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jeudi 14 octobre 2021

La Vénus d'Ille - Prosper Mérimée

Tiens puisque je parlais de Mérimée - traducteur au sujet de Pouchkine, pourquoi ne pas le ire aussi pour lui même en tant qu'auteur entre autre de quelques nouvelles fantastiques.
Il est loin d'être le seul, beaucoup de ses contemporains ont plus oeu moins tâté du genre fantastique, que ce soit Théophile Gautier, Barbey d'Aurevilly, Gérard de Nerval, alexandre Dumas, Charles Nodier, Villiers de L'Isle-adam ou même des auteurs classés comme réalistes tels Balzac ( la peau de chagrin, ou l'elixir de longue vie que j'avais chroniqué ici) ou Maupassant ( le Horla entre autres).
En fait, c'est presque le fait de ne pas avoir cédé à cette tendance venue d'Allemagne et d'Angleterre qui fait exception.

Et donc Mérimée, dont le fond de commerce était l'exotisme ( l'exotisme de l'époque étant par exemple l'Espagne de Carmen ou la Corse de Colomba), arrive à concilier parfois les deux. Et donc direction les Pyrénnées, un endroit que la plupart des parisiens du XIX° siècle ne connaissient pas, forcément mystérieux, avec des montagnes inquiétantes, des gens qui parlent une autre langue ( le catalan). Et oui, effectivement pour le parisien lambda de l'époque, qui lisait des romans et des nouvelels dans les journaux l'endroit était probablement aussi dépaysant qu'un pays étranger.
La Vénus d'Ille, beaucoup l'auront probablement lu au collège, en tant qu'exemple de nouvelles fantastique, souvent même pour présenter le genre fantastique, probablement sans grand enthousiasme parce que lecture imposée.
Donc un petit retour aux sources, pour lire la nouvelle simplement pour elle même, avec entre la période du collège et maintenant tout un bagage culturel et littéraire qui s'est forgée.

La trame est simple: Un parisien amateur d'antiquités arrive dans ls Pyrénnées pour rencontrer Monsieur de Peyrehorade, collègue local, pourqu'il lui fasse visiter la région. Or Peyrehorade a trouvé récemment une magnifique oeuvre d'art, une statue antique de Vénus romaine,  qui fadcine mais.. met mal à l'aise ceux qui la vient: la statue, si parfaite soit elle, a un air malicieux, voire méchant, et les locaux l'évitent , voyant en elle une idole payenne, voire un démon. D'utant que son excavation a causé un accident, il n'en faut pas plus pour lancer une réputation de malédiction.

Peyrehorade met ça sur le compte des superstitions encore vivaces à la campagne. Mais notre narrateur confirme, elle a vraiment l'air mauvaise.
Sur ce, Peyrehorade convie son invité a rester quelque jour, son fils se marie le lendemain, c'est l'occasion d'assister à une noce locale catalane. Le fils en question est vraiment un sale type, orgueilleux, vantard, grossier et surtout âpre au gain. Il va se marier avec une femme gentille et délicate, qui a la malchance d'être une riche héritière, et qu'il voit comme une tirelire ambulante ( ce que le narrateur trouve ignoble pour la future mariée qui n'a vraiment pas mérité un crétin pareil)
Or le jour même du mariage, le futur marié décide d'entamer une partie de jeu de paume, laisse la bague qui l'encombre et trouve très subtil de la passer au doigt de Vénus. Dans la précipitation il oublie la bague, et entend donc la récupérer le soir. ce qui s'avère impossible, car la statue ne veut pas la rendre ( mais comme il est ivre lorsqu'il raconte ça, on ne le croit pas). Il ne faut pourtant pas plaisanter avec une femme, et encore moins se moquer de Vénus, fût-elle en bronze!
La statue va donc venir nuitamment récupérer son dû: son mari. Elle ne fait pas une affaire, hein...

Ceux qui l'ont lue connaissent la fin, ceux qui ne l'ont pas lue, débrouillez vous, vous êtes probablement collégiens et non, pas la peine d'insister, je ne fais pas vos devoirs :D

Par contre, c'est une bonne chose de l'avoir relue avec un oeil neuf, j'ai pu voir des choses qui m'avait échappé: la discrète critique sociale sur les mariages d'argent qui dégoûtent véritablement le narrateur. Ou sur les gens qui se piquent d'avoir une connaissance encyclopédique et veulent tant impressionner " ceux de la capitale" qu'ils en deviennent ridicules : L'antiquaire Peyrhorade veut tellement avoir trouvé une statue qui révolutionne tout ce qu'on sait du monde antique, que contre toutes les évidences d'occupation romaine des lieux, il lui tricote une origine assyrienne, et pour prouver ses dires, tord en tous sens la toponyme locale pour trouver aux patelins du coin un nom assyrien en plein dans les Pyrennées ( La Vénus porte une inscripton "turbul", que le narrateur traduit comme " turbulente "ou "qui trouble", ce qui semble évident. Peyrhorade y voit les noms de "Tyr - Baal", respctivement une ville et un dieux assyriens, qu'il pense trouver dans le nom de "Bouleternère" la ville d'à côté)

Je découvre aussi au passage qu'Ille ( Ille-sur-Têt) existe vraiment et que c'est magnifique.


Mais surtout j'y vois maintenant clairement une variation sur le thème de la statue vivante, connue depuis la Grèce antique: la légende de Pygmalion, dont la statue prend vie grâce à Aphrodite (tiens donc, l'équivalent grec de Vénus) avec une interpolation de la statue du commandeur dans Don Juan, qui vient demander des comptes à celui qui l'a offensé.
On peut aussi faire un lien avec le Golem, statue qui s'anime lorsqu'on grave sur lui un texte magique ( la Vénus a un texte gravé sur le bras), ou qu'on lui confie un artefact magique ( souvent représenté par un collier ou une médaille)
Donc non, ce n'est pas un sujet original, mais au contraire une variation sur un sujet très bien connu depuis toujours, mais c'est justement l'intérêt, de voir maintenant l'intertexualité qui m'avait échappé quand j'avais 14 ans.

Et donc, de mon point de vue, c'est dommage de cantonner les classiques au collège, et de ne plus y toucher ensuite. On peut y trouver des choses intéressantes, en une courte soirée de lecture.
Pour le lire en version numérique, c'est ici.

2 commentaires:

  1. Intéressants tes commentaires d'adulte ! Il faudrait que je me livre à la même expérience...

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    1. Et là je suis occupée avec Gautier, et.. pareil, j'y trouve des choses qui m'avait échappé quand j'étais plus jeune.

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