Voilà une lecture qui s'est glissée dans mon planning ( une animation à faire à la bibliothèque cette semaine sur le thème de la Grèce, j'ai donc repris ce livre dont une collègue avait lu un extrait dans un autre contexte, on reprend et on remanie les thématiques faute de temps et d'inspiration pour en explorer de nouvelles)
Là, c'est "le petit déjeuner littéraire " estival, et donc vacances, îles, il y a un passage sur la culture des cafés en Grèce, avec un peu de rebetiko en fond musical, ça ira bien.
Donc comme le livre n'était pas bien épais, j'en ai profité pour le lire en entier pendant mes vacances. Et le moins qu'on puisse dire c'est que ce n'est pas vraiment ce à quoi je m'attendais. Est-ce que je l'ai lu avec plaisir ou sans déplaisir? Oui. Est-ce que je vais en garder un souvenir marquant ? Non.
Je ne savais pas qu'il s'agissait de "roman détente", genre que je n'avais pas tenté jusqu'à présent , c'est fait et... je ne jugerai pas sur un seul, mais a priori, ce n'est pas ma tasse de thé ... ou de café.
Le point de départ tient à l'arrière d'une carte postale envoyée de Paros: Fina, quadragénaire, traductrice, s'ennuie à mort dans sa vie quotidienne. Son mari est un riche ingénieur, chiant comme la pluie. Quoi qu'elle fasse, il la critique, et la rabaisse d'un " pff, n'importe quoi". Un de trop. Après avoir bu son café, Fina le quitte après 12 ans à mettre sa personnalité en veille. Et décide sur un coup de tête d'aller à Paros, parce qu'elle traduit les memoires d'une actrice hollywoodienne venue passer ses dernières années là-bas. Et donc elle trouve une location pour au départ 3 mois, chez un vieux monsieur et son petit fils, ils vont devenir amis, la traduction prend son temps, et le sejour de Fina se prolonge, entre découverte de la culture locale, des habitants forcément simples et sympathiques et...
Et c'est là que j'ai beaucoup à redire : les clichés. Costi, le vieux monsieur grec est simple, enjoué et naturellement philosophe. Et parle anglais ( mais comme le roman est écrit en français, on a vite l'impression que tout le monde sur cette île est bilingue, jusqu'aux vieux deux musiciens libanais d'Antiparos). Ha, et il insiste lourdement sur sa santé déclinante, et le fait que son petit fils aime beaucoup Fina. Damn'! Serait-ce important pour l'intrigue?
Le petit Andraos est par chance, parfaitement bilingue parce qu'il est né aux USA, et parfaitement orphelins, puisqu'il est revenu vivre en Grèce chez son grand-père à la mort de ses parents. Il est aussi très mature pour son âge, hein, il se pose plein de questions sur la solitude, la parentalité, etc.....puis Fina n'a pas d'enfant, on sent venir le truc gros comme une maison de riche américaine excentrique dans les Cyclades. Damn'! Serait-ce aussi important pour l'intrigue?
Solal, le mari, est parfaitement insupportable mais moins que sa mère, la belle-doche riche, snob, et parfaitement antipathique.
Et bien qu'elle ait deux filles, il n'y en a que pour son fils. Fina s'entend bien avec ses belles-soeurs pour exactement cette raison d'être toutes les trois méprisées par la vieille.. mais ça n'est pas plus utilisé que ça, donc pas super important pour l'intrigue
Aviva, la tante octogénaire Fina, est parfaitement excentrique, le cliché de l'artiste peintre restée célibataire toute sa vie. elle sert surtout de contrepoint à tout le reste.
Maureen, la vedette américaine est parfaitement morte. Et était de son vivant, une peau de vache, finalement assez semblable à la belle-mère de Fina. Et "comme par hasard", ce qu'elle raconte dans ses mémoires correspond chapitre par chapitre à ce que vit Fina recluse volontaire sur la même île. Etrangement, Fina ne la déteste pas et en vient même à la trouver sympathique.
Et là, le manque de réalisme me pose problème : Fina n'a pas appris un mot de grec en un an et demi et pourtant papote avec l'épicier, la mercière, le propriétaire du restaurant, les hôteliers, et.. tout le monde. On part du principe que si c'est une zone touristique, tout le monde y est bilingue, même s'ils passent leur temps à dire qu'ils ne connaissent pas le français et que leur niveau d'anglais est très bas.
La belle-famille est forcément une famille Lequesnoy, des bourgeois parisiens à l'opposé de la simplicité naturelle de Paros (même Rousseau était moins cliché, à ce niveau-là). Paris est présenté de manière très négative. Et pourtant, dans le récit, il est sans cesse fait référence à des endroits à Paris, le café acheté rue Tartempion, l'appartement dans le boulevard Truc, le restaurant et les boutiques du quartier bidule. Et des auteurs qu'on est supposés avoir lus ( Ormesson, BHL, Gibran..) Comme si tout lecteur français devait forcément connaître tout ça par coeur ( ce qui est d'autant plus étrange qu' Eliane Saliba Garillon est libanaise. Francophone, mais une libanaise qui habite au Liban). Le film Mamma mia, dont on suppose que tout le monde l'a vu - j'apprends donc que ça se passe en Grèce et que non ce n'est pas un film italien, donc. Et je ne l'ai pas vu, et n'en ai pas l'intention.
Or, là, je suis paumée. Ca ressemble à un sorte de connivence culturelle dont je me sens pas mal exclue, comme si le lecteur type était pensé pour être une femme parisienne de 45 ans. Je suis une provinciale provençale de 48 ans. Et à la lecture, c'est curieusement Paris et ses références qui me sont totalement étrangères, alors que la vie grecque telle que décrite est plus proche de mon quotidien. C'est là que j'ai l'impression d'une part de be pas être le lectorat visé, puisque des codes supposés communs m'échappent absolument. Mais j'ai eu aussi l'impression de lire un prospectus non touristique, destiné à le faire comprendre que la vie à Paris, c'est nul, et que le mariage est une monumentale erreur. Non, mais je le savais déjà, c'est bien pour ça que je n'ai aucune envie d'habiter à Paris ou de me marier 😂
Et après tout ça, et une romance amorcée avec un canadien de passage (et peu utile, saut pour faire encore plus comprendre par contrepoint que Solal, le légitime, est un gros nul) , et l'adoption anecdotique d'un chat (parce que toute personne aimant les livres est liée aux chats, c'est dans le cahier des charges : auteur, libraire, bibliothécaire, traducteur... ce cliché a la vie dure) , donc après tout ça, la fin est ... décevante.
À quoi bon nous montrer une femme qui reprend sa vie en main, si c'est pour que sa vie soit en fin de compte à nouveau inféodée aux décisions des autres? Le vieux Costi lui force mine de rien souvent la main, son mari continue à s'imposer à distance, même Maureen - ou son fantôme - semble vouloir depuis la tombe contrecarrer ses projets...Elle est tout sauf la femme libre qui décide pour elle-même. Oui elle est partie, mais n'a pas vraiment appris à dire " Merde" aux autres en 1 an et demi.
Et puis.. il y a dans cette histoire au moins autant de vieux que dans un récit de Perceval, c'est étrange cette manie de mettre des vieux partout.
Donc, ça se lit plutôt bien, mais...je m'attendais quand même à un peu plus d'intérêt et un peu moins d'invraisemblances. Roman détente, certes, mais ce n'est pas une raison pour y mettre AUTANT de clichés. Ou alors, il aurait fallu y aller à donf' et y mettre de l'humour un peu plus burlesque. Là, c'est juste.. un peu plat.
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