Celle -là aussi, je l'ai exhumée de mes étagères en trouvant qu'elle collait bien au défi du froid.
Il s'agit en fait d'un roman graphique basé sur les voyages de l'explorateur américain Robert Peary, au début du XX° siècle, et plus précisément, de la triste histoire de l'inuit Minik et de sa familles, ramenés comme "souvenirs vivants", visibles pour 5 cents la visite sur le bateau, étudiés par le muséum d'histoire naturelle comme des bêtes curieuses.
Tous vont rapidement mourir de maladie, sauf Minik, encore jeune, qui va être adopté par le directeur du musée, apprendre l'anglais, être scolarisé, et "civilisé" selon la conception colonialiste de l'époque.
Jusqu'au jour où il découvre une sinistre réalité: sa famille n'a pas été enterrée à la méthode inuit,comme on le lui avait fait croire lors d'un simulacre d'obsèques, mais les cadavres ont été dépecés et les squelettes exposés au musée.
Minik n'a alors plus qu'une idée en tête, rentrer au pays et réclamer le retour de sa famille. Pendant que Peary se désintéresse totalement de la question,seulement préoccupé de sa prochaine expédition.
Sauf qu'après plus de 15 ans passés aux Etats-Unis, l'inuit n'est plus vraiment inuit. Ni américain, dans un contexte de ségrégation raciale marquée ( et l'aide de camp noir de Peary, Matthew Henson, lui non plus, n'aura jamais le crédit qu'il aurait du avoir dans l'aventure). Perpétuellement entre deux identités, et plus vraiment chez lui nulle part.
N'intéressant plus personne lorsqu'il revient aux USA en 1917, d'ailleurs les conférence de Peary ne font pas plus recette, le monde a maintenant un autre problème que le sort d'un explorateur autrefois célèbre et d'un inuit vagabond à moitié oublié.
Une postface à la BD nous informe d'ailleurs que ce n'est qu'en 1993, soit plus de 90 ans après les faits, que les squelettes seront rendus aux inuits.
Et grosse surprise , j'avais totalement oublié ce fait, qui m'est donc revenu, je m'étais trompée en emballant le cadeau,et j'ai donc maintenant l'exemplaire dédicacé " pour Christine", alors que Christine a celui à mon nom. Je lui avais proposé à l'époque de refaire l'échange , mais ça ne l'avait pas dérangée.
Etonnamment, deux BD sur le même thème avaient paru cette année là ( 2008), celle-ci et une autre simplement intitulée " Minik". Je n'ai jamais eu l'occasion de la lire, j'aimerais bien comparer les deux approches.
Chloé Cruchaudet s'est depuis faite connaître avec Mauvais Genre, joli succès éditorial primé.
On trouvait déjà dans Groenland le style graphique épuré, esquissé de Mauvais Genre, qui marche ici particulièrement bien car il rappelle l'art inuit, ce même art inuit que Peary déclare "inexistant" lors de ses conférences.
Catégorie 37: historique |
tu me fait envie, j'irais voir si je peux la trouver à la bibliothèque
RépondreSupprimerTrès instructif ! et poignant... et glacial!
RépondreSupprimerUne bd que j'avais déjà vu passer sur d'autres blogs et que j'avais envie de lire ! Encore plus maintenant...
RépondreSupprimerContente que cette BD presque inconnue vous inspire!
RépondreSupprimerJe savais que je connaissais le nom de Chloé Cruchaudet mais je n'arrivais plus à lui rattacher un titre, merci de m'avoir rafraichi la mémoire.
RépondreSupprimerJ'avais vraiment bien aimé Mauvais Genre, et tu me donnes très envie de découvrir celui-ci aussi. D'autant plus que je ne sais vraiment que très peu de chose (pour ne pas dire rien) sur la façon dont les Inuits ont été traités à cette époque.
Merci pour la découverte, c'est un titre que j'ajoute immédiatement à ma liste pense-bête :)