Vendredi au théâtre n° 2, cette fois, on va l'opéra.
Après le mignon fantôme rose de Théophile Gautier, j'embraye donc sur ETA Hoffmann, et son double théâtral mis en musique par J. Offenbach.
Un oeuvre musicale fondamentale pour moi, je l'ai écoutée en boucle étant enfant . Oui c'est bizarre mais j'ai plus écouté de classique et de jazz que de trucs pour enfants.
Hoffmann, donc, le vrai, Ernst Theodor Amadeus, est un auteur allemand moins connu du grand public que ses prédécesseurs Goethe et Schiller. C'est l'un des meilleurs représentant du genre fantastique allemand, avec ses contemporains les frères Grimm. Oui je classe les contes en fantastique, on y reviendra un de ces jours.
Et pourtant c'est un de mes favoris. Car il a écrit des nouvelles, donc ça se lit très facilement quand on a peu de temps. Et surtout, pour qui veut tenter la lecture en VO, une nouvelle est peut-être moins contraignante qu'un roman entier.
De plus, si j'ai mentionné Mérimée, Gautier, Maupassant aussi pour le fantastique bien qu'ils aient écrit beaucoup d'autres choses, Hoffmann, lui, s'est vraiment illustré dans le domaine des nouvelles fantastiques. Des fantômes, des apparitions inquiétantes, un prototype de robot ( automate, mais quand même, c'est déjà presque une histoire SF!), le diable, un sorcier par ci, une malédiction par là.
Et le tout saupoudré d'un humour sarcastique qui fait plaisir.
Je cite "Hoffmann est donc un provocateur qui use d'un comique littéraire subtil et que remarque Charles Baudelaire dans le conte Princesse Brambilla, chef-d'œuvre de son art humoristique. Le poète français explique que « ce
qui distingue très particulièrement Hoffmann est le mélange
involontaire et quelquefois très volontaire, d'une certaine dose de
comique significatif avec le comique le plus absolu. » Il poursuit : « Ses
conceptions comiques les plus supranaturelles, les plus fugitives, et
qui ressemblent souvent à des visions de l'ivresse, ont un sens moral
très visible. » Selon Baudelaire, Hoffmann donne l'impression d'être un physiologiste ou « un médecin de fou » (un aliéniste) tant ses descriptions sont réalistes. Ainsi, Princesse Brambilla est un véritable « catéchisme de haute esthétique »39." Merci wiki.
Je ne le savais pas. Une fois de plus, Charles et moi sommes d'accord. Ca a beau être le mois halloween, je vais continuer à distribuer des coeurs géants, pire que le 14 février. Moi qui voulait faire de la Saint Baratin un Halloween bis... C'est Halloween qui devient une déclaration d'amour à l'art.
Et donc les contes d'Hoffmann ( l'opéra) se base sur principalement 3 nouvelles de Hoffmann ( l'auteur) qui sont racontées par Hoffmann ( le personnage principal) lors d'une soirée de beuverie.
Ce n'est pas un bug dans la Matrice.
Rembobinons: Dans l'opéra, le personnage nommé Hoffmann est un écrivain en panne d'inspiration. Il est particulièrement doué pour s'embarquer dans des histoires sentimentales pas possibles, ce qui a le don d'irriter la Muse de la poésie, puisqu'il préfère draguer et se saouler plutôt que se consacrer à l'Art. Elle va donc emprunter l'apparence de Nicklaus, meilleur ami d'Hoffmann, pour le tirer de force de la taverne où il est retranché avec force bouteilles et joyeuse compagnie.
Dans le théâtre voisin, la chanteuse Stella, dernière conquête en date du - z- héros, fait envoyer à Hoffmann une lettre avec la clef de sa loge. Lettre interceptée par le conseiller Lindorf, qui se dit qu'il irait bien volontiers à ce rendez-vous qui ne lui a pas été donné. Et évidemment, Lindorf le notable et Hoffmann l'écrivain ne peuvent pas se supporter.
Ce triangle amoureux de base va réapparaitre sous forme codée dans les histoires racontées pendant les trois actes qui suivent. On pourrait les intituler "les pires échecs sentimentaux d'Hoffmann", puisque chaque fois, il va raconter comment il s'est ridiculisé devant pas mal de monde, à cause de l'avatar de Lindorf dans l'histoire du moment, qu'il fait à chaque fois intervenir dans ses récits comme un "diabolus"ex machina, tant il le déteste.
Acte I: Olympia. Adaptation de"l'Homme au sable". Hoffmann tombe amoureux d'une femme qui n'en est pas une. Non, ce n'est pas un homme, mais un automate. Evidemment, tout à été mené par le nommé Coppélius- Lindorf, qui, pour se moquer d'Hoffmann, lui a vendu des lunettes magiques, qui lui font voir Olympia comme un être vivant alors qu'elle est pour le reste du monde qu'un automate bien raide. Hoffmann, amoureux d'une femme qui n'a pas de coeur (et pas de cerveau non plus).
