvais pas imaginer meilleure préparation aux refuges.»
L'expérience de la cavité offrira un contraste absolu avec les montagnes à ciel ouvert. Je ne pouvais pas imaginer meilleure préparation aux refuges.»
Andy Goldsworthy
Refuge de la ferme Belon |
« Le rez-de-chaussée a peu de fenêtres et un
plafond bas. L’obscurité sera percée par des rayons intenses de lumière.
C’est l’atmosphère idéale pour édifier des arches de pierre blanche :
elles apparaîtront comme des fantômes architecturaux et leur nombre
devra être suffisant pour communiquer à la pièce une impression de
mouvement et de circulation.
La pierre sera la même que celle des Sentinelles. Blanche, vivante, dans la lumière et l’espace du bâtiment. J’aime l’idée que les Sentinellles soient des guetteurs pour les arches.»
Andy Goldsworthy
La pierre sera la même que celle des Sentinelles. Blanche, vivante, dans la lumière et l’espace du bâtiment. J’aime l’idée que les Sentinellles soient des guetteurs pour les arches.»
Andy Goldsworthy
Refuge du vieil Esclangon |
« Lorsque l’on monte en direction de la maison, sur un chemin
sinueux, on a la couleur rouge dans le regard et la couleur rouge sur
les pieds. On arrive alors dans la maison et on regarde ce mur avec
cette ligne rouge et sinueuse. Je pense que ce sera un formidable écho à
la randonnée.»
Andy Goldsworthy
Pour les curieux, voici la liste des refuges et leurs images: Refuges d'art
Comme l'artiste est anglais d'origine et écossais d'adoption... |
Et bien voilà un billet original pour le mois anglais !
RépondreSupprimerJ'habite bien trop loin pour venir voir cela mais c'est intéressant comme démarche.
très intéressant et une découverte
RépondreSupprimerje suis une grande fan de cet artiste :)
RépondreSupprimerSi ça t'intéresse il y a un très bon documentaire sur son travail (ou on voit comment il s'y prends pour ses sculptures notamment).
ha oui, si tu peux me donner le titre, ça m'intéresse bien
SupprimerJe ne connaissais pas !
RépondreSupprimerBonne semaine à toi :)