Acte II: Antonia. Adaptation du "violon de Crémone/ Le conseiller Crespel" Antonia est la fille du conseiller Crespel. Feue sa mère était une chanteuse d'opéra, décédée d'une crise cardiaque. Antonia aime chanter, et a elle aussi une jolie voix, qui pourrait lui ouvrir une carrière sur scène. Mais son père le conseiller refuse qu'elle se lance dans une carrière artistique, dangereuse d'après lui pour sa santé. Hoffmann veut la convaincre de tenter sa chance ( sans savoir le risque qu'elle court). Arrive le docteur Miracle - Lindorf, qui, avec ses pouvoirs magiques, fait apparaître le fantôme de la mère d'Antonia, lequel la pousse aussi à chanter, bien que ça puisse lui être fatal. Et c'est évidemment ce qui se passe. Hoffmann, amoureux d'une femme qui a un coeur cette fois, mais défaillant.
Acte III: Giulietta. adaptation des aventures de la saint Sylvestre. Pour oublier ses deux précédents échecs, Hoffmann est parti en Italie.Il va tomber entre les griffes de Giulietta, une prostituée vénale, payée par le dénommé Dapertutto, pour "voler" des choses à ses conquêtes grâce à des objets magiques. Au précédent, Peter Schlemihl, elle a volé son ombre - d'après " l'histoire fantastique de Peter Schlemihl ou l'homme qui a vendu son ombre" A.Von Chamisso. Ce titre long comme une année sans vacances est un petit livre très drôle qui revisite avec humour le Faust de Goethe. Faust vend son âme, Peter son ombre.. et ça va lui poser beaucoup de problèmes.Très peu connu en France, et c'est bien dommage.
Sa nouvelle mission est donc de voler dans un miroir le reflet de Hoffmann.
Pourquoi? Bah, comme ça, parce que Dapertutto, le docteur Miracle, Coppélius sont les versions fantasmées de Lindorf, qu'Hoffmann met à toutes les sauces dans ses récits, tant il le déteste.
Hoffmann, amoureux d'une femme dont le "coeur" est à vendre.
épilogue: Hoffmann jure qu'il en a fini avec les femmes, toutes des... et explique à ses compagnons de picole que ces 3 histoires sont de fait des inventions pour représenter Stella, l'artiste, qui, en résumé, se fait passer pour une pure jeune fille mais ne vaut pas mieux qu'une.. euh, on va dire gentiment, courtisane. Devinez qui arrive à ce moment?
Stella.
Qui, entendant ce que Hoffmann (qui a peut être un coeur mais pas de jugeote), raconte à ses potes, le plaque instantanément. Pour Lindorf. Au moins, ce n'est pas un soiffard de taverne qui l'insulte en son absence.
Ne reste donc plus à Hoffmann qu'à cuver en maudissant les femmes en général, et se consacrer enfin à sa seule muse , qui, toujours travestie en Meilleur ami, ambiguïté XXL, fait littéralement une déclaration d'amour à son écrivain.
Vous comprenez pourquoi j'adore? Ce n'est pas une intrigue linéaire, on est loin du simple triangle amoureux de base, le personnage décrit comme un diable n'est qu'un type normal, le héros assez misogyne se fait plaquer par sa nana après l'avoir descendue en flamme devant tout le monde et c'est bien fait pour lui. Et pour finir une scène plutôt culottée. On est loin du standard des intrigues d'opéra.
Musicalement, c'est un bijou. Offenbach était un petit rigolo, mettant en musique des sujets souvent humoristiques, mais qui pour moi est musicalement du même niveau que Rossini. Ses adaptations musicales des fables de la Fontaine sont des pépites d'opéras en miniature.
Clairement, c'est un de mes compositeurs favoris et un de ceux que j'ai le plus de plaisir à chanter.
Les contes d'Hoffmann sont remplis du début à la fin d'air plus brillants les uns que les autres.
A noter que c'est le même baryton/basse qui interprète Lindorf et ses variations, et c'est pour moi un vrai plaisir à écouter.
Surtout "Scintille diamant", de l'acte III. Peut-on avoir un coup de foudre pour UN air? Oui. Depuis ma première écoute, ce morceau " diabolique" est mon absolu favori - et je regrette presque d'être une femme car je ne peux pas le chanter. Enfin si, seule chez moi.
Au choix, José Van Dam (baryton-basse, tonalité habituelle)
Ou Samuel Ramey, grand spécialiste des rôles de diable ( tonalité abaissée pour basse, plus rarement entendue, vous pouvez donc écouter ici la différence entre baryton-basse et basse)
La barcarolle est plus connue, mais pour moi c'est vraiment "Scintille Diamant" qui est le diamant de cette oeuvre.
Olympia, l'automate qu'il faut réparer comme une formule 1. A chanter évidemment de manière extrêmement raide et cocasse.
Oh bonne idee de mettre de l'opera pour Halloween....ouiii....et merci pour toutes ses explications...;)
RépondreSupprimerje fais un peu de panachage:, puisqu'on ne peut pas aller aux spectacles, ou difficilement: Poésie et danse, concert symphonique, opéra, et il y en a encore à venir :)
Supprimeroh oui cela manque lala....cela commence a faire long quand meme....en tout cas merci pour le prochain spectacle...bien hate...;)
Supprimerje note, merci pour ces nouvelles découvertes
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